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Hydrates de gaz : le nouveau pétrole ?

La France dispose-t-elle d'hydrates de gaz au fond de la mer de Corail, dans le sud-ouest du Pacifique ? Ce curieux composé à base d'eau et de méthane intéresse les chercheurs depuis que d'importants gisements ont été découverts à travers le monde. Jusqu'au 5 octobre, une campagne d'exploration a mobilisé deux navires au large de la Nouvelle-Calédonie. Objectif de la mission ZoNéCo : vérifier l'existence d'un signal sismique généralement associé à la présence de cette matière. Connus des chimistes depuis le XIXe siècle, les hydrates de gaz ressemblent à une glace blanche, nuancée d'orange, de rouge, de bleu et de gris. Ils sont faits de molécules d'eau assemblées en cages - les «clathrates» - contenant du méthane. Très abondants sur notre planète, ils se forment naturellement dans le sous-sol : au-delà de 1 000 mètres sous la terre gelée d'un permafrost nordique ou à plus de 500 mètres au-dessous du plancher des océans profonds. L'intérêt de cet étrange solide ? Il stocke d'énormes quantités de méthane. En fondant, 1 centimètre cube d'hydrate de gaz libère jusqu'à 164 centimètres cubes de gaz ! Longtemps, les géologues ont ignoré l'existence à l'état naturel de cette «cage à méthane». Observée d'abord au cours de manipulations en laboratoire, elle fut plus tard considérée comme une nuisance industrielle. Sous certaines conditions, cette substance chimique bouche, en effet, les conduits de gaz naturel. Mais, en 1964, une découverte va bouleverser les connaissances dans ce domaine. En Sibérie, des ingénieurs soviétiques, travaillant sur un champ gazier, détectent au fond d'un puits un surprenant échantillon : le premier bloc d'hydrates de gaz. Depuis, les scientifiques ont appris que ce composé est emprisonné dans des couches de sédiments larges de quelques centaines de mètres. Il s'y formerait à partir du méthane issu de la décomposition de matières organiques. A basses températures et sous de fortes pressions, cette substance s'associerait avec de l'eau pour former un complexe solide. Enfin, grâce à des techniques sismiques et à des forages, les chercheurs ont repéré des régions - golfe du Mexique, zone de subduction de Cascadia, au large des Etats-Unis, ou encore fosse de Nankai, au sud-est du Japon... - où cette ressource abonde. Le stock s'avère fabuleux : le Service géologique américain USGS) estimait, il y a quelques années, à 20 millions de milliards de mètres cubes la quantité de méthane présente dans le sol sous forme d'hydrates. Deux fois le volume équivalent des réserves prouvées de charbon, de pétrole et de gaz réunies ! Pourrait-on profiter de cette manne extraordinaire ? Le jeu en vaut la chandelle : mise à profit, 1 % de cette ressource suffirait à fournir la planète entière en énergie propre et peu génératrice de gaz à effet de serre. «Toutefois, seuls les gisements d'hydrates les plus riches seraient exploitables, explique Jean-Paul Foucher, chercheur à l'Ifremer, à Brest. Or il est aujourd'hui impossible de connaître leur teneur précise sans procéder à des forages coûteux.» Lancé en 2001, le projet européen Hydratech, auquel participe, pour la France, l'Ifremer, vise à développer des méthodes pour quantifier les hydrates du sous-sol. Il a abouti, cette année, à la mise au point d'une technique fondée sur l'analyse d'ondes acoustiques générées par des «stations d'écoutes sismiques» disposées en fond de mer. Reste toutefois à évaluer les performances de cet outil en le comparant à des forages. Seconde difficulté : l'exploitation. Rien n'indiquait, a priori, que les ingénieurs soient capables de tirer du gaz d'un champ d'hydrates. Commencé en 2002, un programme international baptisé «Mallik», associant cinq pays, devait en apporter la preuve. Mis en oeuvre dans le delta de la rivière Mackenzie, aux confins des Territoires du Nord-Ouest canadien, il a permis de tester durant deux ans, sur un puits, les procédés permettant de recueillir, par chauffage ou par réduction de pression, le méthane gazeux. Un pari réussi : au mois de décembre 2003, les chercheurs ont annoncé avoir réussi à produire, durant cinq jours consécutifs, le précieux fluide.

Express :http://www.lexpress.fr/info/economie/dossier/petrole/dossier.asp?ida=429675

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