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Les robots de service cherchent du travail à domicile

Sur l'écran d'une tablette tactile, une dame âgée sélectionne un jus de pomme. Aussitôt, le Care-O-Bot commence son lent périple vers son objectif : le réfrigérateur. Là, il ouvre la porte à l'aide de son bras mécanique, saisit le pack de jus de pomme, le pose sur sa tablette intégrée, referme la porte, prend un verre sur l'évier, le met à côté du jus de pomme et revient vers la dame qui l'attend, assise sur son canapé. .. "Il ne peut pas encore remplir le verre", s'excuse Kai Pfeiffer, ingénieur en robotique à l'Institut allemand Fraunhofer. Pendant la démonstration, présentée lors du Symposium international de la robotique 2004 (ISR), qui s'est tenu à Paris-Nord Villepinte du 23 au 26 mars, plusieurs robots mobiles sillonnent le stand en silence. "Nous travaillons sur des applications d'accueil dans les musées ou de surveillance dans les maisons", explique M. Pfeiffer. Les engins mobiles se distinguent par leur aspect résolument non anthropomorphe. "S'ils ressemblaient trop à un être humain, ils seraient plus difficilement acceptés", indique l'ingénieur. Pour surmonter cet obstacle décisif pour l'avenir de la robotique domestique, les chercheurs du Fraunhofer soignent la relation homme-machine. L'interface n'impose pas le moindre apprentissage. En cas de doute lors de la sélection de la boisson, le Care-O-Bot prend une photo et l'envoie à l'utilisateur afin qu'il confirme son choix. Mais cette convivialité, tout comme la variété des tâches à accomplir, multiplie les capteurs, caméras, scanners laser 3D, détecteurs optiques de distance intégrés aux doigts ou limiteurs de force... Malgré cet effort d'intégration dans la vie quotidienne, le Fraunhofer n'a pas trouvé d'entreprise intéressée par la commercialisation de ses robots de service. Une difficulté révélatrice de l'obstacle que rencontre la robotique pour sortir des usines dans lesquelles elle s'est introduite dès les années 1960, avec un développement rapide à partir des années 1980. Encore que, même dans les ateliers, les robots n'ont pas pris la place que Karel Capek, l'inventeur du mot en 1921 dans sa pièce de théâtre RUR, leur prédisait. S'ils se sont imposés dans certaines applications comme le soudage, la manutention de pièces lourdes ou l'alimentation de machines-outils, d'autres lui échappent encore, dans l'assemblage par exemple. En dehors des usines, l'invasion des robots reste du domaine de la science-fiction. Les amateurs d'automatismes se substituant à l'homme doivent se contenter de machines spécialisées telles que l'aspirateur Trilobite et la tondeuse Automower d'Electrolux. C'est en effet par le nettoyage et le transport que la robotique tente une percée dans la maison, lieu de toutes les convoitises. Pour l'instant, les perspectives restent extrêmement modestes. En 2003, la Fédération internationale de robotique (IRF) estimait les besoins mondiaux de robots de service à 30 000 unités sur trois ans... Pourtant, dès 1989, les premiers robots de nettoyage apparus dans le métro parisien avaient fait naître bien des espoirs chez les industriels. A l'époque, environ 300 robots Cab, à 75 000 euros pièce, étaient prévus pour nettoyer les stations. Aujourd'hui, cette tâche est redevenue simplement mécanisée. L'une des entreprises survivantes de la robotique française, Robosoft, qui était impliquée dans le projet du métro parisien, ne jette pourtant pas l'éponge. Elle mise aujourd'hui sur les robots de transport de personnes et va lancer, à l'automne, son robuCAB, destiné aux sites propres (hôpitaux, entreprises...). Son président, Vincent Dupourqué, tire son optimisme de la réussite d'entreprises américaines telles qu'iRobot, créée en 1990 par Rod Brooks, Colin Angle et Helen Greiner, trois diplômés du laboratoire d'intelligence artificielle du Massachusetts Institute of Technology. Les fondateurs d'iRobot affichent aujourd'hui quatre objectifs : fabriquer des produits "cool", gagner de l'argent, s'amuser et... changer le monde. L'entreprise a fait partie, en 2003, des 50 sociétés sélectionnées par la revue Scientific American. Son succès repose sur le lancement du premier aspirateur robotisé, le Roomba Floorvac, en 2002, qui est vendu 200 dollars, contre 1 600 euros pour la Tribolite d'Electrolux et son concurrent, le Robot Cleaner RC 3000, de Karcher. Le Roomba a la forme d'une soucoupe volante de 30 cm de diamètre et 9 cm de hauteur pour un poids de 3,4 kg. Sa batterie rechargeable lui permet de travailler pendant 60 minutes sur de la moquette et 90 minutes sur un sol dur. iRobot privilégie la simplicité. Le Roomba procède par cercles concentriques à partir de son point de départ et rebondit sur les obstacles. La domestication des robots de service pourrait ainsi passer par cette approche réaliste qui, si elle limite les performances, réduit considérablement le coût. Les robots de pure distraction, tels que le chien Aibo et l'humanoïde Qrio, de Sony, ou le chat Necoro, d'Omron, supportent plus facilement les imperfections lorsqu'ils se contentent de danser ou de jouer à la balle. Mais leur succès commercial peut contribuer à rendre moins perturbante la présence d'un robot dans le milieu familial. Et préparer ainsi la maisonnée à accueillir, un jour, un robot à tout faire...

Le Monde : http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3244,36-359230,0.html

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