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Edito : L'évolution démographique de la France va bouleverser notre société

Dans sa dernière étude (http://www.insee.fr/fr/ffc/Liste_theme.asp?theme_id=2&first_doc=1) intitulée ''Projections de population à l'horizon 2050", l'INSEE éclaire d'une lumière saisissante l'évolution démographique de notre pays au cours du prochain demi-siècle. La France devrait compter 64 millions d'habitants en 2050, soit cinq millions de plus qu'en 2000. Et si les tendances démographiques actuelles se maintiennent, cette augmentation se traduira par un vieillissement considérable de la population. Dans un demi-siècle, 35 % de la population totale (plus de une personne sur trois !) sera âgée de plus de soixante ans, contre 20 % aujourd'hui. Ce sont 22,4 millions de Français qui auront dépassé la soixantaine, soit 85% de plus qu'en 2000. Les moins de vingt ans, dans le même temps, passeront de 15 millions en 2000 à 12,8 millions en 2050. Eux qui représentent aujourd'hui un quart de la population ne compteront plus que pour 20 % (seulement une personne sur cinq !). Dès 2011, les moins de 20 ans seront dépassés en nombre par les plus de 60 ans et d'ici 2050 le nombre de personnes âgées de plus de 75 ans sera multiplié par 3. L'INSEE précise que le nombre d'habitants augmentera jusqu'en 2040, pour atteindre un maximum de 64,5 millions de personnes. Ensuite, la population diminuera, le solde migratoire ne suffisant plus à compenser l'excédent des décès sur les naissances. L'INSEE rappelle qu'au cours des cinquante dernières années, le nombre d'habitants de la France métropolitaine est passé de 41,6 millions à 58,7 millions. Cette croissance a été particulièrement rapide (plus 1 % en moyenne annuelle) entre 1950 et 1975 à cause du baby-boom et d'un apport migratoire important. Elle s'est en revanche ralentie dans les quinze années suivantes (plus 0,5 %). Selon des projections d'Eurostat, l'Union européenne comptera 368 millions d'habitants en 2050. La population française représentera alors 16,9 % de la population européenne contre 15,7 % en 2000. Ces chiffres sont essentiellement liés au bon niveau de fécondité de la France, qui lui assure un accroissement naturel parmi les plus élevés au sein de l'Union européenne. Mais la population continuera de vieillir en France métropolitaine dans les années à venir, souligne l'INSEE. En se basant sur les résultats du recensement de 1999, l'INSEE a réalisé de nouvelles projections concernant la population pour le prochain demi-siècle. Celles-ci prévoient notamment une augmentation importante du nombre de décès entre 2025 et 2040 (de 600.000 à 700.000 par an), conséquence du vieillissement des générations nombreuses du baby-boom. En 2036, le nombre de naissances deviendra inférieur au nombre annuel de décès. En 2040, le solde migratoire, égal à 50.000 personnes par an et constant sur toute la période de projection, ne suffira plus à compenser le solde naturel, devenu négatif quelques années plus tôt, et la population commencera donc à diminuer. L'INSEE remarque enfin que le nombre de personnes en âge de travailler augmentera encore pendant quelques années. Ainsi, l'effectif des personnes âgées de 20 à 59 ans augmentera jusqu'en 2006 et celui des 20 à 64 ans jusqu'en 2011, avant qu'intervienne une diminution du nombre de personnes en âge de travailler. Même dans le cas de figure d'une retraite à 65 ans, le rapport "personnes âgées/population en âge de travailler" doublera en cinquante ans, passant de 274 pour 1000 à 575 pour 1000. Ces projections de l'INSEE se fondent sur une poursuite linéaire des gains d'espérance de vie. Selon l'Institut, en 2035, l'espérance de vie à la naissance s'élèvera à 82 ans pour les hommes, et à 89 ans pour les femmes (contre respectivement 75 ans et 83 ans aujourd'hui). Ainsi en seulement 2 générations, et de manière quasi-inéluctable car les tendances démographiques sont lourdes et ne s'infléchissent pas en quelques années, notre pays va être confronté, du fait du vieillissement de sa population, à la plus importante mutation socio-économique de son histoire. Les services à la personne, qu'il s'agisse des soins mais aussi des loisirs et de la culture, vont devenir le moteur de notre économie. Mais cette évolution démographique va aussi avoir des conséquences considérables sur notre système de protection sociale et de retraite car dès 2011, le nombre des actifs de 20 à 65 ans va sensiblement diminuer et les moins de 20 ans seront dépassés en nombre par les plus de 60 ans. Face à de telles perspectives, il ne serait ni raisonnable, ni honnête intellectuellement, d'affirmer que l'on va pouvoir maintenir l'âge de la retraite pour tous à 60 ans tout en préservant le niveau actuel des pensions de retraites et des cotisations vieillesse. Il ne serait pas non plus sérieux de croire que l'on pourra dans 20 ans assurer à tous des soins de qualité, s'appuyant sur une médecine très technologique et coûteuse, sans réformer radicalement notre système de santé et son financement. Dans ces deux domaines essentiels, le réveil de nos concitoyens serait d'autant plus douloureux que l'on aurait tardé à leur tenir un langage de vérité. Il faut sans tarder ouvrir un grand débat national et présenter l'ensemble cohérent des mesures courageuses et difficiles qui s'imposent. Enfin, il faut rappeler que même si les tendances démographiques sont lourdes et ne peuvent être infléchies rapidement, il n'y a pas de fatalité et que l'avenir n'est jamais écrit d'avance. L'exemple suédois montre qu'il est possible sur une génération, grâce à une politique sociale et familiale intelligente et volontaire, de faire remonter durablement le taux de natalité. Il faut donc tout mettre en oeuvre pour que ces tendances démographiques annoncées puissent être, à long terme, infléchies et peut-être un jour inversées. Cela aussi suppose des choix politiques et sociaux forts et clairs. Dans ces domaines, nous devons savoir que la société dans laquelle vivront nos enfants en 2050 dépend largement des choix décisifs que nous ferons au cours de ces prochaines années. N'oublions jamais que près de la moitié des enfants qui naissent aujourd'hui verront l'aube du XXIIème siècle et que nous avons le devoir de penser le monde dans lequel ils vivront pour que ce monde soit supportable et reste humain et solidaire.

René TRÉGOUËT

Sénateur du Rhône

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