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Le vice caché du prion de levure

Plus de vingt ans après les travaux de l'Américain Stanley Prusiner qui imagina le prion, le voile s'entrouvre sur les secrets de cette particule infectieuse du troisième type. Du mode de fonctionnement de la protéine prion, on ignore tout, ou presque. On sait un fait majeur: cette même protéine prion existe sous deux versions, l'une inoffensive, l'autre redoutable pour les tissus nerveux, provoquant alors des encéphalopathies spongiformes: variante de la maladie de Creutzfeldt-Jakob, vache folle, tremblante du mouton... Ce qui fait la différence, c'est leur «repliement», leur structure spatiale. Mais jusqu'ici, nul n'avait réussi à visualiser cette organisation spatiale dont la modification est cruciale. Des chercheurs français viennent de franchir le pas: ils ont découvert la structure tridimensionnelle du prion de la levure (1). On sait depuis plusieurs années que ce micro-organisme produit une protéine qui se comporte comme les prions de mammifères: elle existe sous deux versions, distinctes par leur repliement spatial. «Sous sa forme anormale, on a constaté que le prion de levure s'assemble en fibres, explique Ronald Melki, responsable de ce travail au CNRS. Comme le prion humain pathologique.» Ce prion anormal est en outre capable de contaminer une levure saine. Autant de propriétés qui explique que cette protéine prion de levure, inoffensive pour l'homme, devienne un modèle pour l'étude de la formation des prions. L'équipe française a réussi, par cristallographie aux rayons X, à «voir» la forme normale du prion de levure. En attendant de la comparer à celle de la forme pathogène, ils ont déjà remarqué une région intrigante. Le prion normal comporte une petite région flexible, capable de tourner de 25°. Rien de surprenant puisque les protéines oscillent en permanence entre plusieurs formes sans pour autant être pathogènes. Mais les chercheurs s'interrogent. Cette partie flexible ne pourrait-elle pas être impliquée dans le redoutable changement de forme du prion? Et provoquer le basculement de la molécule «dans une forme d'où elle ne peut plus revenir et qui la pousse à s'agréger et former des fibres»? Pour en avoir le coeur net, les chercheurs vont tenter de modifier le prion de levure en éliminant la portion flexible suspecte. Ils sauront alors si, une fois amputée, la molécule perd son étrange aptitude à prendre une forme anormale. Dans ce cas, ils disposeraient d'une sérieuse piste pour tenter d'expliquer les causes de ce changement de forme si ravageur.

Libération :

http://www.liberation.com/quotidien/semaine/20010118jeuze.html

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