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La thérapie génique inverse durablement une surdité congénitale chez la souris

C'est une première mondiale : des chercheurs de l'Institut Pasteur, de l'Inserm, du CNRS, du Collège de France, de Sorbonne Université et de l'Université Clermont Auvergne, en collaboration avec les universités de Miami, de Columbia et de San Francisco, ont réussi à soigner la surdité de souris en remplaçant un gène défectueux par un gène normal. Ces souris étaient atteintes de l'équivalent murin de la surdité "DFNB9", une forme de surdité d'origine génétique.

La surdité DFNB9 est un trouble auditif, qui représente 2 à 8 % des surdités génétiques congénitales. Les personnes atteintes sont dépourvues du gène codant pour l'otoferline, une protéine essentielle à la transmission de l'information sonore au niveau des synapses des cellules sensorielles auditives.

Ce gène a été identifié en 2006 par l'équipe de Christine Petit de l'Institut Pasteur, spécialiste de la génétique des surdités et coautrice de la recherche dont il est question ici. L'otoferline est essentielle à l'audition : elle assure l'encodage du son, c'est-à-dire la transformation du signal sonore en information qui chemine le long du nerf auditif. En cas de mutation de ce gène, la synapse n'émet pas de neurotransmetteurs, et les fibres du nerf auditif ne perçoivent pas de stimulation acoustique. Pour l'heure, seuls des implants cochléaires dans l'oreille interne permettent une récupération auditive partielle chez les patients touchés par cette surdité. Mais le résultat est loin d'être parfait et la nécessité de mettre au point des traitements plus ciblés se fait sentir.

Un des principaux problèmes rencontrés dans le traitement de cette surdité est qu'elle se met en place pendant la grossesse, autour de 20 semaines. Lorsque le bébé naît et qu'elle est diagnostiquée, les options de traitement sont donc limitées jusqu'à présent aux implants cochléaires. Mais l'équipe dirigée par le généticien Saaïd Safieddine s'est attelée à trouver des traitements alternatifs. Leur piste : tenter de rétablir l'audition chez des souris présentant cette surdité génétique en insérant dans leur génome le gène manquant, responsable de la production de l’otoferline. On appelle cette méthode thérapie génique.

Pour relever ce défi, les chercheurs ont utilisé comme vecteurs des virus adéno-associés (AAV), c’est-à-dire dépourvus de potentiel pathologique, mais capables de s'insérer dans les cellules. « Nous sommes presque tous porteurs de ce type de virus, sans être pour autant malades », souligne Saaïd Safieddine. « Ils vivent avec nous, et ne sont pas immunogènes. En outre, ils n'intègrent pas leur génome dans l'ADN des cellules qu'ils pénètrent, comme les rétrovirus, ce qui peut être la source de problèmes. Ils restent dans le cytoplasme sous forme épisomale. Ce sont d'excellents vecteurs ».

Cette thérapie génique a effectivement permis la restauration de l’expression de l’otoferline et, ultimement, la restauration de l’audition des souris. Et les résultats sont très durables, car ces cellules spécifiques ne se renouvellent pas au cours de la vie, ni chez les souris ni chez les humains. Ces résultats sont très encourageants car ils prouvent que la fenêtre thérapeutique pour le traitement de la surdité DFNB9 est bien plus large qu’on ne le pensait jusque-là.

On peut désormais espérer étendre ce succès au traitement d’autres formes de surdité génétique. Les chercheurs de l'Institut Pasteur ont fait une demande de brevet pour déposer leur technique et deux séries d'essais cliniques devraient avoir lieu d'ici 5 ans, pour évaluer la toxicité et les éventuels effets secondaires de ce traitement.

Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash

CNRS

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