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La physique pour voir à l’intérieur des tumeurs

Une équipe de physiciens de l’Institut lumière matière (CNRS/Université Claude Bernard Lyon 1), en collaboration avec le Centre de recherche en cancérologie de Lyon (CNRS/Inserm/Université Claude Bernard Lyon 1/Centré Léon Bérard/Hospices civils de Lyon), a démontré le potentiel, pour la cancérologie, d’une technique d’imagerie uniquement basée sur les propriétés physiques des tumeurs. Elle permet de différencier des populations de cellules de malignités différentes et de suivre l’efficacité d’un traitement anticancer.

Malgré une compréhension fine de la biologie du cancer, 90 % des médicaments testés échouent lors des études cliniques. Par ailleurs, on soupçonne de plus en plus les propriétés mécaniques des tumeurs d’influencer la progression de la maladie, et sans doute l’efficacité des traitements.

S’il était possible d’évaluer l’élasticité des tumeurs de manière globale, la rigidité locale, en profondeur, et la résistance à la pénétration de liquides thérapeutiques au cœur de la tumeur restaient plus difficiles à mesurer. Afin de sonder ces propriétés physiques, les chercheurs ont utilisé une technique d’imagerie sans contact et ne nécessitant pas l’utilisation d’agents de contraste – donc ne perturbant pas le fonctionnement des tissus – qui tire parti des vibrations infimes naturelles de la matière.

Pour simuler le comportement de tumeurs colorectales in vitro, les chercheurs ont créé des organoïdes, des sphères de 0,3 mm de diamètre formées par l’agrégation de cellules tumorales. Sur ces objets, ils ont focalisé un faisceau laser rouge. Les infimes vibrations naturelles de la matière, générées par l’agitation thermique, modifient très légèrement la couleur du faisceau de lumière qui ressort de l’échantillon.

L’analyse de cette lumière permet alors de cartographier les propriétés mécaniques des tumeurs modèles : plus la zone balayée par le laser est rigide, plus les vibrations sont rapides et, de manière comparable à l’effet Doppler sonore (le mécanisme qui rend une sirène plus aigüe à mesure qu’elle se rapproche), plus le changement de couleur est important.

A partir d’organoïdes composés de deux lignées de cellules de malignités différentes, les chercheurs ont montré qu’ils pouvaient distinguer les deux types cellulaires par leurs propriétés mécaniques. Une telle information est cruciale car elle peut permettre de raffiner le diagnostic issu de l’analyse de biopsies, et offrir une meilleure appréciation du stade de la tumeur.

Cette technique leur a aussi permis de suivre les variations locales de propriétés mécaniques suite à un traitement médicamenteux : le centre de la tumeur reste rigide plus longtemps que le bord, démontrant un gradient d'efficacité du traitement. Ainsi, la mesure locale des propriétés mécaniques pourrait permettre de s’assurer de la destruction totale de la tumeur, et de choisir une dose et une durée de traitement les plus faibles possibles.

Cette approche permet donc d’explorer l’impact méconnu des propriétés mécaniques sur la réponse thérapeutique. Elle devrait déboucher sur des modèles de tumeurs in vitro plus prédictifs pour tester de nouvelles molécules thérapeutiques, mais aussi sur des thérapies combinées, agissant par exemple sur la rigidité des tissus afin d’accélérer la pénétration des principes actifs au centre de la tumeur. Par ailleurs, elle pourrait fournir de nouveaux indicateurs pour guider les cliniciens dans la personnalisation des thérapies.

Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash

CNRS

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