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Le méthane pourrait-il déstabiliser le climat ?

Le réchauffement climatique pourrait libérer les énormes quantités de méthane emprisonnées dans les sols gelés, provoquant en quelques décennies un processus d'emballement incontrôlable de l'effet de serre. Une nouvelle étude publiée par Nature indique que ce scénario catastrophe s'est peut-être déjà déroulé par le passé. Cette étude décrit le pire scénario d'emballement de l'évolution du climat dans lequel la Terre pourrait perdre la totalité de ses glaces en l'espace d'une génération.

Si la température du globe continue d'augmenter, d'énormes quantités de méthane pourraient être libérées par les 10 000 gigatonnes de gaz gelé qui sont à l'heure actuelles emprisonnées dans les profondeurs des océans et le pergélisol. Le franchissement de ce seuil de basculement du climat aurait pour conséquence que le réchauffement de la planète serait alors bien pire et bien plus rapide que ce qu'envisagent aujourd'hui les prévisions des scientifiques.

Cette nouvelle étude suggère que c'est précisément ce type de processus libérant les réserves de méthane qui a provoqué un réchauffement rapide de la Terre il y a 635 millions d'années de cela, durant lequel un âge glaciaire a laissé place à une période de chaleur tropicale. Le principal auteur de l'étude indique que ce phénomène pourrait se reproduire, et rapidement. Il ne s'agirait pas d'une évolution sur des milliers ou des millions d'années, mais peut-être à l'échelle du siècle.

« C'est un une préoccupation majeure, car il est possible qu'un réchauffement de faible ampleur puisse libérer ce méthane piégé », déclare Martin Kennedy, qui est professeur à l'Université Californienne Riverside. « La libération de ces réserves de méthane pourrait réchauffer la Terre de dizaines de degrés Farenheit et ce mécanisme pourrait être très rapide, à l'échelle géologique». Le méthane est un gaz dont l'effet de serre est 25 fois plus puissant que celui du dioxyde de carbone. Et ces réservoirs de gaz gelé sont deux fois plus importants en volume que les réserves de combustibles fossiles connues.

M. Kennedy, tout comme d'autres géologues, tout en reconnaissant l'importance des gaz à effet de serre dus à de l'activité humaine, affirme que les modélisations ne peuvent rendre compte des changements climatiques très marqués qui se produisent en quelques décennies. « Aucune de ces choses n'est linéaire. C'est du non-linéaire », constate M. Kennedy. Le travail de M. Kennedy publié par Nature étudie la période de déglaciation rapide qui s'est déroulée voici 635 millions d'années, et s'efforce de déterminer quel a été le « déclencheur » à l'origine du réchauffement massif qui a eu lieu dans le monde entier. Dans le scénario proposé par son étude, le méthane à l'état solide - emprisonné avec des molécules d'eau dans des formations cristallines nommées « clathrates » - a d'abord été décongelé aux latitudes des tropiques et a commencé à se répandre dans l'atmosphère. Le réchauffement induit par ce gaz a déclenché une cascade de déstabilisation des clathrates, remontant peu à peu vers les pôles, agissant comme un mécanisme de rétroaction produisant un emballement qui a rapidement transformé un climat glacial en période tropicale.

A l'heure actuelle, les clathrates sont présentes dans le pergélisol de la région Arctique et dans les fonds marins près des continents. Le professeur s'inquiète que la hausse des niveaux de CO2 puisse provoquer un réchauffement suffisant pour déstabiliser ces réservoirs de clathrates. Sur la base de son analyse des données géologiques, cela pourrait entraîner une évolution du climat plus rapide que ce que la plupart des scientifiques prévoient. Il serait alors difficile pour l'humanité d'y faire face.« Si la Terre évolue vers un nouvel état, cela se déroulera très rapidement », avertit M. Kennedy.

Nature

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