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Le ralentissement de courants dans l'Atlantique nord pourrait préfigurer un changement climatique majeur

L'océan et l'atmosphère participent tous deux à la régulation thermique de la planète par l'intermédiaire d'un processus thermodynamique qui sert à évacuer la chaleur équatoriale. Les courants océaniques transfèrent ces eaux surchauffées de l'équateur vers les pôles dans les océans du globe. Puis, ayant perdu leurs calories lors de ce périple, ils redescendent vers les régions intertropicales. Ce circuit complet de tous les courants mondiaux, en surface et en profondeur, appelé circulation thermohaline, s'effectue en quelque mille ans. Dans l'Atlantique nord, le Gulf Stream, qui longe la côte ouest de l'Amérique du Nord, transporte les eaux chaudes d'origine tropicale vers le nord de l'océan. A mi-chemin, il laisse place à la dérive nord-atlantique, qui file vers le nord-est de l'Atlantique et l'Europe, ce qui explique les conditions climatiques clémentes de nos côtes. Au large de la Norvège, du Groënland et du Labrador, ces eaux se refroidissent. Et c'est parce qu'elles deviennent alors plus denses et plus salées qu'elles plongent profondément. Ce sont en moyenne 17 millions de m3/s qui partent ainsi vers les abysses. Ce processus est capital pour le climat de la planète, "car les eaux profondes d'influence mondiale sont formées dans ces régions, et ce sont elles qui constituent le moteur de la circulation thermohaline", explique Alain Colin de Verdière, professeur d'océanographie physique à l'université de Brest. Or une étude menée par deux océanographes, Sirpa Hãkkinen (NASA Goddard Space Flight Center) et Peter Rhines (université de Washington, Seattle) - et que Science publie en ligne à la date du 15 avril -, a mis en évidence un ralentissement de cette circulation au cours de la décennie 1990. En particulier dans un courant subpolaire de l'Atlantique nord, entre 50 et 65 degrés de latitude nord. Plus grave encore, dans cette région où existent "d'intenses interactions entre l'océan et l'atmosphère" et où les eaux froides plongent pour former le North Atlantic Deep Water, ce ralentissement se "prolonge" jusque vers 2 800 m de profondeur. Sirpa Hãkkinen et Peter Rhines ont détecté le ralentissement de ce courant marin subpolaire en passant en revue les données altimétriques fournies pendant les décennies 1980 et 1990 par le satellite franco-américain Topex-Poséidon, mais aussi les informations collectées par d'autres satellites (ERS-1 et 2, Seasat, Geosat) et celles fournies par des instruments de mesure des courants marins. Pour être sûrs de leur fait, ils ont éliminé diverses hypothèses, notamment celle relative à l'oscillation nord-atlantique. Ce phénomène, qui résulte d'une grande différence de pressions entre l'anticyclone des Açores et la dépression d'Islande, modifie en effet l'intensité et la direction des vents sur l'Europe du Nord et du Sud. Au final, les conclusions des deux chercheurs restent prudentes, faute de données antérieures à 1978. Il n'est pas encore possible, selon eux, de dire si "le ralentissement constaté dans les années 1990 est la manifestation d'une oscillation naturelle ou une tendance lourde"indiquant une modification du climat. "Cette étude, réalisée par des scientifiques connus pour leur sérieux, montre néanmoins que la circulation thermohaline s'affaiblit dans cette région. L'océan perd moins de chaleur et la convection océanique y est moins profonde", analyse Alain Colin de Verdière. "Une étude menée actuellement sur les données altimétriques au Laboratoire de physique des océans (unité mixte CNRS/Ifremer/université de Rennes) corrobore cette tendance", ajoute le chercheur. Si un tel affaiblissement de la circulation thermohaline était confirmé sur le long terme, cela pourrait signifier le début d'un changement climatique lié à l'effet de serre. En effet, "en ralentissant la transformation des eaux chaudes en eaux froides, on diminue la capacité de l'atmosphère et de l'océan à transférer la chaleur de l'équateur vers les pôles", rappelle Xavier Carton, responsable du Laboratoire de physique des océans. "Ce faisant, on diminue la régulation thermique de la planète. Comment réagira le système océan/atmosphère et le Gulf-Stream dans ce cas-là ? Personne ne le sait."Le problème est d'autant plus complexe que l'océan joue un rôle intense dans les transferts de chaleur aux basses latitudes, tandis que, aux hautes latitudes, ce rôle est plutôt tenu par l'atmosphère. Le Monde :

http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3238,36-362409,0.html

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