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Edito : UMTS : Une très bonne décision mais il reste encore beaucoup de chemin à parcourir

La décision prise par le Gouvernement français, cette semaine, de diviser par 8 le coût de la licence UMTS et d'appuyer dorénavant les recettes de cette nouvelle technologie sur les résultats réels des opérateurs va dans le bon sens. Mais que de temps perdu. Je suis d'autant plus heureux de cette décision qu'à ma connaissance @RT Flash est la seule lettre d'information, la seule chronique régulière française, même si nous y incluons les journaux et la télévision, qui a dit, très clairement, dès le 13 mai 2000 (voir mon éditorial dans @RT Flash n° 97 http://www.tregouet.org/lettre/2000/LETTRE97-Au.html ) que la mise aux enchères des fréquences UMTS serait une erreur. Mais malheureusement, cette décision du Gouvernement arrive dans un environnement politique et économique particulièrement déplorable et surtout n'a pas été coordonnée, comme je le recommandais dans mon éditorial du 8 septembre dernier (voir mon éditorial dans @RT Flash n° 159 http://www.tregouet.org/lettres/rtflashmail.asp?theLettre=167 ) avec l'ensemble des Gouvernements européens et principalement les Gouvernements anglais et allemand qui ont bénéficié des enchères les plus élevées, donc qui pèsent le plus lourd sur l'avenir de la démarche. Ce manque de coordination entre les gouvernements risque malheureusement, au niveau financier, de transformer en flop la bonne volonté française. En effet, notre grand opérateur national, France Télécom, qui a dû lourdement s'endetter pour conserver son rang dans le concert européen de cette course effrénée au téléphone mobile de 3e génération ne voit sa situation que légèrement s'améliorer suite à la décision française. Son endettement lié aux acquisitions de licences ou d'entreprises disposant de ces licences dans les autres pays européens reste le même. Nous arrivons même à une situation paradoxale. France Télécom, dont l'Etat français détient la majorité du capital, a un risque non négligeable d'être défavorisé par la récente décision du Gouvernement français si les autres gouvernements ne suivaient pas sa démarche volontariste. En effet, Vivendi Universal qui a obtenu la deuxième licence UMTS sur le marché français n'est pas lourdement engagé, pour cette nouvelle technologie à risque, sur les autres marchés européens. Aussi, proportionnellement, la récente décision du Gouvernement français favorise beaucoup plus le concurrent totalement privé qui voit l'économie de son entrée sur le marché UMTS profondément bouleversée alors que pour France Télécom, même si la bouffée d'air n'est pas négligeable, ne voit pas pour autant son horizon nettement s'éclaircir tant ses engagements restent lourds dans les autres pays. Ce déséquilibre, en France, entre l'opérateur national, France Télécom, et ses concurrents risquerait de s'accentuer si, lors du second tour qui va prochainement être organisé par l'ART, ce sont des groupes non lourdement endettés qui remportaient les deux autres fréquences UMTS encore disponibles. Ceci montre bien que la décision politique comme toute décision lourde de conséquences doit toujours être prise au moment opportun et non à contretemps. Mais comme je l'ai dit dans ces pages à de nombreuses reprises, l'attribution des fréquences n'est qu'une phase passagère, essentielle certes, mais qui n'est pas suffisante pour déterminer l'avenir de l'UMTS. Il va falloir maintenant que cette technologie tienne ses promesses techniques, ce qui est encore loin d'être confirmé et surtout que l'ensemble du marché s'organise pour que les Français s'approprient les usages nouveaux de cette téléphonie mobile. Pour le premier point, je fais totalement confiance aux ingénieurs et techniciens: je suis convaincu qu'ils y parviendront. Mais alors que toute la problématique va être remise à plat dans notre Pays, il est nécessaire que nous soyons réellement avertis sur les caractéristiques réelles qui devraient être atteintes et sur le calendrier réaliste de parfaite mise au point de cette nouvelle technologie qui devrait être, selon les informations dont je dispose en cet instant, plus proche de 2005 que de 2002 comme il est encore parfois annoncé actuellement. Le second point : celui de l'acquisition des usages de l'UMTS par une majorité de français comme ils l'ont fait pour le GSM est beaucoup plus difficile à résoudre. Comme je le disais encore dans ces colonnes le 9 septembre dernier, l'accès à Internet sur des postes mobiles passe nécessairement par une acquisition préalable, dans de bonnes conditions techniques et financières, de ces habitudes de navigation sur la Toile, sur des postes fixes. En effet, l'interface homme-machine n'étant pas encore opérationnelle, même sur les mobiles les plus évolués qui demain supporteront les technologies UMTS, il n'est pas imaginable, pour l'instant, que nous puissions, dans un avenir proche, avec la même facilité, naviguer sur notre téléphone portable comme nous le faisons aujourd'hui à partir de notre micro-ordinateur. C'est pourquoi, loin d'opposer la démarche UMTS aux accès Internet s'appuyant sur les autres technologies (ligne téléphonique, ADSL, Câble, BLR, etc...) il faut au contraire, si nous voulons que la démarche UMTS soit un succès, ce qui est loin d'être gagné, que les Pouvoirs Publics entreprennent tout pour inciter les Français à accéder, sans retard, à la planète Internet. Il faut ainsi que le Gouvernement, en remettant à plat le Contrat de Plan, arrêté avec les Régions, lance avec l'ensemble des collectivités françaises (Régions, Départements, Communes) un vaste et ambitieux plan d'équipement de la France pour que l'ensemble des Français puissent rapidement accéder au large débit. C'est par là que passe l'avenir de notre Pays et il faut bien que nous ayons conscience que l'avenir de nos enfants en dépend. En effet, nous ne pouvons pas rester en l'état actuel. Alors que la France est déjà très mal classée dans le concert mondial de l'accès à Internet, nous venons d'apprendre que pour la première fois, le nombre de Français accédant à la Toile avait (provisoirement je l'espère...) baissé dans ces derniers mois. C'est un véritable coup de semonce qui est adressé là au Gouvernement et à l'Autorité de Régulation des Télécommunications. Le coût global d'accès à Internet est trop élevé en France dès que nous dépassons un certain nombre d'heures de navigation mensuelle. Il est urgent que l'accès illimité à Internet soit enfin abordable pour le plus grand nombre. L'expérience des autres pays nous montre que c'est la voie la plus efficace pour inciter le plus grand nombre à accéder à Internet. Or, dans quelques jours, l'ART va devoir se prononcer sur les coûts d'interconnexion au réseau de France Télécom qui définissent le prix que peuvent proposer les fournisseurs d'accès à Internet à leurs abonnés. Si dans le droit fil de ce que vient de décider, avec retard mais avec sagesse le Gouvernement, l'ART décidait de baisser très sensiblement ces coûts d'interconnexion au réseau, je suis convaincu que ce serait un signe très fort pour favoriser un large déploiement d'un accès illimité à Internet et faire entrer enfin les Français dans ce monde nouveau.

René TRÉGOUËT

Sénateur du Rhône

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