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Quand Darwin joue aux dames avec des ordinateurs neuronaux

Les jeux peuvent être chose sérieuse. Ils sont un moyen d'évaluer l'intelligence des ordinateurs par rapport à la nôtre. Deux informaticiens américains affirment, exemple à l'appui, que la meilleure méthode pour améliorer les performances intellectuelles des ordinateurs est celle qui a produit l'intelligence humaine : l'évolution selon Darwin. David Fogel, de la société Natural Selection Inc., de La Jolla (Californie), et Kumar Chellapilla, de l'université de Californie à San Diego ont " fait évoluer " un programme informatique capable de disputer une partie de jeu de dames anglaises d'un niveau élevé. Ils n'ont introduit dans l'ordinateur guère plus que les indications qu'on donne à un débutant, puis ils l'ont laissé créer divers algorithmes " (ensembles de données qui permettent de décider du coup suivant). Pour affiner ces algorithmes, issus de réseaux neuronaux mimant le fonctionnement du cerveau humain, ils les ont fait s'affronter dans une lutte où le meilleur survit. Le résultat est impressionnant : après deux cent cinquante générations issues d'une population initiale de quinze réseaux neuronaux, le meilleur de ces programmes a joué contre tous les adversaires humains désireux de relever le défi sur Internet. En 90 parties, le réseau neuronal s'est placé au " niveau A " du classement standard des joueurs de dames, juste après les experts et les maîtres. Mieux encore : il a réussi à battre un adversaire chevronné. Victoire d'autant plus remarquable que l'ensemble du processus évolutionniste n'a demandé que quelques jours de calcul à un ordinateur domestique (133 MHz), d'une puissance sans commune mesure avec des stations de travail utilisées fréquemment en intelligence artificielle. La méthode de Chellapilla et Fogel est très novatrice car elle consiste à laisser des algorithmes médiocres améliorer leurs capacités uniquement par l'expérience. Les deux chercheurs se contentent de " dire " à leurs programmes d'appliquer la stratégie d'un joueur modeste (un système de choix élémentaire connue des programmeurs sous le nom de " théorie Minimax "). Les programmes des deux Américains sont capables d'apprendre parce qu'ils sont incorporés à des réseaux neuronaux, qui fonctionnent à la manière du cerveau humain. Plutôt que d'indiquer pas à pas comment parvenir au résultat recherché, on fournit simplement des données à ces réseaux qui, suivant un processus d'apprentissage, comparent leur résultat à celui recherché pour tenter ensuite de s'en rapprocher au mieux. Ce mode de fonctionnement est rendu possible par la structure des réseaux neuronaux, qui sont composés de plusieurs couches de " cellules " reliées entre elles, formant une toile. Ce réseau est capable d'ajuster la " force " de ses propres interconnexions, exactement comme cela se passe pour celles des neurones du cerveau humain, lors de l'apprentissage. Les réseaux neuronaux peuvent, de cette manière, acquérir toutes sortes de compétences, comme la faculté de reconnaître les visages et les voix, les règles du jeu de dames ou d'échecs .Chellapilla et Fogel leur ont fait franchir une étape décisive en les mettant en compétition entre eux et en sélectionnant les " plus doués " afin d'améliorer leurs capacités. C'est là toute la beauté du processus : sans aucune entrée de données savantes, l'ordinateur a " fabriqué " son propre joueur de première catégorie.

Le Monde : http://www.lemonde.fr/article/0,2320,seq-2077-38337-QUO,00.html

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