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Certains antidépresseurs pourraient affecter la connectivité des neurones

Des chercheurs américains de la Johns Hopkins Bloomberg School of Public Health indiquent avoir réussi à cultiver, en laboratoire, des cerveaux miniatures dérivés de cellules souches humaines. Ils les ont ensuite utilisés afin de démontrer comment la paroxétine, fréquemment utilisée pour traiter la dépression lors de la grossesse, nuit au développement des cerveaux des bébés.

Selon ces scientifiques, ces "mini-cerveaux" humains, appelés BrainSpheres, pourraient permettre de tester plus facilement et avec plus de précision les effets des médicaments et des produits chimiques sur le cerveau humain. Ils pourraient aussi constituer une excellente alternative aux expérimentations animales, "coûteuses, chronophages et pas forcément adaptées à la physiopathologie humaine", notamment lorsqu'elles sont menées avec des souris, écrivent les chercheurs dans leur étude.

La première étape de ces travaux a consisté à prélever des cellules - le plus souvent de peau - sur des humains, détaillent les scientifiques. Ils les ont transformées en cellules souches puis, grâce à un traitement biochimique, en cellules cérébrales. Les minuscules amas de tissu, à peine visibles à l'œil nu, se sont ensuite développés pour former, pendant quelques mois, une structure rudimentaire simulant le développement d'un jeune cerveau humain. En d'autres termes, les BrainSpheres ont créé des mécanismes proches de ceux de cerveaux de bébés se trouvant dans le ventre de leur mère.

« Il existe une crainte selon laquelle une épidémie de troubles neurodéveloppementaux, dont l'autisme, soit sur le point d’apparaître », indique Thomas Hartung, professeur au département de santé et d'ingénierie environnementales de Johns Hopkins, directeur du Centre pour les alternatives aux tests sur les animaux de la Bloomberg School et co-auteur de l'étude. « L'une des hypothèses est que cette épidémie pourrait être provoquée par des médicaments ou d'autres produits chimiques, mais comme les tests traditionnels sur les animaux sont très coûteux, nous n'avons jusqu'à maintenant pas été en mesure d'étudier correctement cette question », ajoute le chercheur.

Poursuivant leur enquête, Thomas Hartung et son équipe ont voulu tester l'effet de la paroxétine - également commercialisée sous les noms de Paxil, Deroxat ou Divarius - sur leurs BrainSpheres. Cet antidépresseur présente un double intérêt : il appartient à la catégorie des inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS), qui figurent parmi les médicaments les plus couramment prescrits dans le monde. « Ils représentent au moins des centaines de millions d'ordonnances par an », écrivent les auteurs de l'étude.

Cette molécule, qui peut traverser le placenta, est également connue pour augmenter les risques de malformations cardiaques et pulmonaires lors de la grossesse. Certaines études épidémiologiques ont également suggéré que la paroxétine augmenterait le risque d'autisme parce qu'elle pourrait ralentir le développement neurologique des bébés.

Les chercheurs ont donc exposé les mini-cerveaux à différents dosages de paroxétine, pendant huit semaines. Les deux concentrations utilisées - légère et élevée - correspondaient au niveau que l'on peut retrouver dans le sang d'une personne adulte sous traitement. Selon leurs résultats, la paroxétine n'a pas d'effet destructeur significatif sur les neurones à faible dose. Mais à dose plus élevée, elle réduit les niveaux d'une protéine appelée synaptophysine, un composant clé des synapses, jusqu'à 80 %.

Les chercheurs ont également constaté que cet antidépresseur réduit la croissance normale des neurites, des excroissances cellulaires des neurones et que les mini-cerveaux exposés à cette molécule produisaient entre 40 et 75 % d'oligodendrocytes - des cellules cruciales pour le bon "câblage" du cerveau - en moins.

Ces résultats suggèrent que la paroxétine entrave la formation normale des interconnexions entre les neurones en développement, ce qui pourrait être à l'origine de l'autisme ou de troubles neurologiques. « Dans ce rapport, nous avons pu montrer que les tests effectués sur des mini-cerveaux peuvent révéler des effets neurodéveloppementaux relativement subtils et pas seulement des effets évidents, d'une substance chimique », affirme Thomas Hartung.

Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash

FCN

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