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Le CERN fournit une mesure précise de la masse du boson W !

Le boson W est une particule fondamentale, un « boson de jauge » porteur de l’interaction faible. C’est l’une des quatre interactions fondamentales de la nature, responsable de la désintégration radioactive de particules subatomiques. Il est à l’origine de nombreux processus nucléaires, y compris la fusion nucléaire qui se déroule au cœur des étoiles. Depuis sa découverte en 1983 par une équipe du CERN, les scientifiques continuent les expérimentations afin de comparer ses propriétés, en particulier sa masse, avec les prédictions théoriques. Et pour cause : tout écart par rapport à la valeur théorique pourrait suggérer l’existence d’une physique et de phénomènes encore inconnus. Ils remettraient alors en question le modèle standard de la physique des particules…

Grâce à l’amélioration des techniques d’analyse de données, les physiciens sont parvenus à effectuer des mesures de plus en plus précises de la masse du boson W. Mais, en 2022, une annonce vient ébranler toute la communauté scientifique. Après dix ans de calculs, les chercheurs de la collaboration Collider Detector du Fermilab de Chicago affirment avoir mesuré expérimentalement, dans le TeVatron, une masse de 80,433 ± 0,009 GeV – soit une valeur très différente de la valeur théorique. Or, l’incertitude de cette mesure est deux fois moins importante que celle de la mesure du CERN. Ce résultat inattendu soulevait donc la possibilité d’une toute nouvelle physique influençant la masse des particules.

Le mois dernier est cependant survenu un nouveau rebondissement. Le boson W a fait l’objet d’une nouvelle mesure au CERN, via l’expérience ATLAS. La masse obtenue s’est avérée nettement plus proche de la valeur théorique. Les chercheurs rapportent cette fois-ci une masse de 80,360 ± 0,016 GeV. Ceci constitue une mesure près de 16 % plus précise que leur précédent résultat. La collaboration ATLAS a publié en 2018 les résultats de sa première mesure de la masse du boson W. Celle-ci reposait sur un échantillon de bosons W enregistrés en 2011, alors que le LHC fonctionnait à une énergie de collision de 7 TeV. Les chercheurs ont entrepris d’analyser une nouvelle fois cet échantillon de 14 millions de candidats bosons W produits lors de collisions proton-proton, en améliorant la précision de la mesure.

Ils ont notamment mis en œuvre une technique avancée d’ajustement. Ils ont également créé des versions améliorées de ce que l’on appelle "les fonctions de distribution de partons du proton". Les partons sont des sous-particules indépendantes composant les hadrons, tels que les protons et les neutrons. Ces fonctions décrivent la répartition de l’impulsion du proton entre les quarks et les gluons qui le constituent. L’équipe a également vérifié la description théorique du processus de production du boson W.

Cette masse est particulièrement difficile à déterminer. Non seulement il faut 10 millions de collisions pour produire un seul boson W, mais cette particule se désintègre aussitôt qu’elle est créée ! Il est donc impossible de déterminer sa masse directement. Les physiciens parviennent à l’estimer à l’aide des particules qui résultent de sa désintégration. Il s’agit ainsi d’un neutrino accompagné d’un électron ou d’un muon. Or, les neutrinos sont eux aussi indétectables ! Pour corriger les calculs, les scientifiques s’appuient donc sur des simulations complexes. « La mesure de la masse du boson W fait partie des mesures de précision les plus compliquées parmi celles qu’on peut réaliser dans les collisionneurs de hadrons. Elle requiert un étalonnage très précis des énergies et des impulsions des particules mesurées, ainsi qu’une évaluation attentive et une parfaite maîtrise des incertitudes de modélisation », explique Andreas Hoecker, porte-parole d’ATLAS.

Il ne s’agit bien entendu que d’une conclusion préliminaire, qui reste à confirmer. D’autres tests sont actuellement en cours sur des données plus récentes, obtenues par ATLAS, par le Solénoïde compact pour muons (CMS), ainsi que par le Large Hadron Collider beauty (LHCb). En attendant, cette nouvelle mesure correspond à tous les autres résultats qui ont été publiés jusqu’à présent, mis à part celui du Fermilab.

« Ce résultat mis à jour d’ATLAS constitue un test rigoureux. Il confirme la cohérence de notre compréhension théorique des interactions électrofaibles », a déclaré Andreas Hoecker. L’existence d’une nouvelle physique apparaît donc pour le moment peu probable. Le modèle standard de la physique des particules n’a encore jamais été mis en défaut. Il semble donc suffisamment robuste pour décrire tout l’univers qui nous entoure.

Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash

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