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Le goût se construit dès la petite enfance, sa mémoire perdure toute la vie
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La madeleine de Proust, ces quelques miettes qui faisaient "tressaillir" l'écrivain devenu adulte lorsqu'elles touchaient son palais lui rappelant les petits gâteaux que lui offraient sa tante Léonie, est restée en toile de fond de ces débats de l'Institut national de la recherche agronomique sur le goût, l'éducation au goût. Aimer ou ne pas aimer un aliment, "est largement déterminé par notre mémoire" et est "rarement présent dès la naissance", a ainsi expliqué Leri Morin, auteur d'une recherche pour l'Inra. Le dégoût pour les huîtres peut être par exemple lié à un mauvais souvenir après la consommation d'un de ces fruits de mer.
Ses recherches ont montré que les consommateurs avaient une bonne mémoire pour la saveur, moins bonne quand il s'agissait des arômes et encore moins bonne pour la consistance.
Ses travaux ont également montré que certains avaient une bonne et d'autres une mauvaise mémoire, mais sans pouvoir l'expliquer puisque les études n'ont pas mis en évidence de différence homme/femme, ni de différence en fonction de l'âge.
S'il n'est pas inné, le goût se construit très tôt. Des recherches antérieures avaient déjà démontré que in utero la variété de l'alimentation de la mère peut être perçue par le foetus via le liquide amniotique. Et des recherches récentes de l'Inra ont cette fois montré, selon Sylvie Issanchou, directrice de recherche, qu'un enfant allaité pendant au moins un mois acceptait plus facilement les nouveaux aliments lors des premières semaines de la diversification alimentaire (à partir de l'âge de 6 mois) qu'un enfant nourri au lait en poudre. Tout simplement parce que la mère ayant une alimentation diversifiée, "son lait peut avoir un goût différent d'un jour à l'autre et même d'une tétée à l'autre", et le nourrisson est habitué à changer de goût.
Dans cette période clé, à partir du 6e mois, "la variété des aliments proposés les premiers jours entraîne par la suite une plus grande acceptation des aliments nouveaux" et les aliments proposés sont "peu fréquemment rejetés". Or "les préférences observées à 2-3 ans se prolongent en partie à l'âge adulte", souligne la chercheuse.
Autre recherche sur le goût, celle qui porte sur l'éducation au goût d'enfants de 8-10 ans. Dirigées par Pascal Schlich de l'Inra-Dijon, des recherches montrent que l'éducation sensorielle permet d'une part de mieux définir les goûts. "On passe de réactions subjectives par rapport à un aliment ("bon" ou "pas bon") à des réactions objectives ("sucré", "salé", "croustillant", "dur")". Les enfants sont plus tentés par goûter des choses nouvelles, et surtout spontanément, ils choisissent "des aliments plus complexes", "une salade de carottes et choux râpés avec raisins de Corinthe plutôt que des carottes râpées vinaigrette".
Mais cette "éducation semble s'émousser" en quelques mois, souligne aussi le chercheur qui insiste sur la notion de plaisir qu'il faut mettre en avant pour stimuler ces catégories d'âge, avant la période de l'adolescence. Plutôt que de leur asséner que "manger 5 fruits et légumes par jour c'est bon pour la santé, il faut leur apprendre à aimer les fruits et les légumes, et le plus tôt possible", a-t-il conclu.
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- Publié dans : Neurosciences & Sciences cognitives
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