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Des toits qui récupèrent la vapeur d'eau de l'atmosphère

L'eau douce est un bien rare, qui manque cruellement dans beaucoup de régions du monde. Comme le rappellent les Nations Unies dans leur récent rapport, une personne sur six est aux prises avec le manque d'eau potable et cette pénurie risque d'affecter le tiers de la population mondiale d'ici 2025. 1,1 milliard de personnes n'ont pas accès à l'eau potable et 2,6 milliards sont privées d'assainissement adéquat. Chaque année, 443 millions de jours de scolarité sont perdus à cause des pathologies liées au manque d'accès à l'eau potable. Plus grave, 1,8 million d'enfants meurent d'infections transmises par l'eau insalubre.

Face à cette situation alarmante, des chercheurs du laboratoire « Systèmes physiques de l'environnement », à Corte, et du Laboratoire de physique et mécanique des milieux hétérogènes de Paris se sont mobilisés. À leur actif, un procédé de récolte de la rosée : des peintures et films « radiatifs », qui favorisent la condensation de l'eau de l'atmosphère. Ils recueillent ainsi jusqu'à 0,6 litre d'eau par mètre carré de surface peinte en une nuit ! Un record jamais égalé par les prototypes mis au point depuis près d'un siècle... Seul impératif : un ciel dégagé. Idéal donc pour les zones arides.

On estime la ressource en eau contenue dans l'atmosphère à 12 900 km3, dont 98 % sous forme de vapeur (seuls 2 % sont sous forme de nuages). Une partie de cette eau se condense au petit matin en rosée, de fines gouttelettes qui se sont déposées sur les objets plus froids que l'air ambiant. Alors, Marc Muselli et Daniel Beysens, à Paris, ont eu une idée : favoriser le refroidissement des toits et des talus dès la tombée de la nuit pour récolter un maximum d'eau.

La recette ? « Uniquement des produits du commerce bon marché : pour une peinture, une base usuelle, pour un film, du polyéthylène. Le tout dopé avec des microbilles, faites d'oxyde de titane et de sulfate de baryum », explique Marc Muselli. Ces dernières émettent naturellement des radiations infrarouges. Cette perte d'énergie a pour conséquence d'abaisser la température du support sur laquelle la peinture a été étalée.

Quant à l'écoulement des gouttes d'eau, il est favorisé par des molécules tensioactives de savon alimentaire. « Et nous inclinons de 30 degrés le support. L'idéal étant de construire un cône inversé : jusqu'à 40 % d'eau en plus s'y condense », précise le chercheur. Au besoin, un isolant thermique peut même être ajouté sous le film : plaques de polystyrène, fibre de verre, ou même de la paille.

Au préalable, l'équipe a mené des mesures sur la formation de rosée. Ils ont développé un modèle de prédiction pour adapter leur matériau aux différents sites, selon les conditions météorologiques (hygrométrie, nébulosité...) et les supports locaux (tôle, tuiles, PVC...). Organisés sous l'égide de l'association Opur, les deux chercheurs et leurs collaborateurs ont recouvert des toits en Croatie, en Israël et à Tahiti. En Inde, un système de 15 000 m² est en construction. Il permettra de condenser jusqu'à 8 m3 d'eau chaque nuit.

Bien sûr, cette rosée est potable : des centaines d'échantillons de différentes origines géographiques sont passés au crible d'études chimiques et bactériologiques. Résultat : aucune trace de contaminant dans l'eau. Prochaine étape : l'équipement de toits terrasses au Maroc. Et pourquoi pas, le couplage de cette peinture avec des cellules photovoltaïques, pour apporter eau et électricité aux populations isolées.

CNRS

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