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Des neutrinos observés en pleine transformation
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Surnommées « particules fantômes » en raison de leurs interactions rarissimes avec la matière, les neutrinos sont très difficiles à observer. Or une collaboration internationale de physiciens vient non seulement de le faire mais surtout de détecter pour la première fois la transformation, ou « oscillation quantique de saveur », d’une forme de neutrinos particulière en une autre. Un véritable exploit.
Saveur
Les neutrinos sont des particules principalement issues du coeur des étoiles. Ils existent sous trois formes ou « saveurs » : muonique, électronique et tauique. « Jusqu’à présent, on n’avait jamais observé d’oscillation de neutrinos. On voyait que certains d’entre eux disparaissaient et on en déduisait par le calcul que ces neutrinos disparus oscillaient en une autre saveur. Mais il manquait encore une preuve expérimentale », explique Michel Gonin, physicien à l’Institut de physique nucléaire et de physique des particules (IN2P3) du CNRS et membre de la collaboration T2K à l’origine de ces résultats. Prévu par la théorie, le phénomène d’oscillation devait donc être mis en évidence expérimentalement pour être définitivement accepté.
L’expérience qui a permis cette observation est installée sur deux sites différents. A Tokai, sur la côte est du Japon, des neutrinos muoniques sont produits grâce à un accélérateur de particules qui les envoie à la vitesse de la lumière vers la côte ouest, située à 295 kilomètres. Sur cette côte se trouve le détecteur de neutrinos Super-Kamiokande, une cuve d’eau géante spécialement conçue pour observer ces particules fantômes.
Oscillation
Entre janvier 2010 et mars 2011, Super-Kamiokande a ainsi détecté 88 neutrinos créés par l’accélérateur de particules situé à Tokai. Sur ces 88 neutrinos, 82 étaient de saveur muonique, et six de saveur électronique. L’accélérateur ne produisant que des neutrinos muoniques, ces six neutrinos électroniques étaient donc issus de l’oscillation de six neutrinos muoniques, avec une certitude de plus de 99 %, selon Michel Gonin.
C’est dans l’observation expérimentale de l’apparition de neutrinos électroniques que réside la différence avec les travaux précédents. Des expériences comme Minos aux Etats-Unis ou Opéra en Italie, qui reposent sur le même principe d’émission et de détection de neutrinos, avaient uniquement mis en évidence la disparition de certains neutrinos muoniques. Les physiciens en avaient alors conclu par le calcul qu’ils s’étaient transformés en neutrinos électroniques ou tauiques.
En observant l’apparition de neutrinos électroniques, il ne fait donc plus de doute que le phénomène d’oscillation existe bel et bien. D’ailleurs, les physiciens de la collaboration Minos ont confirmé les résultats de T2K il y a quelques jours, sans toutefois atteindre la même précision.
L’expérience japonaise permet également de confirmer que les neutrinos ont une masse. Le modèle standard de la physique prévoit en effet que ces derniers en soient dépourvus. Or les lois de la mécanique quantique autorisent un phénomène comme l’oscillation uniquement si les particules ont une masse non nulle. L’expérience T2K a été interrompue suite au séisme survenu au Japon le 11 mars dernier. Elle devrait redémarrer d’ici la fin de l’année, avec pour objectif de reproduire tous ces résultats.
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