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Edito : Hauts débits : dans une décennie, chacun d'entre nous aura besoin de plus de 100 mégabits

En cette semaine de la fête de l'Internet, il est intéressant d'imaginer ce que pourrait être devenue la Toile dans dix ou quinze ans. Tout d'abord, et toutes les enquêtes le confirment, le développement d'Internet dans le Monde est encore plus rapide que ce que nous pouvions imaginer, il y a quelques années. Nous sommes déjà quelque 600 millions d'êtres humains à être reliés les uns aux autres par un même protocole nous permettant d'utiliser tous les réseaux de télécommunications mondiaux. Alors qu'à la fin des années 1990 nous pensions qu'il nous faudrait attendre la fin de la première décennie du 21ème siècle pour atteindre le premier milliard d'internautes, ce cap symbolique devrait être franchi dès 2005 ou 2006. Ainsi, l'éclatement de la bulle financière qui, en 2000 a mis à mort des milliers d'entreprises ayant construit leurs business plan sur le rêve n'a en rien ralenti le tissage de la Toile qui, inexorablement, s'étend sur l'ensemble de la Planète. La nouveauté des temps présents dans ce monde Internet est la montée en puissance rapide des hauts débits, depuis quelques mois. Les internautes ressentent aujourd'hui le même engouement pour l'ADSL ou le câble que celui qu'avaient connu nos Grands Parents quand la modernité avait apporté l'eau courante sur l'évier au lieu d'être obligé d'aller la chercher au puits. Ils ont ainsi apprécié le très grand confort apporté par une connexion permanente au réseau Internet et ce, pour un prix forfaitaire, connu d'avance. Ils ne font que commencer à découvrir l'intérêt des grandes vitesses d'échanges pour télécharger de plus en plus rapidement de lourds dossiers. En analysant l'ensemble des travaux qui sont actuellement menés dans les principaux laboratoires mondiaux, nous en sommes amenés à conclure que la Loi de Moore qui veut que les performances d'une technologie double tous les 18 mois, tout en conservant les mêmes coûts, va dorénavant s'appliquer au débit dont disposera chaque internaute. Ainsi, si nous prenons comme point de départ de l'application de cette Loi de Moore la présente année 2003, en constatant que l'offre de base des hauts débits est actuellement de 500 Kbits, tout laisse à penser que les débits, dont aura besoin chaque internaute dans un peu plus d'une décennie, se positionneront entre 100 et 200 Mégabits (128 Mégabits dans 12 ans !) Il est nécessaire de faire cet effort d'anticipation pour éclairer suffisamment loin devant la voie de l'avenir. Ce n'est qu'avec cette vision claire du futur que l'investissement pourra enfin repartir dans ce secteur hautement stratégique. Pendant quelques années, les technologies XDSL (ADSL, etc...) vont gagner d'importantes parts de marchés car, les réseaux cuivres que ces technologies utilisent sont déjà construits et les investissements à réaliser ne sont pas des travaux d'anticipation, mais des dépenses réellement ajustées, dans ces moments difficiles, aux demandes d'abonnements. Pendant les cinq à six ans qui viennent, du moins si la Video On Demand ne fait pas accélérer le pas, les technologies ADSL devraient pouvoir relever le défi des hauts débits. Toutefois, quand les exigences des internautes atteindront un débit descendant de 15 Mégabits, ce qui arrivera avant la fin de la présente décennie, les technologies cuivre devront laisser place aux réseaux optiques, le photon remplaçant alors l'électron. Aussi, quand nous prenons conscience qu'à l'horizon 2010, il sera nécessaire de disposer de réseaux optiques sur l'ensemble du Territoire si nous voulons que tous les Français aient les mêmes chances d'entrer dans l'avenir, nous comprenons mieux tous les défis qu'il va nous falloir relever dans ces prochaines années. Pour inciter les investisseurs à se concentrer à nouveau sur la construction de ces réseaux optiques les Pouvoirs Publics doivent, sans retard, prendre toutes les décisions qui s'imposent. Le législateur doit tout d'abord améliorer la Loi et les Ministères compétents faire progresser la réglementation pour faire redémarrer l'industrie du câble dans notre Pays. Faisons disparaître ces lois anti-concentration qui ne sont plus de saison et surtout qui sont injustes quand nous constatons ce qu'on a pu accorder à la concurrence satellitaire, par exemple. Mais surtout, et cela devient urgent, le Gouvernement va devoir se prononcer clairement sur l'économie du câble. Soit les Pouvoirs Publics confirment la volonté exprimée par le précédent Gouvernement de déployer la TNT (Télévision Numérique Terrestre), et alors tous les opérateurs de la TNT, comme ceux du câble, iront vers l'échec car aucune de ces technologies ne trouverait son point d'équilibre économique. Par contre, si la France décide, comme beaucoup d'autres Pays l'ont déjà décidé, de faire converger toutes les technologies (Télévision, Internet et Téléphone) sur l'optique, les investissements exigés seront alors viables, du moins dans les zones où les populations sont suffisamment denses. Mais, en raison de sa géographie singulière (notre pays est géographiquement le plus grand d'Europe) les Pouvoirs Publics français doivent très rapidement admettre que l'équipement de l'ensemble de notre Pays ne sera possible qu'au travers d'une profonde synergie entre la volonté politique et l'initiative privée. Comme cela s'est fait depuis bientôt deux siècles dans notre Pays pour la construction de tous les réseaux, qu'ils soient ferrés, électriques, d'eau potable, téléphoniques ou même autoroutiers, des financements publics devront venir étayer les financements privés si nous voulons que toutes les régions de France, même les plus isolées soient desservies. Or, quand on sait que l'accès au très haut débit sera aussi nécessaire, dans 15 ans, à chacun de nos concitoyens, que ne l'est aujourd'hui l'électricité, nous prenons bien conscience que nous n'avons plus le droit de prendre du retard. Mais, plus encore, je suis convaincu que l'usage du haut débit par l'ensemble des Français passera, essentiellement, par le développement des usages publics. Ainsi, dans les domaines de l'éducation, mais aussi de la Santé, des Secours et du secteur social, les usages des hauts débits vont vite devenir incontournables sous l'impulsion de l'Etat et des Collectivités Locales. Prenons un exemple : dans le domaine social, le fait marquant de ces prochaines décennies, sera celui du vieillissement de nos populations. Statistiquement, la vie de chacun d'entre nous devrait s'allonger de trois mois chaque année. Nous gagnons ainsi une année d'espérance de vie tous les 4 ans. Ce problème de l'allongement de la vie va devenir, bien au-delà du problème du chômage qui, mécaniquement va s'estomper, le premier problème que devront affronter nos gouvernants de demain. Or, je suis convaincu que très rapidement les hauts débits seront appelés à la rescousse pour améliorer la situation. Ainsi, des liaisons permanentes haut-débits, mises gratuitement à disposition entre vieux parents et enfants ou entre frères et soeurs âgés permettront de retarder les entrées dans les établissements spécialisés, en facilitant, par vidéotransmission, la disparition du triste isolement des personnes seules. Je pourrais vous citer ainsi des dizaines et des dizaines d'usages publics de ces nouvelles technologies qui, très rapidement (il suffira de quelques années), inciteront les Français à adhérer massivement, enfin, à ce Monde Internet. Cette découverte d'une technologie nouvelle par un usage public gratuit favorisera ensuite dans la foulée, une large adhésion aux offres commerciales. Nous avons déjà suivi cette voie, avec succès, il y a deux décennies avec le Minitel. Pourquoi, diable, prenons-nous tant de retard pour appliquer cette démarche gagnante, au Monde Internet ? Voilà le message d'espérance que je voulais vous transmettre en cette semaine de la fête de l'Internet. Loin de la tristesse ambiante portée par certains hommes qui appartiennent déjà au passé, je voulais vous dire que ces nouvelles technologies vont profondément changer la vie de chacun d'entre nous en y apportant surtout une nécessaire espérance.

René TREGOUET

Post-Scriptum : Vous qui avez été des centaines et des centaines à m'envoyer des courriels, souvent de soutien, parfois de « franche engueulade », mais tous sympathiques, suite à mon éditorial, la semaine dernière, dans @RT Flash et dans @Acropolitis, demandant que les Etats-Unis et la France fassent un pas l'un vers l'autre, je vous remercie avec une grande sincérité. Ces messages m'ont été très précieux mais, malheureusement, en définitive, notre action aura été inutile, comme le montrent les évènements de ces dernières heures. C'est dommage car les plaies auraient été moins profondes et les cicatrices moins longues à effacer. Enfin, je fais confiance à nos deux Peuples. Les lecteurs d'@RT Flash qui voudraient encore réfléchir, avec moi, sur la situation internationale après la déclaration de guerre à l'Irak par les Etats-Unis, peuvent le faire en allant lire mon édito d'@Acropolitis

René TRÉGOUËT

Sénateur du Rhône

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