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Edito : Maintenant les choses sérieuses vont commencer

Le minerai de base de la société nouvelle dans laquelle nous entrons à une vitesse stupéfiante est l'information. Si nous voulons que la Paix s'installe durablement sur cette Terre, il faut que chaque habitant de notre planète ait le droit, mais aussi la capacité, de disposer gratuitement de ce minerai de base. Pour enrichir ce minerai il faut y ajouter du savoir et alors cette information se transforme instantanément en connaissance, qui va être de loin le produit à valeur ajoutée le plus répandu dans notre vaste monde, et ce dès ces prochaines années. Si à ces connaissances nous ajoutons de l'expérience, nous disposons alors de l'expertise qui est le produit le plus noble et le plus élevé en valeur ajoutée, qui pourra être généré par la Société de l'Information. Ce nouveau système de valeurs, s'appuyant sur la trilogie : « information, connaissance, expertise », est en train de se mettre en place sous nos yeux. C'est maintenant que les choses vont devenir sérieuses et que vont s'ordonner tous les éléments qui vont décider du destin de nos enfants et de nos petits-enfants pour tout le siècle qui bientôt va commencer. Dorénavant, le rang d'une nation ne reposera plus sur sa puissance militaire, ni même sur sa capacité de produire ou d'acquérir des biens matériels, mais bien sur son génie de pouvoir former son peuple pour qu'il puisse enrichir de son savoir le minerai abondant qui sera mis à sa disposition. Comme ils le font depuis plusieurs décennies, les Américains ont compris avant les autres que c'est bien « l'industrie de la connaissance » (e-knowledge) qui dominera le 21e siècle. Il suffit d'observer ce qui se passe actuellement en Californie et d'analyser les profils des start-up qui s'apprêtent à entrer sur le Nasdaq, dans ces prochains mois, pour voir l'ampleur du mouvement profond qui, actuellement, se développe aux États-Unis. Comme le dit, avec sa gouaille habituelle, John Chambers, Président de CISCO : « La prochaine killer-application (l'application qui dominera les autres) pour Internet sera l'éducation ». Ce commerce du savoir est en train de devenir l'activité en vogue aux États-Unis. Vous pouvez déjà vous inscrire à une université sur Internet, CyberStateU (http://www.cyberstateuniversity.com/), et son président, David Clarke, n'attend que la généralisation de l'Internet rapide, pour installer, dans le monde entier, des classes virtuelles. Plus de 5 000 Ingénieurs venant de 81 pays différents se sont réunis au sein d'une même structure, Hello Brain (http://www.hellobrain.com/) pour mettre leurs « cerveaux » à la disposition de tout un chacun à raison de 1 dollar par minute. Toutes les personnes qui, dans tous les domaines, détiennent des connaissances peuvent, en échange d'une somme souvent modique, faire bénéficier d'autres internautes de leur savoir-faire, en étant mis en contact par le forum Keen (http://www.keen.com/). Ces échanges de savoir peuvent porter sur des sujets complexes, comme l'informatique ou la biologie, mais aussi sur des savoirs beaucoup plus triviaux, comme la broderie, la cuisine ou le jardinage. Nous ne sommes là qu'au début du plus vaste bouillonnement qui, jusqu'à ce jour, n'avait encore jamais été généré par Internet. Merril Lynch, qui vient de produire une étude de quelque 300 pages sur cette industrie de la connaissance, estime que ce marché, encore balbutiant, pourrait atteindre 53 milliards de dollars (plus de 650 milliards de francs) dès ... 2003. La récréation est maintenant terminée. Nous, Européens, et plus particulièrement, nous, Français, nous avions peut-être le droit de nous poser des questions, de nous tâter, de tremper l'orteil dans l'eau pour voir si celle-ci n'était pas trop froide, pendant que nos Cousins d'Amérique se jetaient, sans retenue et sans peur, dans ce nouveau monde. Ces hésitations, ces questions existentialistes que nous aimons bien nous poser nous ont fait rater les premières marches du podium. Nous sommes absents du « hardware » (matériels informatiques). Nous sommes absents du logiciel d'exploitation. Mais ces premiers faux-pas n'auront pas de conséquences durables, si en temps utile, nous savons nous ressaisir pour faire le bond qui devrait nous permettre, en quelques années, de rattraper les Américains dans cette étape déterminante de « l'industrie de la connaissance ». En effet, chacun reconnaît que l'Europe, et surtout la France, savent mieux former leurs jeunes générations que ne savent le faire les Américains. Il suffit de voir, actuellement, la chasse que font les start-up américaines auprès de nos jeunes ingénieurs, pour prendre conscience du réel manque dont souffrent les États-Unis. Aussi, alors que jusqu'à maintenant notre continent était à la remorque de l'Amérique pour entrer dans la Société de l'Information, tous les pays européens, et plus particulièrement le nôtre, doivent prendre la tête dans cette compétition ouverte par la montée en puissance de l'Industrie de la Connaissance, et qui va décider du destin des prochaines générations. Nous en avons la capacité. Il faut que, tous ensemble, nous en ayons la volonté.

René TRÉGOUËT

Sénateur du Rhône

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