Edito : L'accès à l'eau pour tous sera l'un des grands défis de ce siècle
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Je le dis à nouveau : cette somme de 15000€ est nécessaire pour le fonctionnement technique de RT flash et n'est en rien destinée à rémunérer un membre de notre petite équipe.
Chaque membre de cette petite équipe passe plusieurs dizaines d'heures chaque semaine pour débusquer dans la presse scientifique et technologique mondiale des informations qui très souvent n'ont pas encore été reprises dans la presse française et personnellement je passe beaucoup d'heures pour préparer et rédiger l'éditorial de chaque semaine
Depuis 26 ans nous donnons bénévolement beaucoup de temps à RT Flash et nous ne le regrettons pas car ces exercices intellectuels nous maintiennent en très bonne forme.
Mais je regrette que la mécanique ne suive pas. En faisant appel à vos dons je me bats pour faire tourner des serveurs, pour utiliser des logiciels spécifiques, pour acheter des images et pour rémunérer à des prix très bas un spécialiste qui fait tourner tout cela.
La ligne d'une totale gratuité de RT flash, et de refuser toute publicité, fait que nous avons un lectorat particulier très souvent constitué d’étudiants qui n'ont pas beaucoup de moyens financiers.
Mon appel aux dons ne s'adresse pas à eux car le maigre argent dont ils disposent doit avoir pour eux d'autres finalités plus essentielles.
Mais il doit y avoir dans le lectorat de RT Flash des personnes ayant plus de moyens dont le budget ne serait pas bouleversé par le don qu'elles pourraient faire à notre association à ADIST.
Je suis déçu mais je garde une totale confiance en mes lecteurs.
Si vous décidez, enfin, de faire un don, faites-le vite, car si votre don nous parvenait après le 31 Décembre, vous ne pourriez pas bénéficier en 2024 d’une réduction d’impôt égale aux 66% de votre don.
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Bien cordialement
René Trégouët
Sénateur Honoraire
Rédacteur en Chef de RT Flash
Président de l’ADIST
EDITORIAL :
L'accès à l'eau pour tous sera l'un des grands défis de ce siècle
Selon l'ONU, la consommation mondiale d'eau, qui n'était encore que 2000 km3 en 1960 aurait atteint les 4700 km3 en 2020, soit 600 m3 en moyenne, tous usages confondus, par an et par terrien. On estime que sur les 35 millions de Km3 d'eau douce que recèle notre Terre (principalement contenus dans les glaciers), seuls 630 000 km3 d’eau douce (à peine 2 % des réserves totales) sont facilement disponibles sur Terre. Cette eau est essentiellement stockée dans les rivières, les lacs et les roches aquifères souterrains. Cette eau douce est une ressource en grande partie renouvelable qui devrait, en théorie, être inépuisable et suffire aux besoins humains. Mais la réalité est bien plus complexe et bien différente car cette immense ressource en eau est répartie de manière inégale, à la fois sur le plan spatial et en matière d'usages. Il faut notamment rappeler que 10 pays se partagent 62 % des réserves d'eau douce de la planète, Brésil, Russie, Canada, USA, Chine, Colombie, Indonésie, Pérou, Inde, Birmanie. S'agissant des usages, la FAO estimait en 2021 que dans le monde, l'agriculture représente 72 % de tous les prélèvements d'eau. Le reste se répartit entre l'industrie (18 %) et la consommation domestique (10 %).
C'est ce qui explique que 4 milliards de personnes, presque la moitié de l'humanité, connaissent des restrictions sévères d'eau au moins un mois par an. Il existe en effet une énorme disparité en matière de ressources en eau potable et de conditions d’accès à cette eau, entre pays développés et pays émergents : l'écart est de 1 à 50 entre la consommation moyenne journalière d'eau d'un Africain (15 litres) et celle d'un Américain (600 litres). Sachant que cette consommation d'eau devrait continuer à croire de 1,5% par an, elle pourrait atteindre environ 7300 km3 par an en 2050, soit 750 litres par et par terrien. Pour mieux se rendre compte à quel point cette consommation mondiale est devenue colossale, il faut se représenter un cube de 16, 5 km de côté : c'est la quantité d'eau consommée par l'humanité chaque année. Autre élément de comparaison, il ne faut à présent que 5 ans pour que notre planète consomme l'équivalent du gigantesque volume du lac Baïkal en Russie, dont l'énorme volume (23 600 km3) représente environ 20 % de l'eau douce retenue dans les lacs et les rivières de la planète.
En septembre 2023, une nouvelle étude internationale publiée dans Science (Voir Scienc Advances) a fait grand bruit en montrant qu'une nouvelle limite planétaire (la sixième en 9 ans) avait été largement dépassée : le cycle de l’eau douce, qui comprend, d'une part, "l’eau verte", contenue dans les sols et les plantes, et, d'autre part, "l’eau bleue", présente dans les rivières, lacs et nappes phréatiques. Ce concept de limites planétaires a été développé et affiné depuis 2009 par le Stockholm Resilient Center, sous l'égide du grand scientifique Johan Rockström, directeur de l'Institut de Potsdam pour le climat et Président de la Commission de la Terre de l'ONU. Il s’agit de neuf grands processus biophysiques et biochimiques dont la perturbation par les activités humaines menace la stabilité et la résilience de notre planète, vu comme un vaste système énergétique, physique et biologique : l’érosion de la biodiversité, la perturbation des cycles de l’azote et du phosphore, le changement d’usage des sols, introduction d’entités nouvelles dans la biosphère, le cycle de l’eau douce, l’acidification des océans, l’appauvrissement de la couche d’ozone, et enfin l’augmentation de la présence d’aérosols dans l’atmosphère. Cette nouvelle étude montre que les surfaces terrestres connaissent des perturbations, plus sèches ou plus humides, dans 18 % des zones étudiées pour l’eau bleue, et 16 % pour l’eau verte. A présent ces valeurs dépassent nettement les valeurs de référence à ne pas dépasser, à savoir 10 %, pour les eaux bleues et 11 % pour les eaux vertes. En 2015 les chercheurs Fernando Jaramillo et Georgia Destouni, de l’Université de Stockholm, avaient déjà calculé que l’humanité consommait chaque année 4 485 km³ d’eau douce. Soit plus que la limite soutenable fixée à 4 000 km³ par an (Voir Science).
Cette perturbation accélérée du cycle mondial de l'eau a été confirmée en 2023 (Voir Science) par une vaste étude, associant le Centre Boulder du Colorado et le CNES de Toulouse internationale, qui révèle que la moitié des lacs et réservoirs du monde perdent de l'eau, essentiellement à cause du réchauffement climatique et de l'utilisation excessive d'eau douce par les humains. Sur la période allant de 1992 à 2020, l'étude montre de manière saisissante, grâce à une analyse fine des images satellite, que ces pertes d'eau des lacs représentent l'équivalent de toute la consommation en eau des États-Unis en 2015. Cette étude révèle que les lacs perdent non seulement de l'eau dans les zones arides, mais également dans les régions humides. Selon ces recherches, environ la moitié des pertes en eau des lacs naturels est due aux activités humaines et aux températures en hausse, qui provoquent une évaporation accrue. Il faut en effet rappeler que l'augmentation de seulement 1 degré de la température provoque une hausse de 7 % de l'évaporation de l'eau dans l'atmosphère. L'autre facteur important serait lié au manque de précipitations. « Dans les deux cas, ces pertes considérables d'eau utilisable sont liées au changement climatique », souligne le Pr Balaji Rajagopalan. Ces études sont en cohérence avec les recherches de l'OMM qui estiment qu'au cours des 20 dernières années, le stockage de l’eau dans les terres a diminué d’un centimètre par an, en tenant compte de la surface, du sous-sol mais aussi de l’humidité du sol.
Cette situation alarmante vient d'être encore confirmée, il y a seulement quelques jours, par une étude internationale, utilisant des observations de satellites de la NASA, qui montrent que la quantité totale d'eau douce sur Terre a chuté brusquement à partir de 2014, puis est restée à son plus bas niveau depuis, ce qui conforte l'hypothèse selon laquelle la Terre est entrée dans une nouvelle ère de sécheresse sévère et persistante. L'analyse de ces nombreuses mesures par satellite a montré que la quantité moyenne d’eau douce stockée sur terre, à savoir l’eau de surface des lacs et rivières et l’eau des aquifères souterrains, était inférieure de 1 200 km³ aux niveaux moyens constaté entre 2002 à 2014; Comme le souligne le Pr Matthew Rodell, l’un des chercheurs et hydrologue au Goddard Space Flight Center de la NASA (à Greenbelt, dans le Maryland), « Ces pertes représentent une quantité d'eau douce phénoménale, correspondant à deux fois et demie le volume du lac Érié, ou encore au quart de la consommation mondiale d'eau potable » (Voir NASA).
Alors que la consommation globale d'eau ne cesse d'augmenter et que les ressources immédiatement disponibles se réduisent, 700 millions d’individus, soit 9 % de la population mondiale, n’ont toujours pas accès à l’eau potable en 2022, selon l’OMS. Et il faut y ajouter les 1,5 milliard de personnes pour lesquelles cet accès reste intermittent, précaire et distant de plusieurs km. Au total, c'est donc 2,2 milliards de personnes, soit plus du quart de l'Humanité, qui ne dispose toujours pas d'un accès à l'eau permanent, fiable et contrôlé. Le rapport de la Commission Mondiale sur l'Economie de l'Eau, publié il y quelques semaines, confirme également la gravité de la situation en matière de raréfaction des ressources mondiales disponibles d'eau douce. Selon cette étude, la demande globale en eau douce devrait dépasser de 40 % l’offre d’ici la fin de la décennie. Et si des mesures fortes ne sont pas prises d’ici 2050, les difficultés croissantes d'accès à l’eau réduiront le PIB mondial d’environ 8 %, mais cette baisse serait de 15% pour les pays pauvres, plus vulnérables (Voir The Guardian). Dans un tel scenario, cinq milliards de personnes pourraient avoir des difficultés à accéder à de l’eau potable, selon l’Organisation météorologique mondiale (OMM). Cela représentera plus de la moitié de la population mondiale.
Il faut bien comprendre que ces perturbations du cycle de l’eau sont étroitement liées au changement climatique. La destruction accélérée des zones humides et la déforestation accrue depuis 50 ans ont eu pour effet de réduire sensiblement la capacité de stockage des puits de carbone naturels, accélérant ainsi le réchauffement climatique. Dans une boucle rétroactive positive qui est l'exemple même du cercle vicieux, la hausse des températures a provoqué, en retour, des sécheresses catastrophiques à répétition et des incendies géants de plus en plus fréquents. Au final, on voit donc à quel point les dérèglements hydrique et climatique s'entretiennent et s'amplifient mutuellement et constituent bien les deux aspects d'un même phénomène global. Une des nombreuses conséquences négatives de ce cycle infernal est l'enneigement de plus en plus faible constaté sur l’Himalaya. Une étude publiée en juin dernier par des scientifiques du Centre international pour le développement intégré des montagnes (Icimod), basé au Népal, montre que la persistance de la neige en 2023 a été 18,5 % en dessous de la normale, soit la valeur la plus faible depuis 22 ans. La neige et la glace de l'Himalaya constituent une source d'eau essentielle pour les 1,65 milliard de personnes vivant dans les pays d'Asie du Sud-Est. L'Icimod avait déjà montré que, sous l'effet des émissions humaines de CO2, les glaciers de la planète avaient fondu 65 % plus vite entre 2011 et 2020 que lors de la décennie précédente (Voir Hindustan Times). Et l'Europe ne sera pas épargnée par ce phénomène catastrophique : une étude internationale publiée en décembre 2023 montre que, sans mesures plus fortes pour réduire nos émissions de CO2, les glaciers alpins européens risquent de perdre entre 34 % et 46 % de leur glace d'ici 2050.
Au niveau mondial, le secteur agricole est de loin les plus gourmand en eau et absorbe 72 % des l'eau prélevée par l'Humanité. Une étude réalisée en 2018 par l'Université d'Oxford montre que plus de 30 % de l'eau utilisée dans le monde servent à l'élevage (Voir Science). Dans la production de viande et d'autres produits d'origine animale, la plus grande partie de l'eau est utilisée pour la culture des aliments destinés aux animaux d'élevage. Quant à la culture d'aliments pour animaux, elle occupe à présent plus de 80 % des terres agricoles du monde et consomme la majeure partie de l'eau utilisée par l'agriculture mondiale. Parmi tous les produits d'origine animale, la viande de bœuf est celle qui consomme le plus d'eau. La production d'un kilo de viande de bœuf nécessite jusqu'à 15 000 litres d’eau et les trois viandes les plus consommées (bœuf, porc, poulet), consomment en moyenne 10 000 litres par kg. En revanche les œufs ne nécessitent que 3200 litres par kg, les céréales, 1650 litres, les fruits 1000 litres et les légumes, à peine 350 litres par kg. On ne s'étonnera donc pas qu'aujourd'hui l'élevage rejette 7 gigatonnes de GES par an dans l'atmosphère, soit 15 % de l'ensemble des émissions humaines. Il est vrai que la consommation mondiale de viande a été multipliée par 7 depuis 1950, passant de 45 à 363 millions de tonnes par an. Et selon la FAO, la consommation de viande pourrait encore augmenter de 28 % d'ici 2050, atteignant 465 millions de tonnes, soit 48 kg par an et par habitant, contre 44 kg par an aujourd'hui...
On le voit, pour parvenir à maîtriser la demande mondiale d'eau, puis à la faire redescendre au milieu du siècle à 4000 Km3 par an dans le monde (soit une réduction de la consommation d'eau de 30 % par Terrien d'ici 2050), seuil jugé supportable pour notre planète par de nombreux experts et scientifiques, le principal levier qu'il faut actionner est celui qui vise à réduire d'un quart la production totale de viande dans le monde et, parallèlement, à réduire également d'un quart la production des cultures les plus gourmandes en eau (riz, soja, maïs, canne à sucre, avocats, amandes) pour les remplacer par des cultures plus sobres, comme le sorgho, le tournesol les légumineuses, les tubercules. Combinée à l’adoption des techniques agronomiques et de méthodes d'irrigation plus économes en eau (par exemple le riz basmati sur champ nivelé, qui permet d'augmenter le productivité de 30 % tout en diminuant de 30 % les besoins en eau), cette réorientation de l'agriculture au profit des protéines végétales et des fruits et légumes à faible empreinte hydrique pourrait permettre, à terme, de diminuer de 20 à 30 % la consommation mondiale d'eau, soit 900 à 1000 km3 d'eau économisée par an, une quantité équivalent à celle de l’eau perdue au niveau mondial à cause des fuites.
Le deuxième levier à actionner pour réduire la consommation effrénée d'eau est le recyclage systématique et généralisé de l'eau, à tous les niveaux d'utilisation. La Citée-État de Singapour est devenue l'une des références en la matière. Avec sa densité de population très élevée, cette île de 699 km2 a dû faire face à une pénurie en eau accrue et a développé le recyclage massif de ses eaux usées, grâce à un traitement innovant, combinant microfiltration, osmose inverse et rayonnement UV. Cette eau, baptisée « Newater », est utilisée à la fois pour des applications industrielles et la climatisation et pour les usages domestiques. Autre exemple remarquable, la Namibie, le pays le plus aride d'Afrique australe. Ce Pays reçoit en moyenne 280 millimètres de pluie par an, dont 80 % sont perdus par évaporation. Ce pays pauvre est devenu un modèle en gestion durable de l'eau (Voir Nature Africa). Mise en service dès 1960 et modernisée en 2002, la station de recyclage des eaux de Goreangab (GWRP) a été la première au monde à produire de l'eau potable purifiée directement à partir d'eaux usées. Aujourd'hui, la station assure le tiers de la consommation d'eau de la ville et a permis de réduire sensiblement les prélèvements dans les nappes phréatiques de Windhoek. Cette installation exemplaire repose sur un procédé appelé réutilisation directe de l'eau potable (DPR) qui élimine les polluants et les contaminants des eaux usées.
Suivant l'exemple de la Namibie, les États-Unis vont se doter de leur première installation de réutilisation directe des eaux usées à El Paso, au Texas, où, comme en Namibie, l'eau recyclée sera directement réinjectée dans le réseau de distribution d'eau potable. La ville transformera jusqu'à 45 000 m3 d'eaux usées en eau potable purifiée de haute qualité, ce qui en fera la plus grande installation du genre au monde. La mégapole de Los Angeles a prévu de mettre en service une installation hybride qui fournira un million de m3 par jour. Actuellement, la Californie traite et réutilise près de 900 millions de mètres cubes, soit environ 18 % des eaux usées qu’elle produit. Mais cet état-pionnier veut aller encore plus loin et souhaite multiplier par trois cette quantité d’eau recyclée d’ici à 2030.
En France, seules 0,6 % des eaux usées sont réutilisées. Contre 8 % pour l’Italie et 15 % pour l’Espagne. Ce retard n'est plus acceptable dans notre pays qui a connu des épisodes de sécheresse plus fréquents et plus intenses au cours de ces dernières années. La réutilisation des eaux usées traitées est heureusement enfin devenue une priorité pour l'Etat, comme pour les collectivités locales. Un an et demi après la présentation du « Plan-eau », visant à recycler au moins 10 % des eaux usées d'ici 2030, les verrous réglementaires les plus importants ont enfin sauté au cours des derniers mois et permettent enfin aux industriels et agriculteurs d'utiliser bien plus facilement les eaux usées pour leurs activités. En 2014, une vaste étude a montré qu'un litre d'eau potable sur cinq est perdu dans des fuites de canalisations, ce qui représente environ 4 milliards d'euros de perte, soit un total de 1 300 milliards de litres d'eau (ou encore 1,3 km3). Le taux de fuite est en moyenne en France de 3 400 litres par jour pour chacun des 850 000 kilomètres de canalisations d'eau qui parcourent le pays. Les experts estiment que pour descendre en dessous de 10 % de fuites, il faudrait doubler le rythme annuel des investissements, pour atteindre les 3 milliards d'euros par an. Il y a quelques semaines, une autre étude du Cercle de l’eau sur le financement de la politique de l’eau en France a évalué qu'il va falloir investir 13 milliards d'euros de plus chaque année pour faire face aux conséquences du changement climatique.
Dans ce contexte de stress hydrique chronique et croissant, lié au changement climatique, on comprend bien que la prévention des fuites d'eau constitue, avec la réorientation de l'agriculture et le recyclage généralisé, le 3ème levier à actionner pour maîtriser notre consommation d'eau. L'ONU rappelle souvent que les fuites d'eau sont encore responsables d'un tiers des pertes de ce précieux liquide, entre sa production et sa consommation, ce qui représente la quantité énorme de 1400 Km3, qui est perdue chaque année, soit l'équivalent annuel de la consommation américaine et chinoise, une perte estimée à 40 milliards de dollars par an... Pourtant il existe aujourd'hui des outils numériques puissants qui permettent de prévenir et de détecter très efficacement ces fuites, et de mieux maîtriser les dépenses d'infrastructures et d’entretien des réseaux de distribution.
Prism est un logiciel révolutionnaire développé par l'Ecole nationale du génie de l’eau et de l’environnement de Strasbourg. Ce système d'analyses de données par IA permet de prendre des décisions pertinentes pour optimiser la performance des systèmes de distribution d’eau, tout en limitant les pertes et en contrôlant les coûts. En réduisant les pertes d’eau et en optimisant la gestion des réseaux, les collectivités locales pourraient réaliser des économies considérables.
Nevers Agglomération a lancé il y a un an une expérimentation autour de l’utilisation de l’IA pour optimiser la recherche de fuites sur le réseau d’eau potable. Ce système utilisant l'IA permet de réduire de 95 % le temps moyen de repérage des fuites sur le réseau. La prochaine étape du projet va intégrer une dimension prédictive à cet outil en décelant les signaux précurseurs permettant d’anticiper l’apparition d’une fuite plusieurs jours à l’avance. La Métropole du Grand Nancy a présenté, il y a quelques semaines, pour la première fois en France, un drone aquatique développé par Xylem pour inspecter son réseau et détecter des micro-fuites. Ce système utilise un robot de la taille d’une balle de tennis, équipé de capteurs acoustiques ultrasensibles, qui circule dans les canalisations en fonctionnement, sans interrompre le service aux usagers, et peut repérer de minuscules fuites, de seulement 0,1 litre par minute.
Pour stabiliser, puis réduire la consommation mondiale d'eau à partir de 2050, il va donc falloir actionner simultanément, et de façon coordonnée ces trois puissants leviers, transition agricole, recyclage généralisé et prévention intelligente des fuites. A ces solutions techniques, s’ajoute bien entendu un autre levier de nature économique et politique, concernant la gouvernance de l'eau, qui doit devenir plus transparente et plus démocratique et l'évolution profonde des modes de tarification des consommations d'eau, qui vont devoir tenir compte beaucoup plus des différents types d'usages et des impacts finaux sur l'environnement que des volumes consommés.
J’évoque enfin une innovation remarquable développée par l’université de l’Illinois à Urbana-Champaign (UIUC). L'idée de ces chercheurs est de tirer parti ingénieusement de l’évaporation océanique, favorisée par la montée des températures, pour constituer des réservoirs en eau potable. Il s'agit de capter l'air saturé en eau, à l'aide de structures d’extraction, implantées près du rivage. L'eau ainsi stockée serait ensuite acheminée par des canalisations vers les lieux de consommation. Ce procédé présente plusieurs avantages décisifs : il requiert bien moins d’énergie que les méthodes existantes et son impact écologique est bien plus faible. Selon l'étude, une surface de captage de 210 m de large et 100 m de haut pourrait fournir un volume suffisant d’humidité récupérable pour répondre aux besoins quotidiens en eau potable d’environ 500 000 personnes. Ces systèmes de récupération d'eau douce simples, fiables, efficaces et peu onéreux, utilisés à grande échelle dans les pays émergents, pourraient permettre de faciliter l’accès à une eau abondante et de qualité pour les populations côtières qui représentent 3,8 milliards de personnes (Voir University of Illinois).
C'est en combinant de manière intelligente et adaptée, en tenant compte des contextes géo-climatiques et besoins locaux très différents, ces différents leviers d'action, agriculture sobre et raisonnée, recyclabilité, gestion numérique des ressources et de la distribution, tarification plus équitable intégrant l’empreinte écologique et innovation dans la production locale d'eau douce à faible empreinte énergétique, que l'humanité parviendra à restaurer durablement le cycle naturel de l'eau, gravement perturbé par les activités humaines et pourra assurer la disponibilité de cette ressource inestimable et symbole de vie pour les générations futures.
René TRÉGOUËT
Sénateur honoraire
Fondateur du Groupe de Prospective du Sénat
e-mail : tregouet@gmail.com
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