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Les mondes virtuels génèrent des emplois bien réels

La très bucolique boutique de Kasi Nafus est installée au bord d'un ruisseau où vient s'abreuver un zèbre. Mais rien n'existe vraiment, car elle vend des vêtements imaginaires destinés aux habitants virtuels d'un univers en ligne, un jeu de rôle en réseau nommé Second Life. Si Kasi Nafus est en chair et en os et habite Seattle, elle gagne sa vie dans le monde du virtuel, lequel génère des millions de dollars bien réels. Les vêtements vendus par Nafus n'existent pas réellement. Ils sont destinés à couvrir les corps virtuels que les joueurs se fabriquent dans Second Life. Mais pour autant, l'activité commerciale de sa boutique, baptisée Pixel Dolls, est bien réelle et représente un emploi à temps complet pour Nafus. "Ce n'est pas quelque chose que me permettra de devenir immensément riche, mais cela me permet de vivre", souligne la jeune femme de 27 ans, qui n'a pas précisé le montant de ses revenus.

On estime que 20 millions de personnes dans le monde s'adonnent aux jeux de rôle massivement multi-joueurs sur Internet (MMORPG), des espaces virtuels qui représentent une activité économique en pleine croissance. Second Life possède sa propre devise convertible en dollars selon un taux de change variable. Les utilisateurs peuvent acheter de la monnaie virtuelle en utilisant leur carte bancaire, puis la vendre pour obtenir de vrais dollars. Ses 60.000 utilisateurs échangent deux millions de dollars (1,7 million d'euros) par mois, donnant à Second Life un poids économique équivalent à celui des Tuvalu, petit Etat insulaire du Pacifique. Une centaine d'emplois sont liés au jeu, souligne Philip Rosedale, patron de la société Linden Research, qui a créé Second Life. Certains conçoivent des bâtiments virtuels, d'autres des séquences de mouvements qui permettent à des corps virtuels de danser ou d'accomplir des actions complexes. Il y a même un journaliste virtuel employé par Linden Research.

Edward Castronova, économiste de l'université de l'Indiana, estime que les sommes bien réelles générées par les mondes virtuels se montent à au moins 100 millions de dollars (84 millions d'euros) cette année, voire beaucoup plus. Il y a quatre ans, il a mené une étude sur des adeptes du jeu en ligne Everquest, et a découvert que 39% d'entre eux étaient prêts à quitter leur emploi ou arrêter leurs études pour gagner leur vie dans le monde virtuel...

Kasi Nafus explique qu'avant d'ouvrir sa boutique dans Second Life, elle passait déjà l'équivalent d'une semaine de travail sur le jeu. Concevoir des vêtements virtuels est une tâche très prenante, même s'ils en restent au stade du design sans l'étape réalisation : elle passe beaucoup de temps à créer le "tissu" des habits à l'aide d'un logiciel. Elle vend ses créations un dollar pièce, pour les plus courantes, et cinq dollars pour les éditions limitées. La plupart des emplois virtuels sont très différents de celui de Kasi Nafus. Second Life est un monde étrange dont les habitants ont une grande liberté pour façonner leur univers et créer des objets.

Mais les jeux en réseau les plus populaires sont centrés sur le combat, et sont donc plus limités en terme de créativité. Une partie des emplois créés par ces jeux sont "délocalisés" à l'étranger. "Je tue des monstres", souligne Ilin Aurel, de Caracal, petite ville de Roumanie. "C'est très amusant." Cet adolescent de 19 ans gagne 200 dollars (168 euros) par mois, un bon salaire en Roumanie. Il est employé par le site américain Gamersloot.net, basé à Sunnyvale en Californie. Le bureau roumain de la société fonctionne jour et nuit. Il emploie des joueurs chargés de collecter de l'or et d'autres richesses virtuelles, qui sont ensuite vendues sur le site de Gamersloot à des gens prêts à dépenser de l'argent bien réel pour... enrichir leurs avatars virtuels.

AP

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