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Les corneilles possèdent une forme de conscience

Les oiseaux de la famille des corvidés sont réputés pour leurs capacités cognitives remarquables et, selon Suzanna Herculano-Houzel, professeure de neurobiologie à l’Université américaine Vanderbilt, ils seraient aussi intelligents que nos cousins les primates.

On a longtemps pensé que les oiseaux étaient dépourvus d’un néocortex, cette partie de la matière grise cérébrale propre aux primates. Particulièrement développée chez l’humain, elle est impliquée dans des fonctions cognitives dites supérieures, comme la perception sensorielle et la réaction. L’étude de Martin Sacho et Christina Herold, chercheurs en neuroscience des universités allemandes de Bochum et Dusseldorf, révèle une neuroarchitecture jusqu’ici inconnue du cerveau antérieur sensoriel des oiseaux, le pallium.

Cette organisation pourrait générer des capacités de calcul qui rappellent celles du néocortex, selon l’étude. Elle conforte le constat que certains volatiles possèdent des capacités cognitives complexes, comme par exemple la fabrication d’outils pour saisir de la nourriture. On sait que le pallium des corvidés et perroquets contient plus d’un demi-milliard de neurones, et jusqu’à un à deux milliards, comme celui des singes, note l’article de Science. L’étude de Stacho et Herold démontre que ce réseau a une organisation similaire à celui du cortex des mammifères.

L’étude sur les corneilles, pour sa part, est la première menée sur des non-primates, a indiqué à l’AFP son auteur, Andreas Nieder, professeur en physiologie animale à l’Université allemande de Tübingen. Elle est aussi la première à établir chez l’oiseau un processus de conscience primaire, aussi dite sensorielle, c’est-à-dire la réponse imprévisible à un stimulus, allant au-delà du simple réflexe. Le Professeur Nieder tient à préciser qu’on ne parle pas de conscience de soi, de l’oiseau sachant ce qu’il perçoit, ce qui est une autre histoire. Difficile en bref de parler de pensée.

L’équipe du Professeur Nieder a entraîné deux corneilles noires âgées d’un an à signaler ou pas, après un délai de plus de 2 secondes, la présence éventuelle d’un stimulus visuel. En l’occurrence, un carré gris d’intensité variable affiché très brièvement, pendant un tiers de seconde, sur un écran noir. Les chercheurs se sont rendu compte que dans un premier temps, les neurones encodent l’intensité physique du stimulus, ce qu’on peut attendre de neurones visuels, explique le Professeur Nieder. Mais ensuite, pendant la période d’attente de plus de 2 secondes, nous observons un nombre croissant de neurones encodant la qualité subjective de la perception.

Subjective, parce que les corneilles se sont vu présenter parfois, et de façon aléatoire, des stimuli à la limite du perceptible. Autrement dit, elles ont pu croire parfois voir un carré inexistant, ou inversement. C’est le point très important, assure le Professeur Nieder, une situation où un stimulus unique donne lieu à deux perceptions différentes : penser l’avoir vu ou nier son existence, ce qui est l’attribut d’une conscience primaire.

Catherine Del Negro, spécialiste de la communication des oiseaux à l’Institut des neurosciences de Paris-Saclay (Neuro PSI), a salué un très bel article d’un point de vue expérimental. Les données sur l’activité neuronale ont été enregistrées en plaçant des électrodes dans le nidopallium, la partie du pallium abritant des fonctions supérieures. Concourant aux conclusions de ses collègues Stacho et Herold, le Professeur Nieder suppose que, même si le cerveau des oiseaux est construit très différemment de celui des primates, les deux ont évolué vers une fonction similaire dans le cas de la conscience primaire.

Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash

Science

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