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Le déroulement du « Big bang » confirmé en laboratoire

Des chercheurs du Helmholtz-Zentrum Dresden-Rossendorf de Dresde (Allemagne) ont réussi à recréer les conditions régnantes 2 à 3 minutes après le Big bang, et confirmé un phénomène jamais observé directement jusque-là. Nous connaissons tous le Big bang, cette naissance "explosive" de l'Univers - avec son espace-temps et sa matière-énergie - voici 13,8 milliards d'années, à partir d'une fluctuation quantique du vide. Puis son expansion et refroidissement progressifs...

Le modèle est encore considéré comme une hypothèse et contient un grand nombre d'inconnues, voire de contradictions avec les observations, mais il est majoritairement accepté par les cosmologistes - une minorité explorant des hypothèses alternatives comme le Big bounce (le Grand rebond) sans Big bang.

Or une équipe internationale de chercheurs vient de recréer en laboratoire les conditions physiques qui régnaient entre 2 et 3 minutes après l'événement, afin de clarifier la valeur de paramètres ignorés et de tester la cohérence du modèle. Résultat : on connaît un peu mieux les processus à l'origine de notre Univers actuel.

L'objet de l'étude est le deutérium, un atome atypique mais relativement stable créé exclusivement dans ce court laps de temps, comme l'hydrogène et l'hélium, puis détruit ensuite... mais dont il reste des traces aujourd'hui : il y a 1 atome de deutérium pour 50 000 atomes d'hydrogène - soit 32,4 g/m3 dans l'eau de mer, et quelques grammes dans nos corps.

De fait, 10 secondes après le Big bang, l'Univers, extrêmement chaud et dense mais déjà en phase d'expansion et refroidissement, contenait une soupe de protons (88 %) et neutrons (12 %) : c'est le début de la phase de nucléosynthèse primordiale.

Dans cette soupe chaude et dense, les rencontres entre particules étaient intenses : des protons fusionnaient entre eux ou avec des neutrons pour former principalement les premiers éléments du tableau périodique : l'hydrogène (1 proton), l'hélium (2 protons, et 1 ou 2 neutrons), le lithium (3 protons et 3 ou 4 neutrons)... et du deutérium : 1 proton et 1 neutron.

Mais voilà, si les grands gagnants de cette synthèse de noyaux atomiques ont été l'hydrogène, l'hélium (et le lithium), c'est que le deutérium, moins stable que les autres, s'est vite recombiné avec des protons pour former davantage d'hélium et de lithium, ne laissant de son éphémère existence que des traces.

Puis, à cause du refroidissement et de l'expansion, l'énergie pour fusionner et la fréquence des rencontres se sont raréfiées, figeant ces processus... avant que les étoiles ne reprennent l'œuvre de création de noyaux plus lourds plusieurs millions d'années plus tard. Ce processus précoce fait partie de la narration du modèle du Big bang : on y déduit le taux de création et destruction de deutérium sur la base exclusivement des valeurs de la densité et de la température de l'Univers à cette époque - et des propriétés physiques du deutérium.

Également, ce taux de création/destruction du deutérium estimé par le modèle du Big bang a été calculé pour être cohérent avec la suite de l'évolution de l'Univers. On comprend que cela manque de robustesse. Jamais jusqu'ici on n'avait pu confirmer expérimentalement le déroulement imaginé dans le cadre du modèle - lequel se base sur de nombreuses hypothèses.

Les chercheurs ont donc mis du deutérium dans les conditions du "Big bang + 3 minutes". Ils l'ont fait dans un accélérateur de particules, le Laboratory for Underground Nuclear Astrophysics (LUNA) du Laboratoire national du Gran Sasso en Italie, enfoui à 1400 mètres sous la cime d'une montagne afin d'éviter les interférences avec des particules et rayonnements cosmiques pouvant fausser les mesures.

Ils ont alors bombardé un gaz de deutérium avec 100 milliards de protons par seconde et capté leur taux de fusion (une poignée par jour) grâce à la mesure des rayons X et gamma dégagés par la réaction, grossièrement : Deutérium + proton = Hélium-3 + photons (rayons). Résultat : le taux de fusion du deutérium avec des protons, conduisant à la création d'hélium et lithium, a coïncidé avec l'estimation du modèle du Big bang et de la mesure du rayonnement de fond.

Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash

Nature

HZDR

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