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A Brest, une digue houlomotrice vise à capter l’énergie des vagues et protéger le littoral

La protection des côtes face à la montée des eaux pourrait  bien faire enfin décoller les vagues en tant que source d’électricité renouvelable crédible ? C’est tout le pari d’un système d’un nouveau genre, dit « digue houlomotrice », dont un prototype - baptisé Dikwe - est en construction depuis le début de l’été en rade de Brest (Finistère). Conçu en collaboration par le groupe industriel Legendre et la société d’ingénierie spécialiste des énergies marines Geps Techno et l’Ifremer, l’ouvrage doit être finalisé dans quelques jours et pourrait préfigurer les barrages marins du futur, imaginent déjà ses concepteurs.

« L’énergie houlomotrice a du mal à émerger en raison des coûts d’opération et de maintenance », convient d’emblée Quentin Henry, chargé du projet Diwke chez Legendre. Ce dernier note que la construction de nouvelles digues, comme la réfection d’ouvrages anciens, devraient être dopées par le développement de ports pour la maintenance de l’éolien en mer, comme par la montée des eaux causée par le réchauffement climatique.

Reste que dompter l’énergie des vagues est un défi d’ingénierie, auquel se sont déjà heurtés un nombre incalculable de prototypes, rappelle Marc Le Boulluec, ingénieur en hydrodynamique des structures et référent du projet à l’Ifremer. « L’énergie de la houle qui arrive sur nos côtes et au large est colossale. Nous parlons de plusieurs kilowatts par mètres de côte. Mais il faut des structures, capables de résister aux conditions extrêmes qui surviennent dans les champs de vagues, et économiquement viables », explique le scientifique. Tout en notant qu’une digue houlomotrice, qui est un « dispositif bord à quai », est moins coûteuse à produire et plus aisée à maintenir qu’un dispositif houlomoteur en pleine mer.

Après avoir été testé en bassin dans les locaux de l’Ifremer, le prototype en cours de construction sera installé en pleine mer en rade de Brest, au sein de la station d’essai de l’Ifremer à Sainte-Anne du Portzic. Un site naturel qui permet à l’institut, en partenariat avec l’Institut Carnot Mers, de tester toutes sortes d’appareils innovants pour les énergies marines, tel qu'un prototype d’éolienne flottante à axe vertical de la jeune pousse Hydroquest. La digue aura la forme d’un canal de 4 mètres de haut, pour 4 de large et 6 de profondeur, fixé sur un support fixe métallique. Elle produira de l’ordre de « quelques kilowatts », estime Quentin Henry, sans donner davantage de précisions. Son activité sera suivie par une flopée d’instruments de mesure caractérisant les conditions météorologiques, la production d’énergie, ou encore les efforts sur la structure.

Concrètement, la digue amortira l’énergie des vagues grâce à un système de panneaux oscillants. « La digue comporte des caissons, intégrant chacun une zone d’eau, un volet oscillant et une plage en fond de chambre. Les vagues arrivent de face et entraînent la rotation des volets », décrit Marc Le Boulluec. De là, le couple est transmis à un piston, qui prend le relais et comprime un fluide pour entraîner une turbine et générer de l’électricité. Un système « déjà connu et utilisé au sein d’autres dispositifs houlomoteurs », souligne Quentin Henry.

Le prototype doit néanmoins fiabiliser le concept technologique. D’abord, Dikwe permettra de récolter davantage de données sur le fonctionnement réel d’une digue, notamment au niveau de l’intermittence d’une telle production électrique, très dépendante de la force des vagues, du vent et de l’amplitude des marées. Les tests en pleine mer seront aussi l’occasion de confirmer la résistance des panneaux oscillants, pour en caractériser l’usure et le bon fonctionnement du système de mise en sécurité des panneaux en cas de tempête, liste Quentin Henry.

Il faudra attendre un an pour savoir si le prototype, cofinancé par les régions Bretagne et Pays de la Loire ainsi que l’Ademe, tient ses promesses. Mais Quentin Henry se veut confiant. « Nous mesurons déjà l’intérêt des propriétaires portuaires. Beaucoup nous ont déjà contactés », confie-t-il, en estimant qu’à terme, une digue houlomotrice sera capable d’atteindre « facilement plusieurs mégawatts (MW) ». « Sur une zone exposée, il est possible de dépasser le MW avec 100 mètres de digues, et les digues portuaires peuvent faire plusieurs milliers de mètres », chiffre-t-il. Sans toutefois s’avancer à donner un coût de production, qu’il juge « peu pertinent au vu du modèle économique prévu », qui combine protection côtière et production d’énergie.

Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash

L'Usine Nouvelle

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