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Un laser chinois repousse les limites de l'optique
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À première vue, leur expérience semble impossible. La cible : une simple étiquette placée à 1,36 km, soit plus de 14 terrains de foot. Une distance suffisante pour que même un très bon télescope n’y voit que flou. Une paire de jumelles ne distinguerait qu’une tache indistincte. Et pourtant, les chercheurs sont parvenus à reconstruire les lettres inscrites dessus – hautes de seulement 3 millimètres. Pour comparaison, un télescope classique ne pourrait identifier à cette distance que des détails d’au moins 42 millimètres. Autrement dit : cette technologie voit 14 fois plus précisément que l’optique classique.
Ce résultat n’est pas qu’un exploit technique. C’est une rupture de paradigme : elle dépasse la limite de diffraction, cette barrière physique qui restreint la résolution des systèmes optiques traditionnels, même les plus perfectionnés. Là où l’optique s’arrête, le laser entre en scène. Mais comment cette technologie fonctionne-t-elle exactement ? Tout repose sur un principe avancé appelé interférométrie d’intensité active. Plutôt que d’essayer de “voir” directement un objet en captant sa lumière comme le fait un télescope, ce système éclaire la cible avec huit faisceaux laser infrarouges. Ces lasers illuminent la surface, comme un scanner invisible. Ensuite, deux télescopes situés à distance capent la lumière renvoyée – non pas sous forme d’image, mais comme une signature lumineuse fluctuante.
Ce que les capteurs enregistrent n’est donc pas une photo, mais une variation complexe d’intensité lumineuse, comme un code. C’est là que l’algorithme de reconstruction entre en jeu. À partir de ces signaux bruts, le système parvient à reconstruire une image nette de l’objet, révélant des détails invisibles à l’œil nu à cette distance. En plus de repousser les limites physiques de l’optique, cette méthode présente un autre avantage de taille : elle est beaucoup moins sensible aux perturbations atmosphériques. Les turbulences de l’air, la chaleur, la poussière ou les micro-gouttelettes d’humidité peuvent facilement dégrader l’image obtenue par un appareil photo ou un télescope. Mais ici, comme l’image est reconstruite à partir de données dynamiques et corrélées, les distorsions sont en grande partie filtrées. C’est comme si l’on observait à travers l’atmosphère avec des "lunettes correctrices numériques".
On pourrait croire que cette technologie servira uniquement à des missions de surveillance ou de renseignement. Certes, ses applications militaires sont évidentes — observer une cible à distance, lire une plaque, ou surveiller un site stratégique sans drone ni caméra embarquée. Mais les chercheurs ont bien plus en tête. Dans l’archéologie, par exemple, ce système pourrait permettre de lire des inscriptions gravées à flanc de falaise sans risquer la vie des chercheurs. En écologie, il pourrait surveiller des nids d’animaux menacés, sans s’approcher ni les perturber. En industrie, il pourrait inspecter des structures à distance — sur une ligne à haute tension, un pont inaccessible, ou une installation chimique dangereuse.
Bien sûr, tout cela est encore en phase expérimentale. Le système actuel est encombrant, dépend d’un alignement parfait entre lasers et capteurs, et ne fonctionne bien que dans des conditions optimales : pas de brouillard, pas d’obstacles, et une bonne capacité de réflexion lumineuse de la cible. Mais les chercheurs sont déjà à pied d’œuvre pour miniaturiser le système, le rendre plus robuste, et surtout, y intégrer l’intelligence artificielle pour qu’il s’adapte automatiquement aux conditions d’observation et améliore encore la reconstruction des images. Leur but ? Créer une version portable, qui tiendrait dans une valise et fonctionnerait de manière autonome. Une sorte de "super œil numérique" que l’on pourrait emmener partout. Si la miniaturisation suit, si l’IA tient ses promesses, alors cette technologie pourrait changer notre rapport à la vision — tout comme le microscope l’a fait il y a 400 ans, ou la caméra infrarouge il y a 50 ans.
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