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Edito : Les biomédicaments donnent un nouvel élan à la recherche pharmaceutique

25 ans après leur apparition, les biomédicaments issus du génie génétique et des biotechnologies sont en train de donner un nouveau souffle à la recherche pharmaceutique et d'ouvrir de multiples espoirs thérapeutiques pour des pathologies graves ou incurables. Tout commence en 1982, avec la commercialisation de l'insuline recombinante, une réplique fidèle de l'insuline humaine, produit par génie génétique qui a considérablement amélioré la prise en charge la qualité de vie des diabétiques. Puis, en 1986, c'est au tour du vaccin recombinant contre l'Hépatite B d'être produit par génie génétique.

Au cours des années 90, la découverte des inhibiteurs de protéase a radicalement transformé le pronostic pour les malades du sida, dans la mortalité a chuté de 90 %. Plus récemment, les biomédicaments ont permis des avancées remarquables dans le traitement de plusieurs autres pathologies graves, notamment la polyarthrite rhumatoïde, la sclérose en plaques et le cancer. L'Embrel et l'Humira, qui utilisent des anticorps monoclonaux, ont en effet révolutionné, le mot n'est pas trop fort, la prise en charge de l'arthrite rhumatoïde, affection particulièrement douloureuse et invalidante.

Dans le domaine de la cancérologie, l'herceptin et l'avastin se sont avérés être très efficaces contre les cancers du sein ou du colon métastatiques. Ils ont ouvert la voie à une nouvelle catégorie de médicaments anticancéreux reposant sur des mécanismes sophistiqués d'action au niveau cellulaire (apostose ou blocage de la formation des vaisseaux sanguins qui irriguent la tumeur).

En terme de service médical rendu les autorités françaises compétentes ont considéré, en 2006, que 68 % des biomédicaments sur le marché avaient un réel intérêt thérapeutique et 40 % un intérêt thérapeutique "majeur".

Néanmoins, les méthodes de production utilisant des bactéries ou des cellules vivantes sont plus délicates à mettre en oeuvre que les méthodes de production par synthèse chimique ou par voie extractive. Certaines étapes de la production peuvent en effet dénaturer les protéines, comme une variation de température ou une agitation mal contrôlée.

Cependant, ces méthodes de production offrent des avantages nouveaux et décisifs. La chimie en effet ne peut pas reproduire des protéines naturelles car ces molécules sont trop complexes. Quant à la voie extractive, réalisée à partir de plasma sanguin ou d'organes prélevés chez les animaux, elle exige une très grande quantité de matière et ne présente pas les mêmes garanties en matière de sécurité.

Au niveau mondial, 200 nouveaux médicaments issus des biotechnologies sont attendus sur le marché au cours des cinq prochaines années et le marché de ces biomédicaments, qui a augmenté de 45 % depuis 4 ans, devrait doubler d'ici 2011, passant de 55 à 110 milliards de dollars. En France, plus de 100 biomédicaments sont déjà disponibles sur le marché en 2007. Sandoz vient par exemple d'annoncer la commercialisation d'Omnitrope, la première hormone de croissance "biosimilaire", issue des biotechnologies.

Mais les biotechnologies sont également en train de bouleverser les méthodes de recherche classique pour découvrir de nouvelles molécules chimiques. En effet, en utilisant les nouveaux outils prédictifs issus des biotechnologies, les grands laboratoires peuvent réduire sensiblement le coût de développement des molécules classiques qui a décuplé depuis 20 ans pour dépasser à présent le milliard de dollars.

Aujourd'hui, à moitié des nouvelles molécules mises sur le marché sont déjà issues des biotechnologies et il ne fait nul doute que cette tendance va s'accentuer au cours des prochaines années. Ces biomédicaments sont-ils pour autant destinés à se substituer complètement aux médicaments classiques ? Non, en tout cas pas dans un avenir prévisible, si l'on en croit la grande majorité des chercheurs. Ceux-ci soulignent en effet que bio médicaments et médicaments de synthèse sont tout à fait complémentaires et que la médecine aura, pendant très longtemps encore, besoin d'associer en synergie ces deux types de médicament pour proposer de nouvelles alternatives thérapeutiques dans une multitude de pathologies lourdes et complexes, comme le cancer, les maladies cardio-vasculaires ou les maladies neurodégénératives.

Il est en revanche certaine que les méthodes et outils reposant massivement sur la conception et la simulation informatique des molécules et de leurs effets vont se généraliser à l'ensemble de la recherche pharmaceutique et devrait permettre de développer de plus en plus rapidement, pour un coût plus faible, des médicaments toujours plus nombreux et plus efficaces.

René Trégouët

Sénateur honoraire

Fondateur du Groupe de Prospective du Sénat

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