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Des moteurs moléculaires pour produire des matériaux amorphes qui s’auto-organisent

Dans les cellules vivantes, il existe des moteurs biologiques, véritables machines moléculaires, qui participent à l’organisation de réseaux polymères complexes. Les scientifiques ont réussi à mimer ce phénomène à l’aide de simples moteurs rotatifs moléculaires artificiels capables de se regrouper à l’interface air-eau. Une fois comprimés, ces moteurs forment un film moléculaire non structuré. Et c’est sous l’effet de la lumière que la magie opère : les moteurs se mettent en mouvement et déclenchent une organisation spontanée de la matière.

Ce changement s’explique par un processus actif de polymérisation supramoléculaire : les moteurs, en tournant, sortent le matériau d’un état désordonné, dit « piégé cinétiquement », pour l’amener vers une organisation hautement structurée. « C’est un peu comme si un moteur de voiture, via sa rotation, entraînait toute une chaîne de transformations moléculaires », explique Nicolas Giuseppone. Résultat : des fibres longues et parfaitement organisées à l’échelle du nanomètre se forment spontanément, alors qu’aucune propriété particulière n’était observable au départ.

Autre atout de ces systèmes : leur capacité d’auto-réparation. Si le matériau est endommagé, il redevient amorphe. Mais sous l’effet d’une nouvelle impulsion lumineuse, il peut se réorganiser à l’identique, comme s’il “se souvenait” de sa forme. Les chercheurs ont utilisé la microscopie à force atomique, un outil capable de lire les surfaces au nanomètre près, comme une tête de lecture sur un vinyle. Cette technique a permis de visualiser en direct les différentes étapes du processus : du matériau amorphe aux premières fibrilles jusqu’à la formation finale de motifs parfaitement organisés. 

L’observation de ce comportement ouvre des pistes enthousiasmantes : créer des matériaux conducteurs à base de fibres organisées pour la construction de nanocircuits électroniques, concevoir des surfaces dynamiques nanostructurées, pilotées par la lumière, ou encore modifier à volonté les propriétés mécaniques des matériaux (souplesse, dureté…) en jouant sur leur organisation moléculaire. Avec la perspective d’une matière active capable de s’auto-organiser, de s’auto-réparer mais aussi d’évoluer, en réponse à une modification de son environnement, cette découverte amorce une révolution dans la conception de matériaux motorisés innovants.

CNRS : https://www.cnrs.fr/sites/default/files/press_info/2025-05/CP_NGiuseppone_NatureNano.pdf

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