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Intervention de René TREGOUËT sur le Projet de loi relatif aux obligations de service public des télécommunications

Sénat Mardi 21 octobre 2003

M. René Trégouët : A l'occasion de l'examen du III de l'article 1er, je voudrais intervenir sur le périmètre du service universel. En effet, le sujet est essentiel et, personnellement, je regrette beaucoup que, malgré les efforts de la France à l'époque, ne soient inclus dans le périmètre du service universel ni la téléphonie mobile, ni l'Internet à haut débit. Tout d'abord, la téléphonie vocale telle que nous la comprenons encore aujourd'hui connaît une évolution très rapide. Grâce au numérique, on constate que de plus en plus de communications vocales passent par Internet. Et cette solution va gagner en compétitivité pour devenir la moins chère grâce au haut débit. Voilà un paramètre nouveau que nous devons prendre en compte dans nos réflexions sur le téléphone vocal lui-même. Je connais des personnes qui, pour échanger avec leurs enfants établis à l'autre bout du monde des paroles, voire des images, se connectent, dans le cadre de leur forfait, pendant très longtemps sans rien débourser. Je regrette donc que l'on n'introduise pas le haut débit dans le service universel, car, par là même, l'Europe s'interdit une avancée significative. Par ailleurs, en n'incluant pas la téléphonie mobile dans le service universel, la Commission européenne, puisque c'est elle qui en a décidé ainsi, est, selon moi, incohérente avec elle-même. Vous vous souvenez qu'au cours de l'année 2000, répondant à une forte incitation des commissaires européens et tout particulièrement de l'un d'entre eux, les principaux pays européens, avec à leur tête la Grande-Bretagne suivie de l'Allemagne puis de la France, ont vendu très cher - aux enchères publiques en Grande-Bretagne et en Allemagne - des licences de téléphonie GSM mobile de troisième génération, appelées UMTS. Ainsi, il y a actuellement des milliards dans les caisses pour ce produit qui n'existe pas ou, du moins, qui n'est pas encore utilisé en Europe et pour l'exploitation duquel l'équilibre économique sera très difficile à trouver. Or, il n'y a aucun doute qu'en autorisant l'inclusion de la téléphonie dans le service universel la Commission européenne aurait donné un signal très fort pour développer les réseaux mobiles, pour aller plus loin que les générations actuelles, GSM ou GPRS, et pour essayer de trouver un nouveau marché pour l'UMTS. Un événement révélateur s'est produit la semaine dernière aux Etats-Unis. Les grands opérateurs américains sont confrontés à la même problématique. Ils développent ou le CDMA de troisième génération ou le GSM de troisième génération. Or, depuis quelques jours, on voit fleurir aux Etats-Unis une publicité qui encourage les utilisateurs partout où ils ne seraient pas satisfaits du WIFI à se servir de l'UTMS pour relier leurs ordinateurs. Il faut en prendre conscience : c'est un nouveau virage. On est en train de trouver un nouveau marché à l'UMTS, non pas dans le vocal mais dans les liaisons à très haut débit entre tous les appareils portables. Le WIFI a suscité de grandes espérances mais sa mise en oeuvre est difficile. Or, l'UMTS offre les mêmes possibilités. Pourtant, une fois encore l'Europe tarde beaucoup à mettre cette technologie en oeuvre. Les Etats-Unis vont nous rattraper sur les appareils de troisième génération, que ce soit pour le GSM ou pour le CDMA. C'est très regrettable, car ce sont des occasions très importantes qui sont offertes à notre pays et à l'ensemble de l'Europe. J'aurais donc voulu que la téléphonie mobile et le haut débit soient introduits dès maintenant dans le service universel, et, disant cela, je reste fidèle à mes convictions. M. le rapporteur se souvient sans doute qu'en 1996 je déclarais déjà ici même que ne pas opter tout de suite pour le numérique et les lignes Numéris proposées par France Télécom constituait une grande erreur parce que l'on prenait du retard alors que techniquement on était en avance. Il en va de même avec le téléphone de troisième génération : faute de se donner toutes les chances d'exploiter l'UMTS, on ne parviendra pas à l'équilibre économique. Monsieur le rapporteur, vous estimez, et cela part d'une bonne intention, qu'il faut raccourcir le délai de « revisite » du service universel et se fixer l'échéance de 2005. Or, la directive est sans ambiguïté. Vous la citez vous-même dans votre rapport : elle prévoit que le concept de service universel devra évoluer au rythme du progrès technologique, des développements du marché et de l'évolution des demandes des utilisateurs. S'il en est vraiment ainsi, c'est dès maintenant qu'il faut se fixer rendez-vous pour redéfinir le périmètre du service universel !

Sénat : http://www.senat.fr

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