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Réveiller les cellules dormantes pour combattre le cancer

Le mélanome est l’une des formes les plus graves de cancer de la peau. Potentiellement très agressif, il se développe à partir des mélanocytes, les cellules responsables de la pigmentation cutanée. S’il peut être superficiel, avec dans ce cas un bon pronostic, il peut aussi être plus profond et devenir métastatique, c’est-à-dire migrer vers d’autres organes.

Depuis une dizaine d’années, grâce aux thérapies dites «ciblées» par petites molécules – des substances inhibant un mécanisme précis de la tumeur pour la combattre – la moitié des mélanomes métastatiques qui portent une signature génétique les rendant sensibles à ces médicaments peuvent être traités efficacement, parfois jusqu’à leur éradication. « Cependant, malgré une réponse initiale parfois spectaculaire, 80 % des patient-es subissent une récidive, sur les mêmes sites que précédemment », explique Rastine Merat, chercheur au Département de médecine de la Faculté de médecine de l’UNIGE et responsable de l’Unité d’Onco-dermatologie aux HUG.

Ce phénomène est dénommé "résistance adaptative" : certaines cellules cancéreuses s’adaptent aux molécules censées les combattre et entraînent une résurgence de la maladie. Ceci même lorsque les métastases – et donc les cellules qui les composent – semblaient avoir complètement disparu. « Cela s’explique par la persistance, après traitement, de petits résidus de cellules malignes dites ‘‘dormantes’’ que les outils de radiologie classiques ne parviennent pas à détecter », indique Rastine Merat. « La particularité de ces cellules, en plus d’être invisibles, est de proliférer lentement. C’est cette caractéristique qui leur permet d’échapper aux thérapies ciblées, même lors du premier traitement ».

Des recherches ont montré qu’à l’intérieur des cellules à prolifération lente, une protéine qui régule notamment l’expression de nombreux gènes qui contrôlent la division cellulaire  – la protéine HuR – est sous-exprimée, contrairement aux cellules à prolifération rapide. Dans une recherche publiée en 2019, Rastine Merat et son équipe avaient établi le lien entre l’expression insuffisante de cette protéine et la résistance du mélanome à une thérapie ciblée. Dans leurs derniers travaux, ils ont cette fois mis au jour un mécanisme précis à l’œuvre dans les cellules "dormantes" qui provoque l’insuffisance d’expression de cette protéine, qu’il est possible de cibler avec des médicaments.

« Dans les cellules, les ARN messagers jouent un rôle central dans la production de protéines. Dans la minorité de cellules qui ont une expression insuffisante de la protéine HuR, nous avons découvert que l’ARN messager produisant HuR était piégé par d’autres protéines. C’est dans tous les cas un des mécanismes à l’origine de la sous-expression de HuR ». En utilisant un composé chimique permettant d’inhiber deux kinases – des enzymes – impliquées dans ce mécanisme, l’équipe de l’UNIGE est parvenue à empêcher la sous-expression de HuR, rendant les cellules moins capables de résister au traitement.

Cette découverte ouvre de nouvelles perspectives dans le traitement du mélanome mais pas seulement. « Le mélanome est un cancer modèle : si on le comprend, on est alors en mesure de comprendre bien d’autres types de cancers solides », explique Rastine Merat.

Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash

UNIGE

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