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Cancer : la tristratégie

Une explosion des connaissances.» Telle est la situation de la recherche en cancérologie, selon Michel Marty, le coordinateur scientifique de la 13e édition du congrès Eurocancer, qui s'est achevée le 8 juin. De fait, plus de 600 molécules sont en cours d'essais cliniques à travers le monde; les médicaments déjà sur le marché sont, eux, utilisés de façon de plus en plus fine, quasi individualisée - au point que la prochaine étape consistera à «passer du prêt-à-porter à la haute couture», pour reprendre la formule de Marc Espié, de l'hôpital Saint-Louis, à Paris. Actuellement, explique Michel Marty, de l'Institut Gustave-Roussy de Villejuif (Val-de-Marne), trois stratégies de lutte contre le cancer coexistent, qui toutes sont prometteuses.Première piste: les cytotoxiques, une famille de molécules qui vise à tuer les cellules malades. Chaque année, de nouvelles substances actives sont découvertes, extraites de plantes tantôt communes (l'if, par exemple), tantôt rares, mais qui, toutes, existent à l'état naturel. Or moins du quart du patrimoine végétal et maritime mondial est répertorié. «Cette orientation est donc très loin d'avoir vécu», rappelle Michel Marty. Ainsi, deux futurs médicaments, actuellement en phase d'expérimentation, sont issus d'éponges découvertes dans les eaux tropicales. Deuxième voie de recherche: les molécules qui vont non pas tuer une cellule cancéreuse, mais modifier son comportement. Il s'agit là d'asphyxier la tumeur ou de l'empêcher de se développer en bloquant ses mécanismes de division cellulaire. Le dernier exemple en date concerne le traitement d'une forme particulière de leucémie, avec les antityrosines kinases. Celles-ci empêchent l'activité d'une protéine qui stimule en permanence la croissance des cellules souches, aboutissant à la leucémie. Expérimentés d'abord aux Etats-Unis, en France depuis un an, ces médicaments à prendre par voie orale ont permis d'obtenir une normalisation complète de la leucémie dans 80 % des cas. Sur le plan conceptuel, c'est très important. On peut même parler du miracle thérapeutique de l'année», s'enthousiasme le Pr Michel Boiron, président du congrès Eurocancer. La mise au point de ces traitements reste néanmoins très délicate; elle nécessite des prélèvements réguliers et des études conduites sur une durée assez longue. Et, dans ce domaine, l'Europe accumule les retards: «98% de ces molécules sont d'origine américaine», déplore le Pr Marty. Troisième orientation, tout aussi séduisante: modifier les réactions du patient à l'égard de la tumeur. On peut ainsi atténuer la toxicité d'un médicament, rendre l'organisme plus résistant, tenter même une forme de vaccination antitumorale, comme l'expérimente en ce moment l'Institut Gustave-Roussy - l'idéal étant, à terme, de combiner différents traitements pour obtenir une efficacité maximale. L'herceptine est, par exemple, active dans 20 % des cancers du sein. Cependant, dans certains cas, elle va avoir l'effet inverse. Pourquoi? On ne le sait pas encore très bien. Mais, demain, on pourra «prédire les associations de médicaments qui seront les plus actives», commente Michel Marty. La haute couture n'est décidément plus très loin.

L'Express :

http://www.lexpress.fr/Express/Info/Sciences/Dossier/cancer/dossier

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