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Edito : C'est maintenant une certitude : L'avenir des Pays les plus pauvres passe par les Nouvelles Technologies

Le dernier rapport annuel du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) sur le développement humain, publié mardi 10 juillet, met en lumière de manière saisissante la place décisive des nouvelles technologies, dans le domaine de l'information comme dans le domaine du vivant, dans le développement économique mondial. (voir http://www.undp.org/hdr2001/ ) et spécialement le chapitre II, véritable mine d'informations, intitulé : « Les transformations technologiques accélèrent la mutation vers l'ère des réseaux », ( http://www.undp.org/hdr2001/chaptertwo.pdf ). L'étude de l'ONU rappelle que le chiffre d'affaires mondial des technologies de l'information passera, de 1999 à 2003, de 2200 à 3000 milliards de dollars, soit plus de 8 % du Produit Mondial Brut. Ce rapport des Nations Unies affirme que les nouvelles technologies peuvent grandement contribuer à réduire la pauvreté dans le monde et à atteindre l'objectif défini par l'ONU en l'an 2000 : réduire de moitié la pauvreté dans le monde d'ici 2015. Un manque de fonds publics, des distorsions dans les marchés et des droits de propriété intellectuelle injustes privent les pays du Tiers-Monde des bénéfices de la haute technologie, relève le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). Le rapport 2001 appelle aussi à un plus grand financement pour la recherche, et à des prix différenciés pour les médicaments et d'autres produits de haute technologie entre pays riches et pauvres. "Des forces puissantes sont en jeu qui risquent de consigner le Sud à des solutions de faible niveau technologique", a dit aux journalistes l'administrateur du PNUD, Mark Malloch-Brown. Coïncidence heureuse, la veille du jour où était publié le rapport du PNUD, six éditeurs décidaient d'accorder un accès électronique gratuit à un millier de journaux médicaux (http://www.washingtonpost.com/wp-dyn/nation/A33714-2001Jul8.html) ). Six cents institutions, africaines pour la plupart, bénéficieront de cette mesure supervisée par l'OMS. Pour Gro Harlem Brundtand, le directeur général de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), cité par le Washington Post, "il s'agit peut-être de la mesure la plus importante jamais prise pour réduire l'écart de connaissance médicale entre pays riches et pauvres". Ces Six éditeurs vont fournir gratuitement un accès électronique à leurs journaux scientifiques aux institutions médicales des pays pauvres. L'accès se fera via un portail créé par l'OMS. Les publications seront gratuites pour les pays dont le produit national brut (PNB) par habitant est inférieur à 1 000 dollars par an. Pour ceux dont le PNB par habitant et par an est compris entre 1 000 et 3 000 dollars, il y aura un abonnement réduit. Un médecin du Tiers-Monde qui souhaite s'informer sur les progrès de la médecine doit aujourd'hui payer 134 dollars par an pour s'abonner au célèbre hebdomadaire britannique The Lancet. S'il veut s'abonner au trihebdomadaire Brain Research, il lui en coûte 17 000 dollars par an. Soit la richesse produite l'année dernière par 43 Bhoutanais, 18 Nigérians ou 5 Marocains. Cette décision historique marque une étape importante vers un nouvel ordre mondial de l'information plus équitable et, osons le mot, plus humain. S'agissant de l'impact positif des nouvelles technologies sur le développement, le rapport de l'ONU reprend le cas de la ville de Bangalore, baptisée la Silicon Valley indienne, qui est l'exemple de ce que la haute technologie peut apporter à un pays en développement : ses exportations ont grimpé de 150 millions de dollars en 1990 à 4 milliards de dollars en 1999. Le rapport identifie par ailleurs plusieurs priorités telles que le développement de vaccins contre les maladies tropicales, le sida et la tuberculose, des ordinateurs à bas prix et des connexions sans fil et enfin des cellules photovoltaïques bon marché pour produire localement de l'électricité. Il note que, en 1998, les 29 pays membres de l'OCDE ont consacré 520 milliards de dollars à la recherche scientifique, plus que la richesse totale produite par les 30 pays les plus pauvres. Mais cette recherche est essentiellement tournée vers les maladies du Nord. "Sur les 1.223 médicaments mis sur le marché entre 1975 et 1996, seuls 13 ont été produits pour traiter les maladies tropicales", souligne le rapport. l'Organisation des Nations Unies demande aux pays riches d'oublier leurs craintes pour aider les pays en voie de développement à exploiter le potentiel des biotechnologies. La priorité la plus importante est de créer de "nouvelles variétés de sorgho, de manioc et de maïs, ainsi que d'autres aliments de base d'Afrique sub-saharienne", précise ce rapport du PNUD. Si l'ONU reconnaît que des recherches restent nécessaires sur les impacts potentiels du développement des récoltes transgéniques sur la santé et l'environnement, elle incite également les pays riches à partager les fruits de leurs recherches avec les pays les plus pauvres. A cet égard, et bousculant de manière salutaire les anathèmes et les craintes qui relèvent plus de considérations idéologiques que de réalités scientifiques, «Le débat actuel en Europe et aux Etats-Unis sur les OGM ne prend pas en compte les besoins du monde en développement», dit le rapport qui soutient que les cultures transgéniques pourraient révolutionner l'agriculture en Afrique et en Amérique latine. Ces nouvelles variétés de céréales capables de mieux résister à leurs prédateurs naturels (insectes, champignons, parasites etc...) et possédant de surcroît des qualités nutritionnelles améliorées, pourraient constituer un moyen puissant et efficace de lutte contre la faim dans le monde, selon le PNUD. En matière de technologies de l'information, 55 % des Américains utilisent l'Internet contre seulement 6,5 % de la population mondiale et 0,4 % en Afrique sub-saharienne. Les monopoles des télécommunications sont un obstacle à un usage plus répandu de l'Internet, mais pour Mark Malloch-Brown, le principal facteur est l'éducation. "Si la technologie de l'information ne décolle pas, ce n'est pas forcément parce qu'il n'existe pas de câbles à fibre optique ou de plate-forme de communication. Il est beaucoup plus probable que c'est parce qu'il n'y a pas assez de personnel qualifié dans ce secteur", a-t-il estimé. Les pays en développement ont ainsi un rôle vital à jouer pour généraliser l'enseignement secondaire et supérieur, selon le rapport. Celui-ci appelle aussi les pays riches et les entreprises à apporter leur aide à ce processus, en soulignant qu'une augmentation de 10 % de l'aide publique permettrait de consacrer 5,5 milliards de dollars à la recherche. "C'est la politique, pas la charité, qui déterminera en fin de compte si les nouvelles technologies seront partout un outil pour le développement humain", affirme le rapport. L'étude de l'ONU met en avant la chute vertigineuse du coût de transmission de l'information qui doit être exploitée pour accélérer le développement économique des pays pauvres : 150000 dollars pour 10 mégabits en 1970, 12 cents pour la même quantité d'information en l'an 2000 ! Le rapport du PNUD classe 162 pays en fonction d'un indice de développement humain. La meilleure qualité de vie au monde se retrouve cette année en Norvège, suivie par l'Australie et le Canada. Certains pays progressent, d'autres régressent. Les Etats-Unis sont ainsi passés de la troisième à la sixième position en raison de l'espérance de vie qui y est moins élevée que dans les autres pays développés. Le Canada, qui occupait la première place depuis six ans, est passé au troisième rang, devancé par la Norvège et l'Australie où l'espérance de vie et le niveau d'instruction ont progressé. La France est passée de la 12e à la 13e position. Le rapport mondial sur le développement humain utilise une mesure composite appelée « indicateur du développement humain » (IDH) pour classer chaque année les pays en fonction de trois critères : l'espérance de vie, le niveau d'instruction combiné aux taux d'alphabétisation des adultes et le revenu par habitant. Pour la plupart des pays, l'IDH enregistre avec le temps une progression plus ou moins rapide mais réelle. Le dernier rapport fait pourtant état d'une inversion de tendance, notamment en Afrique subsaharienne. Il est vrai que les 28 pays en queue de liste sont tous situés en Afrique. "Dans la plupart des pays, l'index de développement humain a augmenté ces 25 dernières années", note le rapport. "L'Egypte, l'Indonésie, la Corée du Sud et le Portugal ont accompli des progrès particulièrement remarquables", souligne-t-il. A la lecture de ce passionnant rapport, qui éclaire bien les vrais enjeux du développement planétaire, on comprend mieux à quel point il est important d'appréhender le problème du développement techno-économique et socio-éducatif dans sa dimension mondiale. Il faut que les pays développés comprennent qu'ils ont non seulement le devoir moral d'aider les pays pauvres à décoller économiquement mais qu'il est dans leur intérêt, à terme, de favoriser le développement économique et social des pays du sud -qui sont leurs marchés de demain- en facilitant considérablement les transferts de technologies vers ces pays, notamment dans les 2 domaines essentiels de l'information et des biotechnologies. Nous devons comprendre que, compte tenu de l'écart de développement entre les pays les plus pauvres et les plus riches, il n'est ni possible ni souhaitable de laisser les seules lois du marché régir les relations économiques et commerciales entre le monde développé et le Tiers Monde. Comme viennent de le faire les grandes firmes pharmaceutiques en Afrique, pour les médicaments contre le SIDA, et les grands éditeurs scientifiques, pour l'accès des pays pauvres à des conditions préférentielles à l'information, il faut que nous acceptions, que nous organisions, et que nous favorisions ce nouveau cadre souple et adapté de participation privée au décollage économique des pays les plus pauvres. Loin d'être une dépense à fonds perdu, ou un acte de charité, il s'agit d'un investissement indispensable et d'un pari sur l'avenir et sur les potentialités créatrices des 10 milliards d'hommes qui vont construire ce siècle.

René TRÉGOUËT

Sénateur du Rhône

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