RTFlash

Vivant

Des lymphocytes modifiés pour réparer le cœur

Après s’être attaquée au cancer, l’immunothérapie élargit son champ d’action et vise aussi les maladies cardiovasculaires, notamment l’insuffisance cardiaque. Dans cette maladie, l’activation incontrôlée ou le développement excessif de cellules de soutien, les fibroblastes, à l’origine du processus de fibrose, provoque une asphyxie des cellules contractiles, ce qui perturbe le fonctionnement du muscle cardiaque. Les approches thérapeutiques existantes ne montrent qu’un effet modeste et n’offrent pas la possibilité de réduire une fibrose déjà installée. L’immunothérapie présente une piste prometteuse. Jonathan Epstein, de l’Université de Pennsylvanie, et ses collègues, viennent de prouver qu’une telle approche peut être optimisée pour restaurer la fonction cardiaque chez des rongeurs présentant une insuffisance cardiaque, tout en limitant les possibles effets secondaires d’un tel traitement.

En 2019, la même équipe avait mis au point une approche de thérapie génique pour manipuler le système immunitaire, en l’occurrence des lymphocytes T modifiés définitivement ex vivo et ensuite réinjectés, qui allaient détruire la fibrose. Cependant, ceci n’était pas sans risque. La nouvelle approche choisie est celle des CAR-T, des lymphocytes T modifiés, plus efficaces que leurs homologues naturels pour éliminer des cellules délétères. Ces CAR-T sont déjà utilisés en clinique pour soigner des cancers du sang avancés, leucémies ou lymphomes. Une manipulation génétique vise à leur faire exprimer un récepteur chimérique (CAR, pour chimeric antigen receptor), qui leur permet à la fois de détecter un antigène donné et d’activer le lymphocyte T afin qu’il déclenche l’élimination de la cellule ciblée. Ici l’antigène visé est une protéine exprimée spécifiquement à la surface des fibroblastes à l’origine de la fibrose cardiaque, la protéine FAP (fibroblast activated protein).

Dans une première approche, les chercheurs avaient donc manipulé génétiquement ex vivo les lymphocytes T de souris chez qui une insuffisance cardiaque avait été induite, pour en faire des CAR-T, et les avaient ensuite réinjectés dans les animaux. Ils avaient alors constaté une destruction ciblée des fibroblastes formant la fibrose. Cependant, l’approche était risquée et non transposable en l’état chez l’humain, car les fibroblastes jouent un rôle physiologique pour réparer le myocarde après un accident cardiaque comme un infarctus. Les détruire de façon permanente n’est donc pas possible.

Rebondissant sur les énormes progrès réalisés dans le domaine des thérapies à base d’ARN, avec le développement de vaccins à ARN contre le SARS-CoV-2, l’équipe de Jonathan Epstein a misé sur le développement d’un ARN messager, porteur de l’information génétique permettant l’expression de la protéine chimérique CAR dirigée contre la protéine FAP. Celui-ci est délivré par voie intraveineuse, dans une nanoparticule lipidique, elle-même modifiée pour cibler précisément les lymphocytes T et non d’autres cellules de l’organisme.

Comme l’ARN messager ne pénètre pas dans le noyau des cellules, qu’il est incapable d’intégration génomique, mais aussi qu’il est intrinsèquement instable et dilué lors des divisions cellulaires, la modification des lymphocytes T est par définition transitoire. Réalisée chez des souris, la stratégie montre qu’une proportion suffisante de lymphocytes T sont modifiés, expriment le CAR contre FAP et sont fonctionnels. Ils ne sont présents que pendant sept jours après l’injection. Les souris traitées retrouvent une fonction cardiaque normale, même si une fibrose résiduelle reste présente dans certaines zones entourant les vaisseaux sanguins.

Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash

Penn Medicine

Noter cet article :

 

Vous serez certainement intéressé par ces articles :

Recommander cet article :

back-to-top