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L’hélium se lie au sodium à haute pression

Dans le tableau périodique des éléments, l’hélium occupe la dernière colonne, celle des éléments nobles. À ce titre, il est chimiquement inerte : il ne se lie pas aux autres éléments. Il est même le plus inerte des gaz nobles du fait de la très grande stabilité de son cortège électronique. Pourtant, une équipe internationale menée par Artem Oganov, de l’Université Stony Brook, aux États-Unis, aurait mis en évidence deux molécules stables comprenant un atome d’hélium et des atomes de sodium.

Ces dernières décennies, les physiciens et les chimistes ont mis en évidence plusieurs molécules contenant de l’hélium. Le composé HeH+ est stable, mais seulement lorsqu'il est ionisé. D’autres sont métastables : HHeF, (HeO)(CsF) ou LiHe. Il existe aussi des composés dit de van der Waals, dont les atomes sont reliés par des interactions très faibles, qui sont stables à basse température, tel NeHe2. Il existe aussi des complexes d’inclusion où un système hôte accueille un atome d’hélium, mais comme ce dernier n’a pas d’effet sur la structure électronique de l’hôte, il ne s’agit pas exactement d’une molécule.

Une façon d’obtenir des composés stables est d’augmenter la pression. En 2002, Benny Gerber, de l’université hébraïque à Jérusalem, et ses collègues ont montré théoriquement que la molécule HHeF pourrait être stable à des pressions supérieures à 23 gigapascals. Avec la même approche, Artem Oganov et ses collègues ont donc étudié la possibilité de former des composés stables d’hélium avec d’autres éléments (H, O, F, Na, K, Mg, Li, Rb, Cs, etc.).

Ils ont montré que le sodium semble pouvoir s’y lier de façon stable. À partir d’une analyse numérique, les chercheurs ont trouvé que le composé Na2He se formerait au-dessus de 160 gigapascals. Sa structure serait semblable à celle de la fluorine (CaF2) : elle ressemble à un échiquier tridimensionnel où chaque intersection est occupée par un atome de sodium et chaque case est alternativement occupée par un atome d’hélium ou une paire d’électrons.

Les atomes d’hélium ne se lient pas vraiment avec les autres, mais leur présence influe de façon importante sur les atomes de sodium et conduit à cette forte localisation des paires d’électrons. Cette configuration particulière fait que le composé est un isolant électrique. C'est aussi un composé ionique qualifié d’électride, dans lequel le sodium est le cation et les paires d’électron forment l’anion.

Sous la direction d’Alexander Goncharov, de l’institut Carnegie pour la science, à Washington, les chercheurs ont utilisé une presse de diamant pour synthétiser Na2He. Celui-ci se serait formé à partir de 113 gigapascals. La difficulté des mesures de diffraction aux rayons X rend cependant d'autres expériences nécessaires pour confirmer définitivement la formation de ce composé.

Par ailleurs, les chercheurs ont introduit des atomes d’oxygène dans le milieu pour créer un autre composé. L’oxygène étant un accepteur d’électrons, il prend ainsi la place des paires d’électrons dans le réseau. Ce système serait stable pour des pressions comprises entre 15 et 106 gigapascals.

L’hélium est le deuxième élément le plus abondant dans l’Univers. Il est présent en quantité dans les planètes géantes gazeuses telles Jupiter ou Saturne, au cœur desquelles la pression peut atteindre plusieurs milliers de gigapascals. La découverte de ces molécules contenant de l’hélium pourrait aider à comprendre la structure interne de ces planètes.

Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash 

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