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Edito : Les nouvelles technologies vont transformer la vie des personnes âgées

En décembre 2005, la Maison-Blanche a accueilli une conférence entièrement consacrée à l'impact que vont avoir les nouvelles technologies de l'information sur la qualité de vie des personnes âgées. Cette conférence réunissait les principaux acteurs du secteur, constructeurs informatiques, industriels de l'électronique et associations. Il s'agit, selon le gouvernement américain, d'atteindre simultanément trois objectifs connexes : améliorer l'autonomie des personnes âgées, permettre au plus grand nombre d'accéder aux progrès de la médecine et, bien entendu, maîtriser le coût des dépenses liées à la santé et à la dépendance des personnes âgées. " Face au vieillissement accéléré de notre population, nous allons devoir changer radicalement la façon dont nous nous occupons de nos personnes âgées, faute de quoi nous serons confrontés avant 10 ans à une véritable crise société" a déclaré Eric Dishman, Président du CAST (Centre de recherche sur les technologies de l'âge) et directeur de recherche du département "santé" d'Intel.

"La société doit mettre en place de nouveaux liens et de nouvelles formes de médiation avec les personnes âgées et les progrès de la technologie doivent nous permettre d'atteindre ce but" a souligné Eric Dishman qui a ajouté "La technologie, si elle est employée judicieusement, peut améliorer de manière décisive la qualité de vie des personnes âgées en leur permettant notamment de rester chez elles le plus longtemps possible dans des conditions de sécurité et de dignité acceptables". Pour Russell Bodoff, directeur exécutif du CAST, il y a quatre domaines principaux dans lesquels la technologie va transformer la vie des personnes âgées : la téléprévention médicale, la télédétection d'événements pouvant être dangereux pour la personne âgée, l'amélioration de l'efficacité des professionnels de santé et le maintien de l'autonomie de la personne âgée. Le CAST propose une remarquable vidéo, intitulée, Imaginez le futur des seniors, qui imagine la vie quotidienne d'un retraité américain de 87 ans, qui vit seul dans sa maison et montre comment la technologie peut se fondre intelligemment dans l'environnement de la personne âgée et modifier complètement ses relations avec sa famille et ses proches.

Le CAST réunit de nombreux industriels et organismes de recherche, parmi lesquels la Carnegie Mellon University de Pittsburgh, l'institut de technologie de Géorgie, l'université de l'Orégon, Accenture, Adherence Technologies, American HealthTech, Eaton, Front Porch/Dakim, Inc., GrandCare Systems, Health Hero Network, Health Watch/Tunstall, HealthMEDX, Inc., HomeFree Systems, Honeywell, IBM Corporation, Intel Corporation, Medtronic, Meridian Health, et Philips Medical Systems, pour ne citer que les plus importants. L'objectif du CAST est de répondre de manière pragmatique, à l'aide de méthodes et d'outils très variés, aux défis sociaux médicaux que représente le vieillissement accéléré de la population américaine.

Le moins qu'on puisse dire est que dans ce domaine, l'imagination des industriels et des chercheurs et sans limite. C'est ainsi qu'Intel vient de mettre au point un téléphone aide-mémoire destiné aux personnes souffrant d'Alzheimer. Ce téléphone affiche automatiquement la photo de l'appelant et rappelle à la personne âgée l'historique de ses communications. Accenture a intégré un ordinateur dans une boîte à pharmacie qui vérifie la prise de médicaments. Si le patient se trompe de médicaments, une sonnerie l'avertit de son erreur. Le centre de recherche de l'automatisation médicale a créé un sol capable de suivre les mouvements des seniors et de donner l'alarme s'ils tombent. Ces innovations sont conçues pour être utilisées au domicile des clients. Une tendance qui s'affirme dans la conception d'équipements pour les seniors. La plupart des erreurs médicales ont en effet lieu au domicile des patients.

Des chercheurs de l'université de Virginie ont également mis au point un lit capable de détecter des modifications anormales dans la respiration de la personne âgée et d'alerter automatiquement les services médicaux compétents. Intel propose un système qui suit les déplacements des personnes âgées chez elles et les alerte par un message qui s'affiche sur la télévision ou par un appel téléphonique si elles oublient de prendre leurs médicaments.

Philips a pour sa part, présenté Motiva, «Virtual Health Care», une plate-forme de services qui permet le suivi médical à la maison sur une chaîne TV. Ce système, développé par Philips et Achméa, est en cours d'expérimentation et permet de surveiller à distance le patient et de communiquer avec lui via le téléviseur. (Voir document de présentation Philips). "La surveillance à distance peut permettre de réduire les dépenses de santé", a déclaré Guus van Montfort, responsable de la protection médicale chez Achmea, ajoutant que des études avaient montré précédemment qu'une durée d'hospitalisation réduite permettait des économies de 25 %. Une journée d'hospitalisation aux Pays-Bas représente un coût moyen d'environ 641 euros.

En France, ce coût serait de l'ordre (en moyenne) de 800 ?, alors qu'une journée d'hospitalisation à domicile reviendrait à un coût variant de 160 à 300 ?. On mesure mieux, à la lumière de ces chiffres, l'enjeu socio-économique que représente la télésanté. Mais l'enjeu n'est pas seulement financier, il est aussi et surtout humain et social. Parmi les expérimentations de télémédecine dans notre pays, on peut notamment citer celle de Monestier-de-Clermont dans l'Isère et Altermed, dans le Morbihan. Ces expérimentations ont montré que l'utilisation intelligente et judicieuse des nouvelles technologies dans le domaine de la santé était une opération "gagnant-gagnant : le malade voit sa qualité de soins et de vie améliorée, le médecin et le personnel soignant voient leur profession valorisée et enrichie et la collectivité réalise des économies substantielles.

Mais toutes les expérimentations de télémédecine et de téléassistance aux personnes âgées, en France comme à l'étranger, montrent qu'il est capital d'adapter les outils technologiques aux patients et personne âgées, et non l'inverse. Moins la technologie est intrusive, plus elle se fonde dans l'environnement des personnes âgées et plus les résultats de ces expérimentations sont positifs. Heureusement, les constructeurs informatiques et électroniques, et les opérateurs de télécoms ont enfin pris conscience de cette nécessaire adaptation de la technologie aux personnes âgée ou handicapées. C'est ainsi qu'une petite société a lancé récemment, avec un grand succès, la nouvelle version de son " Ordissimo", une machine simplifiée à l'extrême et bon marché pour laquelle chaque fonction ou application correspond à une touche ou une icône.

Du côté de la recherche scientifique, les chercheurs du CNRS et d'autres laboratoires français et Européens mettent au point de nouvelles aides technologiques, parfois déjà industrialisées, pour faciliter la vie quotidienne des personnes handicapées (38 millions en Europe dont 5 millions en France) et encourager leur insertion dans la vie professionnelle. Du fauteuil roulant intelligent, qui s'adapte aux capacités de conduite de son pilote, à la canne " laser " pour détecter les obstacles, en passant par le système d'aide à l'écriture sur clavier avec prédiction de mot. Ces projets sont en particulier le fruit du travail du Réseau Thématique Pluridisciplinaire (RTP) " Handicap " (Voir dossier Science et handicap).

Autre initiative intéressante, l'opérateur SFR vient d'annoncer cette semaine une nouvelle gamme de combinés baptisée " Simply" pour convaincre les seniors de franchir le pas et de se doter d'un téléphone mobile. Il s'agit de conquérir 200 000 clients en un an, parmi les réfractaires au téléphone mobile, en leur proposant un combiné d'entrée de gamme très simple à utiliser. L'accent a été mis sur l'ergonomie et la lisibilité. Il est vrai qu'en France, 10 millions d'adultes de plus de 35 ans ne sont pas encore équipés en téléphonie mobile, dont 3 millions de personnes âgées qui ne sont pas à l'aise avec la technologie. Ces personnes seraient prêtes à acquérir un mobile, à condition qu'il soit très simple à utiliser et puisse automatiquement rendre certains services spécifiques aux personnes âgées.

Nous devons à présent tirer tous les enseignements de ces expérimentations pour généraliser l'utilisation des nouvelles technologies au service des personnes âgées en essayant de rendre la technologie la plus transparente, la plus diffuse et la plus intuitive possible, de manière à ce que nos anciens bénéficient d'une aide adaptée à leurs besoins et à leur psychologie et gardent le maximum d'autonomie. Nous avons dix ans pour relever ce grand défi de société qui permettra à notre société de recréer du lien social avec nos aînés et ouvrira de nouvelles voies pour que les personnes âgées voient leur qualité de vie transformée, grâce à une technologie plus intelligente, plus transparente et finalement plus humaine, et puissent ainsi participer pleinement à la vie économique, sociale et culturelle de notre pays.

René Trégouët

Sénateur honoraire

Fondateur du Groupe de Prospective du Sénat

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