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Plus de onze mille espèces menacées

L'albatros est victime de la pêche à la palangre pratiquée dans les mers australes. La tortue-boîte d'Asie du Sud est trop prisée par la pharmacopée et la gastronomie chinoises. L'antilope du Tibet est chassée pour sa laine considérée comme l'une des fibres animales les plus raffinées au monde. Le territoire du lynx d'Espagne a été détruit par l'agriculture. L'escargot de Corse subsiste sur une minuscule parcelle coincée entre un parking et l'aéroport d'Ajaccio. Tous ces animaux sont inscrits sur la liste rouge publiée la semaine dernière par l'UICN. Ils ont un point commun: leur survie est directement menacée par l'agriculture, la déforestation, la chasse ou la pêche. C'est en Indonésie, en Inde, au Brésil et en Chine que les plus forts taux d'extinction sont relevés. La situation s'est aggravée par rapport à l'édition 1996. C'est ainsi par exemple que le nombre d'espèces gravement menacées est passé de 169 à 180 pour les mammifères, et de 168 à 182 pour les oiseaux. Au total, cette catégorie compte 925 animaux et 1 014 plantes. Environ 30 % des poissons (d'eau douce pour la plupart), 25 % des reptiles et 20 % des amphibiens sont classés dans les catégories menacées. Pour le règne végétal où les données sont plus fragmentaires, on relève que 16 % des conifères - le groupe le mieux connu - sont en danger. Globalement, 11 046 espèces de plantes et d'animaux sont confrontées à un sérieux risque d'extinction. Depuis 1800, on a recensé 103 disparitions d'espèces, soit un taux 50 fois supérieur au taux naturel. Les spécialistes de l'UICN estiment qu'il faudrait des moyens 10 à 100 fois supérieurs à ceux actuellement mis en oeuvre pour stopper le déclin de la diversité biologique. Une étude publiée en 1992 à l'occasion du sommet de Rio par le WCMC (World Conservation Monitoring Centre) avait montré que 75 % des espèces disparues étaient insulaires. En effet, ces milieux exigus ont évolué pendant de longues périodes sans prédateurs et l'introduction de nouvelles espèces est presque toujours synonyme de catastrophe pour la faune et la flore endémiques. «On s'imagine les îles du Pacifique sud comme des petits paradis terrestres. En fait, la plupart d'entre elles sont devenues des «mouroirs», souligne Philippe Boucher, spécialiste des mollusques au Muséum national d'histoire naturelle et seul membre français du comité de pilotage de la commission de sauvegarde des espèces à l'UICN. Dans les montagnes ou les lacs africains, la dynamique d'extinction est elle aussi insulaire. Même s'ils ne sont pas entourés d'eau, ils sont considérés comme des îlots par les chercheurs en écologie. Le morcellement, voire la destruction totale de l'habitat, l'impact des espèces envahissantes et le prélèvement excessif (chasse ou pêche) font partie des principales causes d'extinction d'espèces. A la pointe du continent européen, la France a une situation qui la met à l'abri d'extinctions radicales et massives. «Notre pays n'est pas une île, il partage une grande partie de sa faune et de sa flore avec ses voisins, relève Philippe Boucher. L'ours des Pyrénées est menacé mais l'ours brun ne l'est pas.» Autrement dit, il ne faut pas confondre extinction locale et extinction globale. Le deuxième congrès mondial de la conservation qui se tient jusqu'au 11 octobre, à Amman (Jordanie), devrait proposer de nouvelles recommandations afin d'enrayer ce processus. Pour Philippe Boucher, la protection de la diversité biologique de la planète ne sera sérieusement entreprise que si on sait lui donner une dimension culturelle. Il cite l'exemple de ce qui s'est passé avec l'escargot de Corse: à partir du moment où les responsables de l'environnement ont arrêté de la présenter comme une «espèce patrimoniale», selon le terme consacré, préférant la définir comme une «espèce identitaire», la survie de l'escargot a commencé à mobiliser plus de monde.

Le Figaro : http://www.lefigaro.fr

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