RTFlash

RTFLASH Recherche & Technologie
NUMERO 1339
Lettre gratuite hebdomadaire d’informations scientifiques et technologiques
Créée par René Trégouët rapporteur de la Recherche et Président/fondateur du Groupe de Prospective du Sénat
Edition du 05 Décembre 2025
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Egalement dans ce numéro
Matière
Les premiers nano-neurones magnétiques
Les lois de la chimie réécrites sur Titan
En Bretagne, les énergies marines prennent leur envol
Vivant
Une chimiothérapie 20 000 fois plus puissante qui épargne les cellules saines
Reprogrammer les lymphocytes T en cellules antitumorales
Le MIT prouve qu’une dose réduite de 99 % fonctionne pour le vaccin ARNm
L'épigénétique permet d'activer et d'inhiber des souvenirs
Un gène spécifique qui peut aider le cœur à se réparer
Rechutes du cancer du sein triple négatif : un mécanisme de résistance aux traitements identifié
L'ADN façonne votre fertilité et votre espérance de vie
Maladie d’Alzheimer : un traitement expérimental améliore la mémoire...
Une thérapie immunologique prometteuse contre certains cancers
Des chercheurs commencent à cartographier le cerveau en développement
Courir pour compenser les effets d'une mauvaise alimentation sur le cerveau
Une avancée prometteuse dans le traitement de l’anxiété et de la dépression
Edito
En France, nous pourrions faire beaucoup plus avec les énergies renouvelables



AVANT – PROPOS :

Cette semaine la collecte de dons pour assurer l’avenir de RT Flash a fait un véritable bond puisque nous sommes arrivés à 10.003,99 euros.

Mais il ne nous reste plus en temps réel que 2 semaines avant la clôture de cette collecte car il ne sera pas possible en France et dans toute l’Europe de faire un virement entre le 24 et le 28 décembre.  

Cette clôture de la collecte de dons se fait nécessairement avant le 31 décembre pour que les donateurs puissent récupérer dans leur impôt sur le revenu de l’année prochaine les 2/3 de la somme qu’ils auront donnée à l’ADIST pour assurer l’avenir de RT Flash.

Il est impératif que nous parvenions à collecter 15.000,00 euros avant la fin de cette campagne. Comme je vous l’ai dit la semaine dernière, j’ai été obligé si nous ne voulions pas assister à la désindexation progressive de www.rtflash.fr par Google de très vite commander la refonte totale du site RT Flash.

J’ai déjà visionné plusieurs planches du nouveau site RT Flash. Cela va être extraordinaire. Il n’aura plus rien de comparable avec le site actuel. Une IA est en train de générer plus de 22.000 grandes images qui illustreront tous les articles et les éditos depuis 1998. Ce qui est extraordinaire : c’est de constater que chaque image est générée par l’IA après qu’elle ait lue l’édito ou l’article qu’elle va illustrer. Cela donne un résultat remarquable.

AUSSI, NOUS AVONS BESOIN DE VOUS POUR QUE RT FLASH PUISSE CONTINUER A VIVRE.

Si vous acceptez de faire un don à l’ADIST pour renforcer l’avenir de RT Flash, je vous invite à cliquer sur le lien suivant :

https://www.helloasso.com/associations/adist/formulaires/11

Merci

Bien Cordialement
René Trégouët
Sénateur Honoraire
Fondateur du Groupe de Prospective du Sénat
Créateur de RT Flash, il y a 27 ans

EDITORIAL :

EN FRANCE, NOUS POURRIONS FAIRE BEAUCOUP PLUS AVEC LES ENERGIES RENOUVELABLES

Un basculement énergétique majeur à accomplir

Au cours des 25 prochaines années, la France devra réaliser un basculement énergétique irréversible vers un mix décarboné, afin de respecter les engagements de l’Accord de Paris et les objectifs européens de neutralité carbone.

Ce mouvement suppose la sortie progressive des énergies fossiles et le déploiement massif de toutes les énergies bas-carbone, nucléaire compris.

De nouvelles études montrent que notre pays possède un potentiel bien plus important que prévu en énergies renouvelables, un potentiel désormais exploitable grâce à des technologies plus efficaces et devenues hautement compétitives face aux énergies fossiles.

Le solaire : pilier de la transition énergétique

Une énergie appelée à dominer au XXIᵉ siècle

Le solaire, principalement photovoltaïque, mais aussi thermique, est en plein essor. Il se déploie sur les toits, les sols, mais aussi dans nos campagnes grâce à l’agrivoltaïsme, qui associe intelligemment agriculture et production d’énergie.

L’agrivoltaïsme : synergies et potentiel colossal

Les cultures agricoles n’utilisent que 30 % du rayonnement solaire. Les deux tiers restants sont perdus ; l’agrivoltaïsme permet de les valoriser. Des panneaux placés à 3 à 5 mètres au-dessus des cultures — fixes ou mobiles — protègent les plantes des excès climatiques tout en maintenant les rendements, à condition de respecter un taux de couverture maximal de 20 à 25 % par hectare.

Selon Christian Dupraz (Inrae Montpellier), pionnier de l’agrivoltaïsme : « Avec un hectare produisant du blé éthanol, on peut faire rouler une voiture 22 000 km. Avec un hectare agrivoltaïque, on peut faire rouler une voiture électrique trois millions de kilomètres ».

Il recommande 100 000 hectares d’ici 2050, soit 50 GWc, équivalant à la production de dix réacteurs nucléaires.

Les projections de la Commission européenne, de l’ADEME et de France Agrivoltaïsme, convergent vers un potentiel de 60 à 80 GW à l’horizon 2050, soit 110 TWh/an, représentant 17 % de la consommation nationale prévue.

Le solaire au sol et en toiture

  • Les centrales solaires au sol produisent déjà 25 TWh/an (5,5 % de la consommation). Le gisement disponible (friches, parkings, zones agricoles déclassées) représente au moins 100 TWh/an.
  • La France dispose de 13,5 GW en toiture, produisant 14 TWh/an. Selon Enerdata, la production pourrait atteindre 125 TWh en 2050, soit 9 fois plus.

Les grandes centrales au sol sont devenues très compétitives avec un LCOE (« coût actualisé de l’énergie » en français) moyen de 40 €/MWh.

Le cas des toitures légères et du solaire flottant

Un tiers des toitures industrielles ne peut accueillir des panneaux classiques. Les toitures en zinc (par exemple à Paris : 22 millions de m²) posent particulièrement des problèmes.

La société française CréaWatt propose des panneaux légers (3,25 kg/m²), sans cadre ni verre, installables sur tout type de toiture.

Le solaire flottant représente un potentiel d’environ 20 TWh/an. L’ADEME estime que couvrir seulement 10 % des plans d’eau artificiels produirait 8 TWh/an, soit l’équivalent d’un EPR.

Un potentiel solaire total très supérieur aux prévisions actuelles

En additionnant agrivoltaïsme, toitures, centrales au sol et solaire flottant, le potentiel national atteint au moins 365 TWh/an en 2050, soit 56 % de la consommation prévue à cette date. Un niveau très supérieur à celui retenu par la PPE (Programmation Pluriannuelle de l’Energie), qui n’en prévoit que 250 TWh.

L’éolien : une puissance considérable encore sous-exploitée

Un potentiel offshore immense

Selon le Global Wind Energy Council, la France pourrait théoriquement installer :

  • 169 GW d’éolien offshore fixe
  • 454 GW d’éolien flottant

Avec un facteur de charge de 40 %, cela représenterait 1 575 TWh/an, soit 4 fois la consommation française actuelle.

Avec une approche plus réaliste, la France vise :

  • 18 GW d’ici 2035
  • 45 GW en 2050

Une filière qui décolle lentement

La puissance installée actuelle n’est que de 1,5 GW, provenant notamment de Saint-Nazaire, Fécamp et Saint-Brieuc, soit 5 % de la capacité offshore européenne.

Avec les projets déjà attribués, la France dépasse désormais 5 GW, mais reste derrière :

  • Royaume-Uni : 15 GW
  • Allemagne : 8,5 GW

Objectifs nationaux et nouvelles technologies

Le « Pacte pour l’éolien en mer » fixe :

  • 18 GW en 2035 (15 % de la production actuelle)
  • 45 GW en 2050 (plus d’un quart de la consommation)

L’éolien flottant, adapté aux fonds profonds du golfe du Lion et de Bretagne Sud, constitue un véritable atout stratégique.

La Chine déploie ses turbines flottantes Qihang 20 MW, capables de produire 68 millions de kWh/an.

La France travaille sur le projet HT-20MW, visant des machines équivalentes d’ici 2030. Avec ces technologies, la production française offshore pourrait atteindre 180 TWh/an en 2050, soit 28 % de la consommation prévue.

L'éolien terrestre

Actuellement : 43 TWh/an.
Objectif 2050 : 80 TWh/an.

Un potentiel éolien total de 280 TWh en 2050. Soit 43 % de la consommation prévue.

Hydraulique et énergies marines : un socle solide et innovant

Hydroélectricité

Aujourd’hui : 70 TWh/an, soit 15 % de la consommation.

Potentiel supplémentaire : 12 TWh, via modernisation et nouveaux ouvrages.

L'énergie osmotique : une révolution discrète mais prometteuse

Cette énergie exploite la différence de salinité entre eau douce et eau salée.

Potentiel français : 14 TWh/an.

Un projet pilote innovant, porté par Sweetch Energy, la CNR et EDF Hydro, fonctionne à Port-Saint-Louis-du-Rhône.

Une installation de grande ampleur est envisagée, utilisant des membranes biosourcées INOD, pour produire 4 TWh/an, soit la consommation d’Aix-Marseille (2 millions d’habitants).

Hydroliennes et houle

Potentiel estimé pour 2050 : 15 TWh/an, sans compter les améliorations technologiques à venir.

Un total hydraulique & marin de 109 TWh/an en 2050

Un total renouvelable de 724 TWh/an : plus que la consommation prévue en 2050

En agrégeant solaire, éolien, hydraulique et énergies marines, on obtient : 724 TWh/an, soit davantage que la consommation prévue (645 TWh/an).

Les ENR pourraient donc, en théorie, couvrir entièrement la demande française en 2050.

Coûts de production : la dynamique favorable des renouvelables

Des baisses spectaculaires du LCOE (coût actualisé de l’énergie)

  • Le coût du solaire a chuté de 80 % en 15 ans
  • Celui de l’éolien de 40 %

Et cette baisse continuera.

Projections pour 2050

  • Solaire : 9 à 20 €/MWh
    (contre 50–60 €/MWh en 2025)
  • Éolien terrestre : < 30 €/MWh
  • Éolien marin : ~ 40 €/MWh

Les renouvelables deviendront donc les sources d’énergie les moins chères.

Comparaison avec le nucléaire

Selon la Cour des Comptes :

  • Nucléaire existant : 70–80 €/MWh
  • Nouveaux EPR : > 100 €/MWh

Le défi incontournable : le stockage de l’électricité

La France dispose de 7 GW de stockage, principalement des STEP.
Objectifs :

  • 15 GW en 2030
  • 50 GW en 2050

Coût estimé : 50 milliards d’euros.
Un investissement indispensable pour gérer un système fortement renouvelable.

La place du nucléaire dans le mix futur

Les nouveaux EPR2

La France prévoit la construction de 6 EPR2, pour un coût d’environ 60 milliards d’euros, mise en service vers 2035 :

  • 2 à Penly
  • 2 à Gravelines
  • 2 à Bugey

8 autres EPR pourraient s’ajouter avant 2050.
Production totale : 182 TWh/an.

Arrêts de réacteurs

Une quinzaine de réacteurs anciens devront être démantelés d’ici 2050, retirant 130 TWh/an.

Balance nucléaire nette

La production nucléaire atteindrait 443 TWh/an en 2050, soit 69 % de la consommation.

Un mix gagnant : nucléaire + renouvelables

Le « solde » manquant — 202 TWh/an — sera aisément couvert par les renouvelables, qui disposent de marges bien supérieures.

Dans ce scénario :

  • les renouvelables sont multipliées par quatre
  • le nucléaire progresse de 25 %

La France disposerait d’un excédent de 520 TWh décarbonés, utile pour répondre à la demande européenne, appelée à doubler pour atteindre 6000 TWh/an en 2050.

Conclusion : sortir de l’opposition stérile entre nucléaire et renouvelables

Le proverbe dit : « La mariée n’est jamais trop belle ».

La France bénéficie :

  • d’une expertise nucléaire unique au monde
  • d’un potentiel renouvelable immense, notamment dans le solaire et l’éolien marin
  • d’une capacité à créer des filières industrielles nouvelles, compétitives et créatrices d’emplois locaux

Face à l’urgence climatique, nous devons cesser d’opposer nucléaire et renouvelables : les deux sont indispensables, complémentaires, et capables ensemble d’assurer un avenir énergétique décarboné, souverain et dynamique pour notre pays.

René TRÉGOUËT

Sénateur honoraire

Fondateur du Groupe de Prospective du Sénat

e-mail : tregouet@gmail.com


Matière
Matière et Energie
Les premiers nano-neurones magnétiques
Mercredi, 03/12/2025 - 17:11

A l'ère où l'essor fulgurant de l'intelligence artificielle s'accompagne de coûts énergétiques exponentiellement croissants, une voie prometteuse consiste à exploiter le bruit thermique à température ambiante comme ressource de calcul ultra-sobre. Cette stratégie que la biologie semble déjà exploiter dans le cerveau — où le bruit aiderait les neurones à explorer et décider — a incité les chercheurs à concevoir des nano-composants bruités capables d'émuler des neurones au sein de puces électroniques dédiées au calcul. Pour ce faire, des nano-neurones de type mémoire magnétique ont été développés : les jonctions tunnel superparamagnétiques (SMTJs).

A la différence des neurones électroniques classiques constitués de nombreux transistors, les SMTJs sont des cylindres magnétiques à l'échelle d'une dizaine de nanomètres, constitués d'une couche magnétique libre et d'une couche magnétique fixe, séparées par un isolant. L'orientation relative de l'aimantation dans ces couches, parallèle ou antiparallèle, correspond à deux états métastables séparés par une barrière d'énergie. Dans cette étude réalisée par une équipe du CEA-Irig/SPINTEC, le design spécifique permet aux SMTJs d'être très sensibles au bruit thermique ambiant, à l'inverse des applications habituelles (mémoires et capteurs). En effet, de simples fluctuations thermiques peuvent inverser aléatoirement l'aimantation de la couche libre. Ainsi, ces SMTJs réagissent comme des neurones stochastiques binaires dont l'avantage est de consommer très peu d'énergie. Plus le temps d'attente moyen entre les renversements magnétiques est court, plus la vitesse de calcul est élevée.

Les chercheurs ont mis en évidence expérimentalement des temps d'attente entre renversements d'aimantation dans des jonctions tunnel superparamagnétiques à aimantation perpendiculaire et miniaturisées à 50 nm de diamètre, purement induits par des fluctuations thermiques. La mesure requiert de très faibles courants permettant d'observer les changements d'orientation de la couche magnétique libre à l'échelle de quelques nanosecondes, une échelle de temps jusqu'à présent jamais observée dans ces systèmes.

Sous l'effet de la seule énergie thermique, des jonctions tunnel magnétiques perpendiculaires d'un diamètre de quelques dizaines de nanomètres seulement, basculent aléatoirement d'un état à un autre, avec des temps d'attentes moyens ultra brefs, de l'ordre de la nanoseconde. En capitalisant sur ces fluctuations comme mécanisme de renversement d'aimantation, ce travail ouvre la voie à la mise en œuvre d'éléments stochastiques pour le calcul neuromorphique à très faible consommation d'énergie.

CEA du 03.11.2025 : https://www.cea.fr/drf/Pages/Actualites/En-direct-des-labos/2025/Les-premiers-na...

Les lois de la chimie réécrites sur Titan
Lundi, 01/12/2025 - 19:47

Des chercheurs ont observé un phénomène chimique inattendu et remarquable sur Titan, la plus grande lune de Saturne. Cette étrange réaction chimique semble remettre en cause un principe de base enseigné dès les premiers cours de chimie : l’incompatibilité entre substances polaires et non polaires. En recréant en laboratoire les conditions extrêmes de ce satellite glacial, une équipe conjointe de la NASA (Jet Propulsion Laboratory) et de l’Université de technologie de Chalmers, en Suède, a montré que le cyanure d’hydrogène, un composé polaire, peut former une structure cristalline stable avec du méthane ou de l’éthane, deux hydrocarbures non polaires. Ce type d’interaction, considéré comme impossible dans les conditions terrestres, pourrait éclairer les processus chimiques ayant précédé l’émergence de la vie. L’étude ouvre ainsi une nouvelle piste pour comprendre la chimie organique en milieux extrêmes.

Depuis des années, les scientifiques s'interrogent sur le destin d’un composé omniprésent dans l’atmosphère dense de Titan : le cyanure d’hydrogène (HCN). Il se forme à partir de réactions photolytiques impliquant le méthane et l’azote, sous l'effet des rayons ultraviolets du Soleil. Ce composé constitue un des produits majeurs de la chimie organique sur Titan. Or, malgré sa production abondante, sa répartition à la surface restait floue. S’accumule-t-il en couches solides ? Est-il chimiquement inerte ? Ou bien interagit-il avec d'autres molécules présentes sur place ? Pour répondre à ces questions, une équipe de la NASA a simulé en laboratoire les conditions cryogéniques régnant sur Titan. Les températures y descendent, en effet, à -180°C. L’expérience consistait à mélanger du HCN cristallisé avec du méthane et de l’éthane. Tous deux présents à l’état liquide à cette température. Les résultats expérimentaux, obtenus par spectroscopie infrarouge, ont rapidement montré des signaux inattendus.

L’analyse théorique, combinée aux mesures expérimentales, a mis en évidence une hypothèse audacieuse. Des co-cristaux pourraient se former malgré l’incompatibilité électrostatique entre les molécules. Cette hypothèse allait à l’encontre du principe bien établi "like dissolves like". En d’autres termes, les molécules polaires et non polaires ne peuvent se mélanger efficacement, le plus repousse le plus. Le moins repousse le moins. L’enjeu dépassait largement la compréhension de Titan. Il s’agissait de réévaluer les fondements de la chimie dans des environnements extraterrestres extrêmes. Ce qui a été observé n’est pas une réaction chimique au sens classique, mais un phénomène de co-cristallisation. Les molécules de méthane (CH₄) et d’éthane (C₂H₆), toutes deux non polaires, s’insèrent physiquement dans la structure solide du HCN, une molécule fortement polaire. Ce mécanisme, appelé intercalation, défie les règles électrostatiques enseignées en chimie. Selon elles, les charges semblables s’attirent et les charges opposées se repoussent.

En temps normal, les molécules polaires se regroupent donc entre elles, formant des liaisons dipôle-dipôle. Elles ignorent les molécules non polaires, qui interagissent faiblement entre elles. L’équipe de Martin Rahm a utilisé des calculs de mécanique quantique pour simuler des milliers d’organisations possibles de ces molécules dans un réseau cristallin. De fait, plusieurs structures se sont révélées thermodynamiquement stables dans les conditions de Titan. Elles peuvent donc exister naturellement sans apport d’énergie extérieure. Dans ces structures, les molécules d’hydrocarbures remplissent les vides laissés dans le cristal de HCN sans perturber ses liaisons internes, ce qui stabilise l’ensemble. Les spectres lumineux calculés pour ces co-cristaux correspondent parfaitement à ceux mesurés par la NASA lors de ses expériences en laboratoire. Ils valident ainsi la théorie.

Cette stabilité se montre d’autant plus remarquable que les forces impliquées restent très faibles. Il s’agit principalement d’interactions de Van der Waals et de contraintes géométriques au sein du cristal. Pour les auteurs, ces co-cristaux pourraient être largement répandus à la surface de Titan. Ils n’ont rien d’analogue sur Terre. Cependant, leur présence pourrait expliquer certaines caractéristiques géologiques observées par la sonde Cassini, notamment dans les régions riches en dépôts organiques. Ce comportement ouvre la porte à une nouvelle classe de matériaux "hybrides", propres aux mondes froids et organiques.

Ce phénomène inattendu soulève des questions majeures sur la chimie prébiotique, c’est-à-dire celle qui précède l’apparition de la vie. Sur Terre, les acides aminés, les bases azotées et autres molécules fondamentales pour la biologie pourraient avoir émergé à partir de précurseurs simples, comme le cyanure d’hydrogène. Or, sur  Titan, bien que les conditions thermiques empêchent la plupart des réactions rapides, la présence de HCN en interaction stable avec des hydrocarbures pourrait constituer un support solide pour des processus lents, mais efficaces de complexification moléculaire.

Les co-cristaux identifiés peuvent créer des microenvironnements confinés, favorables à la concentration locale de réactifs. De tels environnements se révèlent cruciaux en chimie prébiotique. Effectivement, ils permettent aux molécules de se rencontrer, de s’organiser et, potentiellement, de réagir entre elles au fil du temps. Même à très basse température, des transformations lentes ou favorisées par des apports ponctuels d’énergie (comme le rayonnement cosmique) restent envisageables. Ces structures cristallines pourraient aussi servir de support à d’autres molécules actives. À savoir : l’acétylène ou le cyanoacétylène, également présent sur Titan. Ainsi, loin d’être un environnement stérile, la surface de Titan pourrait héberger une chimie dynamique, originale et propre à produire des molécules complexes.

Chalmers : https://www.chalmers.se/en/current/news/k-unexpected-discovery-on-saturns-moon-c...

En Bretagne, les énergies marines prennent leur envol
Lundi, 01/12/2025 - 19:44

A Brest, la société bordelaise Seaturns est parvenue, après un an et demi d'essais menés avec le centre d'expérimentation de l'Ifremer, à démontrer l'efficacité de son système houlomoteur, réalisé à l'échelle un quart. De quoi encourager l'entreprise à annoncer, en avril dernier, le lancement d'un démonstrateur, cette fois à l'échelle 1, en vue d'une commercialisation de ses machines. Le secteur de l'hydrolien, longtemps considéré comme non rentable a lui aussi largement gagné en maturité. C'est d'ailleurs ce qui a poussé, en mai dernier, la fondation Open-C, gestionnaire de cinq sites d'essais EMR sur le littoral français, à relancer des programmes de R&D sur le site de Paimpol-Bréhat, au large des Côtes-d'Armor. Soutenue dans le cadre du projet européen Shines, dotée de 10 millions d'euros, cette campagne de recherche doit permettre de tester plusieurs modèles de machines, l'hydrolienne modulaire du groupe Inyanga par exemple, en vue de leur industrialisation.

Selon une étude menée en 2024 par la Région, le potentiel de production de l'hydrolien pourrait avoisiner les 500 MW grâce à trois fermes aménageables dans le passage de Fromveur, à Ouessant, et dans le raz de Sein. La Bretagne est d'ailleurs la seule région à disposer d'une machine raccordée au réseau électrique. En l'occurrence, celui de l'île d'Ouessant, qu'elle peut alimenter à hauteur de 15 %. Du côté des technologies houlomotrices aussi, les développements s'accélèrent. La région continue d'étudier le potentiel des ports, comme celui de Roscoff, où les principales technologies existantes, à flotteurs ou à volets, pourraient être testées.

Les industriels, eux, se lancent déjà dans la course. A l'instar du groupe immobilier breton Legendre, qui s'est allié au spécialiste des énergies marines Geps Techno et à l'Ifremer pour créer son prototype de digue houlomotrice, testé à Sainte-Anne du Portzic, dans le Finistère. Son principe ? Construire des digues grâce à des caissons modulables, dotés de volets battants. Avec les mouvements de la houle, ceux-ci oscillent, faisant circuler un fluide au sein d'une génératrice. Baptisé "Dikwe" ("Dike Wave Energy"), ce programme – fruit de six années de recherche a été jugé suffisamment concluant pour que Legendre et Geps Techno créent une coentreprise, Wave-Op. L'objectif ? Lancer rapidement un démonstrateur, en cours d'achèvement non loin de Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais), et conclure les premiers contrats commerciaux. En fonction des installations, ce système d'énergie houlomotrice permettra de générer entre 1 MW et 50 MW. De quoi répondre de manière propre et durable aux besoins d'électrification des ports.

Les Echos du 21.10.2025 : https://www.lesechos.fr/thema/articles/energies-marines-la-recherche-turbine-sur...

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Santé, Médecine et Sciences du Vivant
Une chimiothérapie 20 000 fois plus puissante qui épargne les cellules saines
Mercredi, 03/12/2025 - 17:18

Le 5-fluorouracile, ou 5FU pour les intimes, fait partie de l’arsenal thérapeutique contre le cancer depuis plusieurs décennies. Son mécanisme d’action est éprouvé : il perturbe la réplication de l’ADN des cellules cancéreuses jusqu’à provoquer leur mort. Pourtant, son utilisation s’accompagne d’un cortège d’effets secondaires redoutables. Nausées, fatigue extrême, et dans certains cas, insuffisance cardiaque figurent parmi les conséquences d’un traitement au 5FU.

Le problème ne vient pas tant de la molécule elle-même que de sa mauvaise solubilité dans le sang. Incapable de se dissoudre correctement, le médicament s’agglomère, peine à atteindre sa cible et finit par attaquer indistinctement les cellules saines sur son passage. Chad Mirkin, chimiste et spécialiste des nanosciences à Northwestern, résume la situation avec franchise : la chimiothérapie est non seulement toxique, mais aussi mal assimilée par l’organisme. Face à ce constat, l’équipe de Mirkin a choisi une approche radicalement différente. Plutôt que de modifier la molécule active, les chercheurs ont repensé son architecture. Ils ont intégré le 5FU directement dans des brins d’ADN synthétique enroulés autour de minuscules sphères, créant ainsi ce qu’ils nomment des acides nucléiques sphériques, ou ANS.

Cette structure présente un avantage déterminant : elle exploite les mécanismes naturels de reconnaissance cellulaire. Les cellules possèdent à leur surface des récepteurs dits scavengers, chargés d’identifier et de faire entrer certaines molécules. Les cellules myéloïdes, celles qui deviennent cancéreuses dans la leucémie myéloïde aiguë, surexpriment massivement ces récepteurs. En quelque sorte, elles invitent les ANS à l’intérieur sans se douter qu’elles accueillent leur propre destruction. Une fois la porte franchie, des enzymes intracellulaires découpent la coque d’ADN et libèrent les molécules de 5FU. Le médicament agit alors de l’intérieur, détruisant la cellule cancéreuse avec une efficacité démultipliée.

Les tests menés sur des modèles animaux atteints de leucémie myéloïde aiguë ont produit des chiffres spectaculaires. La forme nanométrique du 5FU pénètre les cellules leucémiques 12,5 fois mieux que sa version standard. Son efficacité destructrice bondit d’un facteur pouvant atteindre 20 000. La progression tumorale se trouve réduite par un facteur 59. Et surtout, aucun effet secondaire détectable n’a été observé chez les animaux traités.

Mirkin ne cache pas son enthousiasme : sur les modèles testés, la progression des tumeurs s’est arrêtée net. Les cellules leucémiques ont quasiment disparu du sang et de la rate, tandis que les tissus sains demeuraient intacts. Cette sélectivité change fondamentalement la donne. Au lieu d’inonder l’organisme d’un poison qui tue aveuglément, la nanomédecine délivre une dose élevée et concentrée exactement là où elle doit agir. Si ces résultats publiés dans ACS Nano se confirment chez l’humain lors des futurs essais cliniques, les implications dépassent largement le cadre de la leucémie myéloïde aiguë. Sept thérapies à base d’ANS sont déjà en phase de tests cliniques, et l’équipe de Northwestern envisage d’appliquer cette technologie à d’autres pathologies : cancers divers, maladies infectieuses, troubles neurodégénératifs, affections auto-immunes.

ACs Nano : https://pubs.acs.org/doi/10.1021/acsnano.5c16609

Reprogrammer les lymphocytes T en cellules antitumorales
Mercredi, 03/12/2025 - 17:16

L’immunothérapie anticancéreuse, en particulier à l’aide de lymphocytes T, s’avère très prometteuse dans le traitement des cancers du sang. Les lymphocytes T issus de la bioingénierie, notamment ceux pourvus de récepteurs antigéniques chimériques (cellules CAR-T), ont révolutionné le traitement du cancer. Ils ont produit des résultats impressionnants contre certains cancers du sang, ce qui n’est pas le cas contre les tumeurs solides comme celles du sein, des poumons et de la prostate. Un problème majeur est le microenvironnement tumoral (TME). Il s’agit d’un mélange de cellules et de molécules pouvant atténuer les réponses immunitaires. Dans la plupart des tumeurs solides, les signaux inhibiteurs prédominent alors que les signaux utiles (qui indiquent aux lymphocytes T de continuer à fonctionner) sont faibles ou totalement absents. Comme les lymphocytes T modifiés dépendent de ces signaux environnementaux pour rester actifs et fonctionnels, ils sont souvent inefficaces. Cela a amené les scientifiques à explorer des moyens de créer des récepteurs supplémentaires dans les lymphocytes T, afin qu’ils puissent capter les signaux spécifiques à la tumeur et réagir avec une puissance accrue.

Les chercheuses et chercheurs ont tenté de créer des récepteurs capables de détecter le TME et de réagir à celui-ci, mais leur conception s’est avérée difficile car la création de protéines de signalisation personnalisées est une tâche complexe. Parallèlement, la plupart des méthodes actuelles pour le faire reposent beaucoup sur des essais et erreurs, ce qui fait qu’il est difficile de contrôler la façon dont ces récepteurs synthétiques se comporteront lorsqu’ils seront déployés contre une tumeur. Une équipe, dirigée par Patrick Barth de l’EPFL et Caroline Arber de l’UNIL-CHUV, a développé une plate-forme computationnelle destinée à concevoir des récepteurs de protéines synthétiques à partir de zéro. Appelés T-SenSER (tumor microenvironment-sensing switch receptors), ces récepteurs sont conçus pour détecter les signaux solubles trouvés dans les tumeurs et les convertir en signaux co-stimulants ou de type cytokine qui stimulent l’activité des lymphocytes T. Associés à des cellules CAR-T conventionnelles, les récepteurs synthétiques ont amélioré leurs effets antitumoraux dans des modèles de cancer du poumon et de myélome multiple.

La plate-forme computationnelle peut assembler des récepteurs artificiels en concevant et en combinant différents domaines protéiques, comme si l’on construisait avec des Legos moléculaires. Chaque récepteur comprend un domaine externe qui lie un signal associé à la tumeur, une région médiane qui transmet ce signal à travers la membrane cellulaire et un domaine interne qui active des fonctions utiles à l’intérieur du lymphocyte T. « Ce qui distingue cette approche des approches actuelles de conception protéique, c’est qu’elle ne traite pas les protéines comme des structures rigides », explique Patrick Barth, professeur au Laboratoire d’ingénierie des protéines et des cellules. « Elle les modélise comme des machines dynamiques à changement de forme, ce qui permet de voir, pour la première fois, comment les signaux traversent ces récepteurs synthétiques pour contrôler le comportement cellulaire ».

Il ajoute : « Cette étude constitue la première démonstration de la conception computationnelle de récepteurs monopasse et multidomaines dotés de fonctions de signalisation programmables. Elle ouvre la voie au développement accéléré de biocapteurs synthétiques pourvus de capacités de détection et de réponse personnalisées pour des applications de génie cellulaire de base et translationnel ». À l’aide de la plate-forme, l’équipe a créé deux familles de T-SenSER : l’une qui réagit au VEGF, une protéine qui favorise la croissance des vaisseaux sanguins et qui est courante dans les tumeurs, et l’autre qui réagit au CSF1, une protéine qui influence négativement le comportement des cellules immunitaires dans les tumeurs. Les scientifiques ont conçu 18 versions et sélectionné les plus performantes sur la base de simulations et d’essais en laboratoire.

Lors des tests, les lymphocytes T pourvus à la fois d’un CAR et d’un T-SenSER ont réagi plus fortement aux tumeurs que les cellules CAR-T seules et ont montré des activités spécifiques du ligand reflétant fidèlement les programmes de signalisation codés par la méthode de conception. La version détectrice du VEGF (appelée VMR) n’activait les lymphocytes T que lorsque le VEGF était présent, tandis que la version détectrice du CSF1 (CMR) fournissait une petite stimulation initiale même sans CSF1, mais augmentait son effet en présence du ligand. Dans les modèles murins de cancer du poumon et de myélome, les lymphocytes T dotés de ces récepteurs synthétiques ont montré un meilleur contrôle tumoral et une survie plus longue.

Science : https://www.science.org/doi/10.1126/sciimmunol.adr9933

Le MIT prouve qu’une dose réduite de 99 % fonctionne pour le vaccin ARNm
Mercredi, 03/12/2025 - 17:13

Les vaccins à ARN messager, comme ceux contre le Covid-19, ont un inconvénient majeur : leur prix élevé. « L’un des défis avec les vaccins à ARNm est le coût », explique Daniel Anderson, professeur au MIT. La raison ? L’ARN messager est fragile et doit être protégé par une enveloppe spéciale appelée nanoparticule lipidique pour survivre dans le corps et atteindre nos cellules. L’équipe d’Anderson, composée d’Arnab Rudra, Akash Gupta et Kaelan Reed, a travaillé sur l’amélioration de cette enveloppe protectrice. Leur nouvelle particule, baptisée AMG1541, a été testée sur des souris vaccinées contre la grippe. Résultat : avec une dose minuscule, les animaux produisaient autant d’anticorps qu’avec les doses actuelles. « C’est une dose presque cent fois inférieure, mais vous générez la même quantité d’anticorps », précise Arnab Rudra.

Les scientifiques ont créé une bibliothèque de nouvelles molécules lipidiques avec des structures en forme d’anneaux et des groupes chimiques particuliers. Après avoir testé différentes combinaisons, ils ont identifié la formule gagnante. La particule AMG1541 possède deux atouts majeurs : elle pénètre mieux dans les cellules en franchissant les barrières internes qui bloquent habituellement les nanoparticules, et elle disparaît naturellement après avoir rempli sa mission. Cette capacité à se dégrader pourrait limiter les effets indésirables liés à l’accumulation de lipides dans l’organisme. De plus, les nouvelles particules se dirigent préférentiellement vers les ganglions lymphatiques, là où se trouvent les cellules immunitaires qui orchestrent notre défense contre les infections.

Bien que testée avec un vaccin contre la grippe, la technologie pourrait s’appliquer à de nombreuses maladies : Covid-19, VIH, et bien d’autres. Pour la grippe saisonnière, l’intérêt est particulièrement significatif. Actuellement, les vaccins traditionnels demandent près d’un an de fabrication, obligeant les laboratoires à deviner quelles souches circuleront l’hiver suivant. « Avec l’ARNm, vous pouvez commencer la production beaucoup plus tard dans la saison et obtenir une prédiction plus précise des souches qui vont circuler », souligne Kaelan Reed. Akash Gupta affirme : « Nous avons constaté qu’elles fonctionnent beaucoup mieux que tout ce qui a été rapporté jusqu’à présent. Pour tous les vaccins intramusculaires, nous pensons que nos plateformes de nanoparticules lipidiques pourraient être utilisées pour développer des vaccins contre un certain nombre de maladies ». Il leur faut maintenant vérifier si les résultats obtenus chez la souris se confirmeront chez l’humain. Si c’est le cas, la vaccination à ARN messager deviendrait bien plus accessible financièrement, notamment dans les pays en développement. 

Nature Nanotechnology : https://www.nature.com/articles/s41565-025-02044-6

L'épigénétique permet d'activer et d'inhiber des souvenirs
Mardi, 02/12/2025 - 17:21

Nos expériences laissent des traces dans le cerveau, stockées dans de petits groupes de cellules appelés "engrammes". On pense que ces engrammes contiennent l’information d’un souvenir et sont réactivés lorsque nous nous souvenons. Un élément particulièrement intéressant pour la recherche sur la mémoire et la perte de mémoire liée à l’âge ou à un traumatisme. Parallèlement, les scientifiques savent que la biologie de l’apprentissage s’accompagne de changements épigénétiques, c’est-à-dire de la façon dont la cellule régule les gènes en ajoutant des "post-it" chimiques sur l’ADN.

Mais la question demeure de savoir si l’état épigénétique d’un seul gène peut à son tour provoquer un changement de mémoire. Une équipe dirigée par le professeur Johannes Gräff du Laboratoire de neuroépigénétique de l’EPFL a combiné le contrôle génique basé sur CRISPR avec une technique de marquage des cellules d’engramme chez la souris. Elle s’est concentrée sur Arc, un gène qui aide les neurones à ajuster leurs connexions aux autres neurones. En ciblant la région de contrôle d’Arc, l’équipe s’est demandé si le fait de régler son "commutateur" épigénétique pouvait modifier directement la mémoire. Les chercheuses et chercheurs ont développé des outils spécialisés basés sur CRISPR, capables soit de réduire, soit d’augmenter l’activité d’Arc dans les neurones de la mémoire. Certains, comme l’outil KRAB-MeCP2, ont été conçus pour inhiber l’activité génique en ajoutant des marques répressives qui rendent l’ADN moins accessible, tandis que d’autres ont ouvert l’ADN et activé le gène. Ces outils constituaient avant tout un "commutateur épigénétique" pour le gène Arc.

Ils ont ensuite utilisé des virus inoffensifs pour délivrer ces outils directement dans l’hippocampe des souris, une aire cérébrale centrale pour stocker et récupérer la mémoire. Les souris ont ensuite été entraînées à associer un endroit spécifique à un léger choc électrique au niveau des pattes. En modifiant l’état épigénétique d’Arc dans les neurones, les scientifiques ont pu voir si les animaux se souvenaient du choc électrique ou non. Ils ont également ajouté un "interrupteur de sécurité" qui pouvait annuler l’édition et réinitialiser l’état de la mémoire. L’étude montre que l’inhibition épigénétique d’Arc dans les cellules d’engramme empêche les souris d’apprendre, tandis que son amplification renforce leur mémoire. Ces changements pourraient être inversés chez le même animal, montrant que ce « commutateur » épigénétique peut augmenter ou diminuer l’expression de la mémoire. Même des souvenirs datant de plusieurs jours, souvent difficiles à changer, ont pu être modifiés ainsi. Au niveau moléculaire, l’édition a provoqué des changements dans l’activité d’Arc et de son enroulement de l’ADN qui correspondaient aux effets comportementaux.

L’étude est la première démonstration directe que le changement de l’état épigénétique dans les cellules mémoire est nécessaire et suffisant pour contrôler l’expression de la mémoire. Elle suggère de nouvelles méthodes d’exploration de la façon dont les souvenirs sont stockés et modifiés, ce qui pourrait finalement s’appliquer à l’être humain. À l’avenir, des approches semblables pourraient aider les scientifiques à mieux comprendre les conditions dans lesquelles le traitement de la mémoire ne fonctionne pas correctement, comme pour le trouble de stress post-traumatique (TSPT), les souvenirs liés à la toxicomanie ou les problèmes de mémoire qui apparaissent dans les maladies neurodégénératives.

EPFL : https://actu.epfl.ch/news/l-epigenetique-permet-d-activer-et-d-inhiber-des-s/

Un gène spécifique qui peut aider le cœur à se réparer
Mardi, 02/12/2025 - 17:18

Quand une personne subit une crise cardiaque ou une insuffisance cardiaque, des cellules musculaires cardiaques sont perdues et le cœur ne peut pas les remplacer. À ce jour, il n’existe aucun moyen de favoriser la production de nouvelles cellules après une lésion. Chez les animaux, le gène "cycline A2 (CCNA2)", un régulateur clé du cycle cellulaire, normalement inactivé dans les cardiomyocytes après la naissance, s’est montré efficace pour régénérer le cœur. « Cependant, son effet sur la cytokinèse dans les cardiomyocytes humains adultes était jusqu'alors inconnu », ont indiqué des scientifiques de l'hôpital Mount Sinai (États-Unis). C’est pourquoi, dans une nouvelle étude, ces derniers se sont penchés sur la question.

Dans le cadre des travaux, l’équipe a voulu réactiver le gène afin de voir si cela permettrait de développer de nouvelles cellules cardiaques et d'aider le cœur à guérir. Elle a mis au point un virus non réplicatif compatible avec l'Homme, porteur du gène CCNA2, et l'a administré à des cellules musculaires cardiaques. Les chercheurs l'ont testé directement sur des cellules cardiaques humaines adultes vivantes, cultivées à partir de cœurs de trois donneurs sains, âgés de 21, 41 et 55 ans. Par la suite, ils ont utilisé l'imagerie en accéléré pour analyser les cellules cardiaques traitées avec CCNA2.

Selon les résultats, les cellules se divisaient avec succès, tout en conservant leur structure et leur fonction normales. La thérapie à base de cycline A2 a induit la division des cellules cardiaques humaines adultes dans les cœurs des donneurs de 41 et 55 ans. En revanche, les cellules des cœurs du donneur de 21 ans n'ont montré aucun changement après la thérapie. Cela « est conforme aux précédentes recherches qui montrent que les cœurs jeunes possèdent un potentiel de régénération et que leurs cellules sont capables de se diviser sans la stimulation fournie par CCNA2 ».

Nature : https://www.nature.com/articles/s41536-025-00438-

 

Rechutes du cancer du sein triple négatif : un mécanisme de résistance aux traitements identifié
Mardi, 02/12/2025 - 17:17

Un mécanisme de résistance cellulaire à l’origine de rechutes du cancer du sein triple négatif vient d’être découvert par des scientifiques du CNRS, de l’Institut Curie, et de l’Université Paris Cité. Le cancer du sein triple négatif est l’un des cancers les plus agressifs et difficiles à traiter. Il répond généralement bien aux combinaisons thérapeutiques de chimiothérapie, mais une infime minorité de cellules tumorales peut parvenir à survivre à ces traitements. Ces cellules dites "persistantes" sont par la suite capables de reformer un cancer, provoquant des rechutes du cancer du sein.

Selon les travaux d'une équipe de recherche menée par des scientifiques du CNRS et de l’Institut Curie au laboratoire "Dynamique de l'information génétique : bases fondamentales et cancer" (CNRS/Institut Curie/Sorbonne Université) et au département de recherche translationnelle de l’Institut Curie, les cellules "persistantes" partagent un même programme transcriptionnel d’une patiente à une autre, quels que soient les traitements reçus. Les scientifiques ont également identifié plusieurs molécules impliquées dans ce programme commun, qui détermine quels gènes sont activés ou non. Parmi ces molécules, la protéine « FOSL1 » joue un rôle central, tel un véritable "interrupteur on/off" de la résistance. Grâce à cette adaptation non génétique et réversible, les cellules modifient leur fonctionnement et survivent aux traitements, avant d’y redevenir sensibles par la suite.

Ces résultats ont été obtenus grâce à des expériences réalisées chez la souris, à partir de biopsies de tumeurs prélevées chez huit patientes de l’Institut Curie – un nombre encore jamais atteint pour ce type d’étude. Grâce aux technologies de séquençages, les scientifiques ont pu analyser les tumeurs à différentes étapes et identifier les mécanismes de survie des cellules tumorales. L’enjeu désormais est d’identifier les marqueurs biologiques de cette résistance. Cette découverte constitue une étape essentielle vers une médecine plus préventive, capable d’anticiper et d’éviter les rechutes dans les cancers les plus agressifs. Elle ouvre la voie à de nouvelles stratégies thérapeutiques visant non seulement à éliminer les cellules tumorales, mais aussi à empêcher leur entrée dans l’état persistant.

Institut Curie : https://curie.fr/actualite/rechutes-du-cancer-du-sein-decouverte-dun-mecanisme-d...

L'ADN façonne votre fertilité et votre espérance de vie
Mardi, 02/12/2025 - 17:14

L’ADN façonne de nombreux éléments de notre identité et de notre santé. Des chercheurs des universités d’Oxford et d’Islande ont également fourni de nouvelles informations sur la façon dont il affecte la fertilité, le moment de la ménopause ou même l’espérance de vie. En reprenant la base de données en ligne Genome Wide Association Studies (GWAS), l’équipe a identifié 159 études génétiques et 37 gènes liés à des caractéristiques de la reproduction comme les hormones sexuelles (hormone de stimulation folliculaire ou la testostérone) ou encore le moment de la ménopause.

Le gène FSHB (sous-unité bêta de l'hormone de stimulation des follicules), en particulier, est associé à plusieurs éléments de la santé reproductive. « Ce gène aide à réguler le début de la menstruation et le moment de la ménopause, soulignant son rôle dans la santé reproductive et le vieillissement. L'examen a aussi révélé des liens entre ces gènes reproducteurs et des troubles génétiques rares, montrant comment l'ADN a un impact à la fois sur la fertilité et la santé globale », précisent les auteurs. Lors de l’étude, les scientifiques ont par ailleurs mis en évidence une association entre les gènes reproducteurs et la longévité. En effet, ils ont constaté que les gènes comme ESR1 sont liés aux traits de reproduction ainsi qu'au risque de cancer. Par exemple, commencer la puberté plus tôt ou vivre la ménopause plus tard peut augmenter le risque de cancers sensibles aux hormones comme le cancer du sein, mais ces mêmes traits sont associés à une durée de vie plus longue. Le gène FTO – déjà fortement lié à l'IMC, le risque d'obésité et le diabète de type 2 - était, de son côté, associé à plusieurs caractéristiques reproductives différentes.

« Comme de plus en plus de personnes repoussent la parentalité à un âge plus avancé, il est important de comprendre les facteurs génétiques qui sous-tendent la santé reproductive et la période de fertilité d’un individu. Notre étude rassemble des recherches sur la génétique de la reproduction pour révéler des gènes communs à des traits et des connaissances au-delà de la fertilité qui sont intrinsèquement liés à la santé, à l’indice de masse corporelle (IMC) et à l’obésité, aux cancers sensibles aux hormones, et même aux traits psychiatriques et comportementaux », explique l’auteure principale Melinda Mills. 

Nature : https://www.nature.com/articles/s43587-024-00733-w

Maladie d’Alzheimer : un traitement expérimental améliore la mémoire...
Mardi, 02/12/2025 - 17:13

Des chercheurs de l’université de Pennsylvanie ont découvert les effets positifs d’une molécule sur la mémoire. Ils ont réalisé leurs travaux grâce à des souris de laboratoire. L’équipe de recherche s’est intéressée à un composé appelé 4-phénylbutyrate (PBA). Il s’agit d’une molécule d'acide gras connue pour agir comme un “chaperon chimique” : elle empêche l'accumulation de protéines. Dans le cerveau, il existe des chaperons naturels, mais leur nombre diminue avec le vieillissement. Dans des travaux précédents, d’autres scientifiques avaient constaté que le traitement par PBA améliorait la qualité du sommeil et les performances aux tests cognitifs chez des souris.

Pour cette nouvelle étude, les chercheurs ont examiné les effets du PBA chez des souris modèles de la maladie d'Alzheimer. « Ces souris, appelées souris APPNL-G-F, accumulent des agrégats protéiques anormaux dans leur cerveau, perdent de nombreuses synapses reliant leurs cellules cérébrales et développent de graves troubles de la mémoire, à l'instar des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer », expliquent ces spécialistes. Dans un premier temps, ils ont démontré que les souris avaient des signes de dysfonctionnement des mécanismes de protéostasie. Ce terme désigne le processus de régulation des protéines dans le cerveau.

Chez les souris jeunes, le traitement avec le PBA contribuait à restaurer des signes de protéostasie normale dans des régions cérébrales impliquées dans la mémoire. « Le traitement a également permis aux souris de retrouver leur capacité, auparavant abolie, à distinguer les objets en mouvement des objets immobiles lors d'un test de mémoire standard appelé test de reconnaissance spatiale d’objets », complètent les auteurs. Puis, l’équipe a découvert qu'elle pouvait obtenir des effets similaires, notamment la réversion des déficits de mémoire, même chez les souris d'âge moyen. « Les traitements, qu'ils soient administrés précocement ou à un âge moyen, ont montré des signes d'inhibition du processus de formation des principaux agrégats protéiques caractéristiques de la maladie d'Alzheimer, appelés plaques amyloïdes bêta », résument les auteurs. « Le traitement à un âge plus avancé a permis de réduire non seulement le processus sous-jacent, mais aussi le nombre de plaques amyloïdes elles-mêmes ».

Aging : https://agingcelljournal.org/Archive/Volume3/20230017/

Une thérapie immunologique prometteuse contre certains cancers
Lundi, 01/12/2025 - 19:53

Aux États-Unis, une équipe de chercheurs de l’Université Rockefeller et du centre Memorial Sloan Kettering a mis au point une nouvelle approche thérapeutique capable de réduire les tumeurs chez six patients sur douze, dont deux en rémission complète. Les résultats de cet essai de phase 1, mené sur un petit groupe de volontaires atteints de cancers métastatiques, viennent d’être publiés et suscitent un vif intérêt dans la communauté scientifique. Le traitement repose sur un anticorps activateur du récepteur CD40, une protéine présente à la surface des cellules cancéreuses, connu depuis une vingtaine d’années, qui avait jusque-là montré des limites en raison d’effets secondaires sévères : inflammation généralisée, atteintes hépatiques ou chute du nombre de plaquettes.

Mais la nouvelle version du médicament, baptisée 2141-V11, a été conçue pour conserver l’efficacité tout en éliminant la toxicité. Au lieu d’une perfusion intraveineuse, les chercheurs ont choisi une injection directe dans la tumeur, évitant ainsi la diffusion du produit dans tout l’organisme. Parmi les douze patients traités – atteints notamment de mélanome, de cancer du rein ou du sein – six ont vu leurs tumeurs diminuer, et deux ont connu une disparition totale de la maladie.

Fait encore plus étonnant : les effets du traitement se sont étendus à tout le corps, y compris sur des tumeurs qui n’avaient pas été injectées. Une patiente atteinte d’un mélanome disséminé sur la jambe a vu toutes ses lésions disparaître après que le médicament n’ait été injecté que dans une seule tumeur. Une autre, touchée par un cancer du sein avec métastases au foie et aux poumons, a présenté le même phénomène après une seule injection localisée.

Selon le Docteur Juan Osorio, oncologue et coauteur de l’étude, « ces rémissions totales, obtenues sur un si petit groupe, sont tout simplement remarquables ». Les analyses de tissus ont confirmé une activité immunitaire intense à l’intérieur des tumeurs, avec infiltration massive de lymphocytes T, de cellules dendritiques et de lymphocytes B, formant des structures rappelant des ganglions lymphatiques. En l’activant, il déclenche la production de cellules T spécifiques capables de reconnaître et détruire les cellules cancéreuses. La version 2141-V11 améliore encore ce mécanisme en se liant plus fortement aux récepteurs CD40 et en sollicitant un second levier : le récepteur Fc, qui amplifie la réponse immunitaire.

Cette double action semble “reprogrammer” le microenvironnement tumoral, le rendant à nouveau sensible à la défense immunitaire — un enjeu majeur pour les cancers résistants aux thérapies actuelles. Pour le Docteur John Oertle, spécialiste du cancer à Envita Medical Centers, cette approche pourrait changer la donne pour les patients dont les tumeurs échappent aux immunothérapies classiques. Certaines formes avancées de cancer souffrent d’un phénomène dit d’“épuisement immunitaire”, où les cellules T deviennent inactives malgré leur présence. Les injections intratumorales de CD40 pourraient réactiver ces cellules et relancer une réponse globale de l’organisme.

Le docteur Oertle avertit toutefois que cette stratégie ne sera pas “universelle” : chaque patient présente un profil immunitaire propre, et l’efficacité du traitement dépendra de la capacité du système immunitaire à réagir. Les résultats encourageants ont conduit à l’ouverture de nouveaux essais cliniques aux États-Unis, en partenariat avec Duke University et Memorial Sloan Kettering. Près de 200 patients sont désormais suivis pour tester le 2141-V11 sur d’autres formes de cancer : vessie, prostate, et glioblastome – un redoutable cancer du cerveau. Les chercheurs veulent notamment comprendre pourquoi certains patients répondent au traitement et d’autres non. Les premières analyses montrent que ceux qui guérissent avaient, avant traitement, des taux élevés de cellules T actives. Identifier ces marqueurs pourrait permettre, à terme, de sélectionner les patients les plus susceptibles de bénéficier de la thérapie.

La recherche en immunothérapie a déjà révolutionné la cancérologie moderne, mais seuls 25 à 30 % des patients répondent durablement aux traitements actuels. Ce nouveau protocole, capable de provoquer des rémissions complètes à partir d’une injection locale, ouvre une voie d’espoir dans la prise en charge des cancers métastatiques. Si ces résultats préliminaires doivent être confirmés sur des cohortes plus larges, ils marquent peut-être le début d’une nouvelle génération de traitements personnalisés, où le corps lui-même devient la première arme contre la maladie.

The Rockefeller University : https://www.rockefeller.edu/news/38120-immunotherapy-drug-eliminates-aggressive-...

Des chercheurs commencent à cartographier le cerveau en développement
Lundi, 01/12/2025 - 19:51

« Le cerveau en développement est une structure incroyablement énigmatique : difficile d’accès, composée de nombreux types cellulaires distincts et en constante évolution », explique à l’AFP Aparna Bhaduri, chercheuse à l’Université de Californie à Los Angeles (UCLA) et membre du BRAIN Initiative Cell Atlas Network (BICAN). Cette phase précoce du développement cérébral, exceptionnellement longue chez l’humain, est cruciale. Les troubles du développement neurologique, qui entraînent des déficiences cognitives, comportementales ou psychomotrices importantes, affectent 15 % des enfants ou adolescents dans le monde, rappellent les scientifiques de ce vaste programme américain de recherche en neurosciences, qui publient un ensemble de 12 études dans Nature.

« À ce jour, aucune technologie ne permet d’observer cette séquence en continu dans un organisme vivant », rappelle Emily Sylwestrak, neuroscientifique à l’Université de l’Oregon, dans un article accompagnant la publication de ces études. Mais « en utilisant une série dense d’instantanés au cours du développement précoce, les chercheurs peuvent reconstruire par calcul le parcours d’une cellule, de sa forme progénitrice [précoce] à sa forme mature et différenciée », écrit dans Nature la biologiste, qui n’a pas participé aux différents travaux publiés. « La technologie a atteint un niveau qui nous permet d’observer les cellules une par une, ce qui nous donne accès à une quantité d’informations bien plus riche sur la manière dont les cellules évoluent pendant le développement, comme l’expression des gènes, les modifications de l’ADN, et l’évolution du contexte spatial », complète Mme Bhaduri.

Ensemble, les 12 études révèlent le calendrier précis et les schémas selon lesquels des cellules cérébrales croissent, se spécialisent et se connectent chez l’homme, mais aussi chez des primates non humains et la souris. La réalisation de cartes du cerveau chez les souris et les primates non humains est précieuse pour réaliser des comparaisons entre espèces et lever des difficultés liées à la rareté des échantillons post-mortem chez l’homme. Les neuroscientifiques ont notamment établi "l’arbre généalogique" le plus complet à ce jour d’un groupe particulier de cellules cérébrales chez la souris, appelées neurones inhibiteurs GABAergiques. Ces cellules agissent comme des freins, calmant l’activité excessive et facilitant la communication entre les différentes régions cérébrales. Chez l’humain, elles sont essentielles à toutes nos fonctions, du mouvement à la mémoire en passant par la gestion des émotions.

Une découverte marquante révèle que ces cellules parcourent de longues distances depuis leur lieu de naissance jusqu’à leur destination finale, traversant parfois des régions entières du cerveau. Les scientifiques ont aussi découvert que certaines d’entre elles continuent à se développer bien après la naissance. Ce qui suggère qu’il existe une fenêtre d’intervention plus longue qu’on ne le pensait, particulièrement pour les enfants ayant des difficultés de développement. Dans une autre étude, des scientifiques se sont penchés sur le cortex visuel, la région du cerveau qui traite les informations visuelles. Elles montrent que les expériences postnatales – voir, entendre, interagir avec le monde… – influenceraient le développement cérébral bien plus qu’on ne l’imaginait. D’autres études ont permis d’identifier des "fenêtres de vulnérabilité", des périodes où des maladies sont plus susceptibles d’apparaître.

« En comprenant quand et où les gènes clés s’activent pendant le développement, nous pouvons commencer à découvrir comment des perturbations dans ce processus peuvent conduire à des troubles comme l’autisme ou la schizophrénie. C’est une connaissance fondamentale qui ouvre la voie à de meilleurs diagnostics et à des traitements ciblés », explique Hongkui Zeng, co-autrice de plusieurs des études. « C’est une étape importante et enthousiasmante, mais il reste encore des régions cérébrales peu connues et des périodes de développement difficiles d’accès qui sont sous-représentées », note Mme Bhaduri. Si on compare ces travaux à des atlas géographiques, « nous connaissons le paysage général et certains pays sont très détaillés, mais une grande partie du monde reste à explorer ».

Nature : https://www.nature.com/articles/d41586-025-03641-0

Courir pour compenser les effets d'une mauvaise alimentation sur le cerveau
Lundi, 01/12/2025 - 19:48

Des scientifiques de l’University College de York, en Angleterre, ont montré que la course à pied peut corriger les effets néfastes de la malbouffe sur le cerveau. Ils l’ont constaté dans un essai réalisé avec des souris de laboratoire. Des rats adultes ont été nourris soit avec un régime alimentaire standard, soit avec des aliments riches en graisses et en sucre, pendant plus de sept semaines. Dans chaque groupe, la moitié des animaux avait accès à une roue de course. L’observation des rats a montré que la course avait un effet antidépresseur même lorsque les rats suivaient une alimentation déséquilibrée, « ce qui suggère qu'une activité physique régulière pourrait être bénéfique pour les personnes consommant des aliments de type occidental », commentent les auteurs.

Ils ont ensuite analysé le contenu cæcal des animaux : cela désigne la substance présente à l'intérieur du cæcum, une poche située au début du gros intestin. « Chez des animaux comme le rat, cette zone est riche en microbes intestinaux qui contribuent à la décomposition des aliments et à la production d'une grande variété de composés chimiques appelés métabolites », précisent-ils. Les scientifiques britanniques ont constaté que le régime alimentaire déséquilibré modifiait profondément le métabolisme intestinal. « L'exercice a influencé un sous-ensemble plus restreint de ces métabolites, rétablissant partiellement l’équilibre », relèvent-ils. « Trois métabolites connus pour jouer un rôle dans la régulation de l'humeur – l'ansérine, l'indole-3-carboxylate et la désoxyinosine – ont été réduits par le régime alimentaire occidental, mais ont rebondi avec l’exercice ». Quelle que soit l’alimentation des animaux, les scientifiques ont constaté que l’activité physique avait de légers effets anxiolytiques.

Grâce à des analyses sanguines, les scientifiques ont pu observer les effets de cette alimentation et du sport sur les hormones. Les rats sédentaires soumis au régime de type occidental avaient des taux d'insuline et de leptine nettement plus élevés, « mais ces augmentations étaient significativement réduites chez ceux qui faisaient de l’exercice », notent-ils. Pour le Docteur Minke Nota, auteur principal de l'étude, ce rééquilibrage hormonal pourrait expliquer comment l'exercice protège contre les effets comportementaux d'une mauvaise alimentation. En revanche, ils ont remarqué qu’une alimentation déséquilibrée annule l’un des effets positifs de l’activité physique : la création de nouveaux neurones. « Chez les animaux nourris avec des aliments standard, l'exercice a fortement augmenté la neurogenèse dans l'hippocampe, une région cérébrale impliquée dans les émotions et la mémoire », précisent-ils. « Cette découverte suggère que la qualité de l'alimentation pourrait fondamentalement modifier la capacité du cerveau à tirer profit de l'activité physique au niveau cellulaire ».

Genomic Press : https://genomicpress.kglmeridian.com/view/journals/brainmed/1/5/article-p1.xml

Une avancée prometteuse dans le traitement de l’anxiété et de la dépression
Lundi, 01/12/2025 - 19:45

17 % des Français sont affectés par des troubles anxieux et 14 % souffrent d’un état dépressif, selon l’Assurance maladie. Pour aider ces patients, un suivi psychothérapique peut être mis en place, associé, pour les cas de dépression modérée ou sévère, à la prise d’antidépresseurs. Néanmoins, comme le précise l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), ces traitements ne sont efficaces que dans près de 70 % des cas. Beaucoup de chercheurs travaillent actuellement à augmenter ce pourcentage. Dans une nouvelle étude, publiée dans la revue iScience, des scientifiques de l’Institute for Neurosciences (CSIC–Universidad Miguel Hernández d’Elche), en Espagne, viennent de faire une découverte importante. Ils ont identifié un ensemble de neurones dont l’hyperactivité pourrait être liée à l’anxiété et la dépression. Plus important encore, ils ont réussi à rétablir ce dysfonctionnement.

Les neurones en question sont situés dans l'amygdale, une zone du cerveau impliquée dans le traitement des émotions. « Nous savions déjà que l'amygdale était impliquée dans l'anxiété et la peur, mais nous avons maintenant identifié une population spécifique de neurones dont le déséquilibre suffit à déclencher des comportements pathologiques », explique Juan Lerma, l’un des auteurs. En laboratoire, les scientifiques ont travaillé sur des souris présentant des symptômes d'anxiété et de repli social. Les rongeurs étaient génétiquement modifiés pour surexprimer le gène Grik4, ce qui avait pour conséquence de déclencher une hyperactivité neuronale. Lors de leur expérience, les chercheurs ont normalisé l'expression du gène Grik4 dans les neurones de l'amygdale, ce qui a réduit l’hyperactivité des neurones. « Ce simple ajustement a suffi à inverser les comportements liés à l'anxiété et aux déficits sociaux », explique Álvaro García, premier auteur de l'étude.

PNAS : https://www.pnas.org/doi/abs/10.1073/pnas.2409556122

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