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L’alphabet génétique s’agrandit !

L'équipe de Floyd E. Romesberg du Scripps Research Institute (Californie) a réussi à élaborer deux nouvelles bases, baptisées X et Y, mais surtout à assurer leur maintien lors de la réplication de l’ADN in vivo. Le but : créer des organismes semi-synthétiques, avec une information génétique enrichie (3 paires de bases au lieu de 2), afin de les doter de fonctions inédites.

Pour arriver à ce résultat, l’équipe a d’abord dû choisir les bases X et Y parmi un certain nombre de candidats. Les deux bases devaient être parfaitement complémentaires, comme le sont A et T d’une part, et G et C d’autre part, afin que la réplication puisse se faire sans aucun souci.

Pendant 15 ans, les chercheurs ont fabriqué 60 candidats, donc 3 600 paires possibles et ont réussi à en sélectionner une, puis à l’optimiser. Les deux bases sélectionnées ont été les composés NaM et TPT3. Une fois ces deux bases identifiées, le principal défi consistait à assurer leur réplication une fois insérée dans un organisme – en l’occurrence, la bactérie E. coli. Un plasmide, c’est-à-dire une molécule d’ADN circulaire fabriqué in vitro, contenant une paire de bases X et Y, a été importé dans la bactérie.

Dans un second temps, des bases X et Y libres ont été ajoutées dans le milieu de culture et le génome de la bactérie a été modifié pour produire une protéine permettant le passage de ces bases libres vers l’intérieur de la bactérie. Une fois à l’intérieur, elles ont été prises en charge par les enzymes qui assurent normalement la réplication de l’ADN d’E. coli et qui placent, en face de chaque base azotée, sa base complémentaire.

Chaque brin du plasmide a ainsi été efficacement copié, la séquence AGCXT devenant TCGYA. Mais la réplication de X et de Y n’était pas parfaite, explique Thomas Lavergne, chercheur CNRS au département de chimie moléculaire de l’Université Grenoble-Alpes, qui fait partie de l’équipe. C'est à ce stade qu'est intervenu le nouvel outil révolutionnaire appelé CRISPR-Cas9.

Cette enzyme permet en effet de couper l’ADN à un endroit souhaité. L’équipe de Floyd E. Romesberg a utilisé ce dispositif pour couper les morceaux d’ADN qui avaient muté. Pour Philippe Marlière, "l’utilisation de CRISPR-Cas9, en plus d’être une technique très élégante, a aussi été très efficace. Cela a considérablement amélioré la rétention de la paire de nucléotides X et Y."

Fort de ce résultat encourageant, l’équipe a ensuite testé cette technique de réplication de l’ADN modifiée d’E. Coli dans des conditions plus difficiles et dans différents milieux, liquides ou solides. Les résultats sont restés très satisfaisants. Au fil des réplications, la perte d’information par suppression de bases azotées ou par mutation a été négligeable et la croissance des bactéries n’a été ralentie que de 10 %, un chiffre remarquable.

Les chercheurs ne veulent pas s’arrêter là. La réplication ADN-ADN avec ces deux nouvelles bases n’est qu’une première étape. La prochaine, c’est le passage de l’ADN à l’ARN afin par la suite de produire des protéines qui seraient constituées d’aminoacides modifiés par l’homme. Il serait ainsi possible de fabriquer des protéines thérapeutiques totalement nouvelles.

Les chercheurs se veulent rassurants quant à cette nouvelle technique et soulignent qu’en l’absence des bases X et Y dans le milieu de culture, l’ADN semi-synthétique contenant par exemple ATGXC était rapidement converti en ADN naturel ATGAC. Ces bases X et Y étant exclusivement synthétiques et absentes de notre environnement, la propagation de ces organismes hors des frontières du laboratoire est donc impossible.

Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash

Science Daily

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