Nous en avons tous fait l'expérience. Nous arrivons dans un endroit bruyant, un bar ou un restaurant par exemple. Nous captons d'abord un brouhaha informe. Mais très rapidement, nous sommes capables de nous focaliser sur une conversation particulière et de la suivre sans être gênés par le bruit ambiant pourtant important.
Depuis plus de 50 ans, les scientifiques essayent de comprendre comment notre cerveau parvient à accomplir quotidiennement cette prouesse. Des scientifiques américains de l'Université de Columbia viennent peut-être d'éclaircir ce mystère. Ces chercheurs ont enregistré l'activité cérébrale de six patients, à l'aide d'électrodes intracrâniennes. Les participants ont ensuite été invités à visionner deux films dans lesquels ils pouvaient voir et entendre un homme (dans le premier film) puis une femme (dans le deuxième film) leur raconter une histoire. Ensuite, ils devaient regarder en même temps ces deux films en essayant de se concentrer sur une seule voix.
Comme le souligne Charles Schroeder, responsable de cette étude, "nous savons que les aires sensorielles du cerveau ne filtrent pas les voix, mais les traitent simultanément. Il nous restait à comprendre comment, malgré tout, le cerveau parvient à filtrer très efficacement les informations sonores provenant de l'environnement pour se focaliser uniquement sur une voix".
L'étude montre que l'analyse de l'ensemble des informations sonores parvenant au cerveau s'effectue grâce à des groupes spécialisés de neurones des aires sensorielles, chacun de ces groupes prenant en charge le traitement de l'information correspondant à une voix.
Concrètement, chaque groupe de neurones, après un temps assez court d’adaptation, va synchroniser son activité sur le rythme du signal sonore interprété, en l'occurrence dans cette expérience, une voix humaine. C'est seulement ensuite que d'autres centres cérébraux vont prendre le relais pour trier et hiérarchiser cette information en fonction des critères que notre cerveau aura formulés.
L'étude américaine montre que les groupes de neurones spécialisés qui reçoivent les informations sonores ont la capacité de se "caler" très rapidement sur les caractéristiques physiques et le rythme de la voix qui nous intéresse. C'est cette capacité qui leur permet d'extraire avec une grande efficacité le signal intéressant, même lorsqu'il est noyé dans un fort bruit ambiant.
Ces travaux confirment également que la diminution de la capacité auditive qui accompagne souvent le vieillissement est également liée à la perte de cette faculté cérébrale qui nous permet de nous focaliser très vite sur une voix.
Ces recherches pourraient donc déboucher sur la conception de prothèses auditives beaucoup plus performantes permettant aux personnes malentendantes de filtrer et sélectionner les informations auditives qui les intéressent dans un environnement fortement bruité, ce qui n'est pas possible avec les systèmes actuels.
Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash