RTFlash

Climat : la France lance ses projets domestiques

Le système international mis en place aujourd'hui pour lutter contre le changement climatique fixe, via le protocole de Kyoto, un plafond aux émissions de gaz à effet de serre (GES) des pays industrialisés, et permet les échanges de permis d'émissions entre ces pays. Il comporte de plus un volet « projets », qui autorise les pays à rapatrier et à utiliser pour leur conformité des crédits générés par des projets réduisant les émissions à l'étranger.

Chaque pays est ensuite libre des moyens qu'il désire mettre en oeuvre sur son territoire pour réduire ses émissions : plusieurs pays non européens ont ainsi mis en place un système de « projets domestiques », qui reprend la logique des projets définis par le protocole de Kyoto, mais sur le territoire national. Deux pays ayant ratifié le protocole de Kyoto, le Canada et la Nouvelle-Zélande, se sont notamment engagés dans cette voie.

En France, le système européen d'échange de quotas de CO2 qui s'applique aux installations les plus émettrices de l'industrie et de la production d'énergie, couvre moins de 30 % des émissions nationales : les 70 % restantes ne sont soumises à aucune incitation via le prix du carbone, et ce alors que les émissions qui progressent le plus en France font partie de ces émissions non couvertes. L'élargissement du système des quotas se heurterait rapidement à des limites techniques (émissions diffuses, sources mobiles) et de coût (nombre d'installations).

Un système de projets domestiques aurait en revanche l'avantage de toucher les secteurs les plus sensibles et les plus diffus en matière d'émissions en leur envoyant un signal prix sur le carbone. Il permettrait d'aller plus avant vers une « décarbonation » de notre économie, tout en réduisant le coût global de la réduction des émissions. Si ce système est rattaché au marché européen de quotas, il permettrait d'en accroître la liquidité par l'apport de nouveaux actifs.

Avec l'aide de nombreux acteurs, de la sphère publique comme de la sphère privée, réunis en groupes de travail sectoriels, la Mission climat de la Caisse des dépôts et consignations a procédé à une évaluation du gisement des réductions d'émissions qui pourraient théoriquement avoir lieu sur notre territoire si un système de projets domestiques était mis en place. Une fourchette de 10 à 15 millions de tonnes de CO2 réduites a été retenue, réparties en quatre secteurs.

Dans le transport terrestre, secteur ou les émissions augmentent le plus vite, le gisement de réductions d'émissions apparaît notamment dans le transport de marchandises (intermodalité), dans l'action sur le transport urbain de voyageurs, notamment les flottes de bus, et pour des projets utilisant des technologies innovantes.

Dans le secteur agricole et forestier, des réductions importantes d'émissions pourraient être obtenues grâce à des projets concernant notamment l'utilisation des biocombustibles, la gestion des déjections animales, la diminution de la fertilisation azotée, et le stockage du carbone dans la biomasse. A plus long terme, le potentiel de séquestration de carbone par la forêt et les changements de mise en valeur des sols agricoles mérite d'être exploré.

Dans le secteur du bâtiment, le gisement de réductions d'émissions semble important, notamment à travers les projets d'amélioration de la gestion des bâtiments tertiaires, d'évolution des systèmes de froid commercial, et de substitution de chaudières fossiles.

Les émissions hors quotas de l'industrie (gaz non-CO2, petites installations) pourraient être fortement réduites, principalement dans le secteur des déchets (gestion des décharges et des eaux usées). Deux autres pistes intéressantes de réduction semblent être les émissions des procédés de l'industrie chimique et les fuites liées au transport de gaz naturel. Ce gisement est théorique : seule la mise en place d'un dispositif effectif permettra de connaître le montant qui peut effectivement être réduit.

Techniquement, la mise en place d'un système de projets domestiques en France peut se faire de différentes manières suivant l'actif carbone qui sera délivré en échange des réductions d'émissions permises par les projets.

Quatre options sont envisageables, qui s'appuient sur quatre types d'actifs :

? La cession par l'Etat d'une partie de ses permis Kyoto, réalisable dès 2006

? L'utilisation de quotas européens

? La délivrance de crédits Kyoto achetés par l'Etat sur le marché international

? La mise en place d'accords réciproques avec des partenaires européens pour rentrer dans le cadre des projets Kyoto.

Le choix effectué devra prendre en compte la facilité de mise en oeuvre et la liquidité de l'actif choisi sur les marchés européens et internationaux. Certaines des options peuvent être mises en oeuvre dans le cadre institutionnel actuel, d'autres nécessitent des négociations.

D'autre part, pour que ces projets puissent apporter un bénéfice écologique et économique réel à la collectivité, et aider la France à atteindre son objectif de réduction des émissions, ils doivent être additionnels aux politiques et mesures déjà prévues par la France dans le cadre du Plan Climat.

CDD

Noter cet article :

 

Vous serez certainement intéressé par ces articles :

    Recommander cet article :

    back-to-top