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De nouveaux radioéléments ciblés pour détruire les métastases
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Depuis deux ans, le réacteur grenoblois, normalement dédié à la production de neutrons pour l'étude de la matière, sert à un usage qui n'avait pas été prévu lors de sa construction à la fin des années 1960 : la production d'atomes radioactifs exotiques utilisés pour de nouveaux traitements ciblés contre des cancers.
La petite poudre blanche est un produit très rare, de l'ytterbium, qui, soumis au flux de neutrons intense du réacteur peut se transmuter en un autre élément, cette fois radioactif, le lutétium 177. Il est utilisé dans des traitements plus efficaces que les chimiothérapies contre des formes de cancers présentant des petites métastases dispersées. Au lieu d'irradier toute une région du corps pour éliminer une tumeur comme le fait la radiothérapie habituelle, la nouvelle méthode qui utilise le lutétium 177 est bien plus ciblée.
L'idée étant de ne s'attaquer qu'aux seules cellules cancéreuses, pour éviter au maximum d'irradier les autres organes indemnes. Une sélectivité permise par la biotechnologie, et la production d'anticorps spécifiquement développés pour ne se fixer qu'aux antigènes des cellules tumorales. «On sait maintenant accrocher un unique élément radioactif au bout d'un anticorps, précise Ulli Köster. Ce dernier sert en fait de vecteur, et va apporter l'isotope au plus près de la tumeur, là où la radioactivité sera la plus efficace pour tuer les cellules cancéreuses.»
Les premiers traitements de ce type, qui ont montré leur efficacité contre les lymphomes, et sont d'ailleurs commercialisés aux États-Unis, utilisaient un élément radioactif assez courant en médecine, de l'iode 131. «Or ce type d'isotope présente le grand inconvénient d'émettre des rayons gamma, qui sont très pénétrants et obligent à mettre les patients en isolation dans des chambres blindées», explique Jean-François Chatal, professeur émérite de médecine nucléaire, pionnier de la radioimmunothérapie en France qui travaille désormais à temps plein au nouveau cyclotron médical Arronax à Nantes. C'est notamment pour éviter ce genre d'inconvénient que des sites de recherche comme l'ILL de Grenoble et le cyclotron de Nantes produisent des nouveaux isotopes ayant des caractéristiques plus ciblées.
Par exemple, le lutétium 177 généré dans le cœur du réacteur grenoblois et utilisé pour des traitements expérimentaux contre le cancer de la prostate par Jean-François Chatal, présente l'avantage de n'émettre que des rayonnements bêta. Ces «bêta» sont des électrons qui n'agissent que sur une distance très courte de l'ordre de 2 à 3 millimètres, soit grosso modo la taille des petites métastases contre lesquelles ces traitements sont les plus efficaces. Des essais cliniques très prometteurs sont d'ailleurs menés avec cet élément contre des cancers de la prostate dans des phases avancées pour lesquels tous les autres traitements s'avèrent inefficaces.
Le réacteur grenoblois produit également du terbium 161, qui a les mêmes propriétés que le lutétium 177, mais émet en plus des électrons dits d'Auger. Ces derniers sont encore moins énergétiques, et ont un rayon d'action encore plus ciblé, équivalent à la taille d'une seule cellule biologique.
La production de ces éléments se fait pour le moment de manière presque artisanale à l'ILL, mais une installation dédiée et automatisée est à l'étude. «L'investissement serait de l'ordre de quelques millions d'euros, mais pourrait produire assez d'isotopes pour tous les patients concernés en Europe par ce type de traitement» , assure Ulli Köster.
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