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Edito : L'agriculture « éconumérique » : l'agriculture du Futur !

En cette première semaine de Mars, aurait dû se tenir à Paris, comme chaque année, le Salon de l'Agriculture. Mais en raison de la grave pandémie qui actuellement frappe la France et l'ensemble de l'Humanité, ce salon a été supprimé. Aussi dans cette semaine qui, chaque année, rappelle l'importance de l'Agriculture pour notre Pays, je dédie mon édito à tous les jeunes agriculteurs mais aussi à tous les jeunes, garçons et filles, qui hésitent encore à choisir ce beau métier, chargé d'Avenir.

Selon les dernières prévisions de l’ONU, la population mondiale devrait augmenter de deux milliards d’individus d’ici 2050, pour atteindre 9,7 milliards d’êtres humains à cette échéance. Pour nourrir correctement cette population, la FAO (L’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture) considère qu’il est nécessaire d’accroître d’au moins 70 % la production agricole mondiale par rapport à son niveau actuel (4 milliards de tonnes), tout en réduisant de moitié le niveau effarant de produits alimentaires perdus ou gaspillés chaque année (1,3 milliard de tonnes par an), faute de solvabilité des consommateurs, mais aussi, on l’ignore souvent, de moyens de conservation et de transports suffisants pour acheminer ces denrées jusqu’aux consommateurs finaux.

Dans un tel contexte, on comprend mieux pourquoi l’ONU a placé l’agriculture et l’alimentation en seconde position de ses 17 objectifs de développement durable et a identifié les trois grands défis que l’agriculture mondiale doit absolument relever : maintenir un niveau de production suffisant pour faire face à l’accroissement de la demande, assurer un revenu décent aux paysans et enfin réduire sensiblement l’empreinte climatique et environnementale de l’agriculture.

En 2019, une étude sino-australienne publiée dans Nature (Voir Nature) a identifié les leviers à actionner simultanément pour parvenir à nourrir la planète correctement, et de manière durable, d’ici 30 ans. Le premier levier concerne la diminution de la place accordée aux produits d’origine animale dans nos assiettes. Au cours des 60 dernières années, la consommation moyenne de viande par habitant dans le monde a doublé, passant de 23 kg à 45 kg. Selon ces chercheurs, une telle évolution n’est pas tenable sur le long terme, car il n’y aura pas assez de terre, d’eau et de nourriture disponibles pour doubler à nouveau cette production mondiale de viande. Il est donc impératif de diminuer la consommation globale de protéines animales, au profit des protéines d’origine végétales et marines. Il est également nécessaire de diminuer le gaspillage alimentaire en améliorant les infrastructures de stockage, la chaîne logistique et les techniques de conservation des aliments.

Le deuxième levier concerne une profonde réorientation de l’élevage. Il faut 15 000 litres d’eau et 16 kilos de protéines végétales pour obtenir 1 kilo de protéines de bœuf, alors que 7 kilos de protéines végétales suffisent pour obtenir 1 kilo de protéines de porc, ou de poulet, et que 3 kg de protéines végétales peuvent produire un kg de poisson. Actuellement, plus de 80 % des céréales cultivées servent à l’alimentation animale. Pourtant, sur une même surface, on peut produire quatre fois plus de protéines végétales qu’animales. En Europe, 70 % des terres agricoles sont déjà dévolues à l’élevage et celui-ci consomme à présent autant de terres et de forêts que l’urbanisation…

Face à cette évolution intenable dans la durée, cette étude préconise de plafonner la part de produits d’origine animale dans le régime alimentaire à 40 % des calories quotidienne et favoriser la production de lait, de poulet et de poisson, en substitution au porc et au bœuf dont l’impact environnemental est bien plus élevé.

Enfin, le dernier levier pointé par l’étude passe par l’amélioration des rendements agricoles, tout en diminuant sensiblement le recours aux pesticides, les émissions de CO2 et la consommation d’eau agricoles, à l’aide de nouvelles techniques agronomiques et numériques respectueuses de l’environnement. Ce travail converge avec les résultats de la vaste et remarquable étude publiée en novembre 2017 et réalisée par l’Institut suisse de recherche sur l’agriculture biologique. Ce travail d’une ampleur sans précédent avait en effet montré qu’il était envisageable de nourrir l’Humanité en 2050, sans hausse de la superficie de terres agricoles, avec des émissions de gaz à effet de serre réduites, grâce à une agriculture 100 % biologique, mais à deux conditions impératives : diviser par trois le gaspillage alimentaire et la part de protéines animales dans l’alimentation humaine (Voir Nature Communications).

Il est intéressant de souligner qu’une autre étude concernant la France, réalisée en 2016 par l’association Solagro, arrivait à une conclusion assez similaire pour notre pays. Ces recherches montraient qu’une agriculture à 50 % biologique pourrait nourrir 72 millions de Français en 2050 sans augmenter la quantité de terres arables, tout en divisant par deux les émissions de gaz à effet de serre, la consommation d’énergie et celle d’eau et par trois la consommation de pesticides. Mais là encore, cette transition ne pourrait se faire qu’en supposant un changement profond de nos habitudes alimentaires, à commencer par une inversion de la proportion entre protéines animales (qui représentaient actuellement les deux tiers de notre apport protéique) et végétales dans notre alimentation (Voir Solagro).

Mais la mutation agricole mondiale ne sera pas seulement qualitative, elle sera aussi spatiale. Dans un monde où plus de 80 % des habitants résideront en milieu urbain dans 30 ans, le concept de ferme urbaine verticale ne cesse de se développer. L'agriculture verticale, grâce à une maîtrise parfaite de l’ensemble des paramètres (chaleur, luminosité, humidité, nourriture) superpose des cultures en hauteur, sur plusieurs étages, et permet ainsi un gain d'espace considérable et une production accrue. Depuis 10 ans, les fermes urbaines, verticales ou non, se multiplient partout dans le monde et en France. À Épaux-Bézu, près de Château-Thierry, dans l’Aisne, Gilles Dreyfus et Nicolas Seguy ont installé une ferme urbaine de plus de 3 000 m² au sol, à l'intérieur de laquelle les cultures sont réalisées en environnement contrôlé. Il s’agit de l’une des plus grandes fermes verticales d'Europe et elle devrait livrer cette année 100 tonnes de plantes dans toute la France, à l'horizon 2021. Ces végétaux sont cultivés en hydroponie, c’est-à-dire hors-sol, à l'aide d'un substrat irrigué au goutte à goutte, composé d'eau et de nutriments.

En France, la société Urban Ferm, implantée à Saint-Malo depuis 2016, propose des containers de « production agricole urbaine ». Il s’agit de modules tout équipées de 13 m², qui fonctionnent également en ferme hydroponique. Pour fonctionner, la Farm box n’a besoin que d’une prise de courant et d’un raccordement à l’eau. La production agricole est entièrement informatisée et paramétrable en temps direct. Dans sa dernière configuration, la Farm Box permettra de produire 5000 salades par mois sur 26 m2, rendement cent fois supérieur au mètre carré à celui de l’agriculture conventionnelle. Autre avantage, les lieux de production sont proches des consommateurs, ce qui diminue d’autant les impacts sur l’environnement. Depuis plus d’un an, une partie des plantes aromatiques vendues chez Leclerc Saint-Grégoire provient d’une Farm Box installée à proximité sur un parking.

Reste que ces fermes hydroponiques, si elles vont permettre de réintroduire des productions agricoles de proximité au cœur de nos villes, ne suffiront pas, loin s’en faut, à nourrir la planète et que seule l’agriculture de précision, que je préfère appeler « éconumérique », combinant à la fois les avancées de l’agronomie, la production d’énergie propre et les outils de prévisions et de gestion numériques, me semble en mesure de relever cet immense défi d’une alimentation suffisante, variée, saine et durable pour tous. En France, cette révolution est déjà en marche et l’on estime que 40 % de nos 450 000 exploitations utilisent déjà des outils numériques pour améliorer à la fois leur productivité et leur rentabilité, tout en diminuant au maximum l’utilisation de produits phytosanitaires.

L’un des fleurons de cette nouvelle agriculture 4.0 est la jeune société Sencrop, créée en 2016 à Lille par Martin Ducroquet, fils d'agriculteurs et diplômé de l'ESCP Europe, et Michael Bruniaux, docteur en électronique et informatique. Cette entreprise propose aux agriculteurs les services d’une plate-forme de données agro-météo, en lien avec des capteurs connectés. Les données remontent en temps réel tous les quarts d'heure et permettent d’alimenter des outils de conseils agronomiques ou de gestion de risques sur les cultures.

Grâce à cet outil, l’exploitant peut se connecter à tout moment sur son application mobile, via un Pc, une tablette ou un smartphone, pour surveiller ses parcelles et examiner les variations du climat : mesure de la pluviométrie, de l'hygrométrie, de la température, de la vitesse du vent, etc... Cette technologie permet de détecter en temps réel et d’anticiper l'arrivée potentielle de ravageurs ou de maladies. En se connectant à la plate-forme de données de Sencrop, l'exploitant a accès à un outil d'aide à la décision (OAD) alimenté par ses données et celles de logiciels tiers. Il peut alors choisir rapidement la stratégie d’action qui présente, pour sa situation particulière, le meilleur rapport coût-efficacité.

La start-up Ombrea fabrique, quant à elle, des ombrières intelligentes qui offrent aux plantes les meilleures conditions pour grandir. Toutes les dix minutes, des capteurs situés entre 2 mètres de hauteur et 30 centimètres sous le sol effectuent des relevés sur des paramètres comme la luminosité ou le taux d’humidité. Les ombrières modulent l’ombrage en fonction des données récoltées. Cette solution d’optimisation peut être appliquée aux vignes, mais également aux cultures de plein champ. Elle serait en mesure, selon certaines expérimentations, d’améliorer les rendements de plus de 50 %, sur la tomate et la fraise, tout en diminuant d’un tiers les besoins en eau.

Mais une autre solution prometteuse, dont je vous ai déjà parlé dans RT Flash, peut également permettre d’optimiser de nombreuses productions agricoles, l’agrivoltaïsme de nouvelle génération. Ce concept d’avenir utilise des panneaux solaires bifaciaux suspendus, laissant passer la lumière sur les deux faces. Ces panneaux sont pilotés par ordinateur et ne gênent pas le passage des engins agricoles. Ils permettent de produire, en moyenne annuelle, environ 345 000 kWh par hectare, de quoi alimenter en électricité une centaine de foyers (hors chauffage). En encourageant davantage cet agrivoltaïsme de nouvelle génération, comme le fait l’Allemagne, nous pourrions aller bien au-delà des objectifs prévus pour 2030 (18TWh de production électrique photovoltaïque par an, contre 4,5 aujourd’hui) et produire 29 TWH par an à l’horizon 2030 (ce qui correspondrait à 6 % de notre consommation électrique nationale), en nous fixant comme nouvel objectif d’atteindre un 1000ème de la surface agricole utile nationale, soit 290 km2, principalement dans le sud de la France, équipé en agrivoltaïque.

Dilepix propose pour sa part des solutions logicielles permettant de détecter, de localiser et d'interpréter des menaces ou des opportunités agronomiques, grâce à une analyse fine des images et de vidéos. L’outil proposé contrôle en temps réel et automatiquement les images de capteurs et de caméras installées sur les engins agricoles. En combinant des réseaux de neurones avec des algorithmes de vision par ordinateur, ce système est capable de détecter automatiquement des situations anormales dans les images d'une caméra. Cet outil peut aussi être embarqué sur des drones dédiés.

En matière de robotique agricole, la nouvelle génération de machines qui arrive sur le marché va également profondément transformer le métier d’agriculteur, en le recentrant sur les tâches de coordination, de prévision et de stratégies productives. Le semencier Deleplanque vient par exemple de présenter son prototype d’un nouveau robot de désherbage mécanique, baptisé BlueBob, qui sera commercialisé en 2023. L’appareil désherbe mécaniquement entre les rangs à une vitesse de 0,5 ha/h. Il évolue de manière autonome, guidé par GPS, à une vitesse maximale de 4 km/h, grâce à des moteurs électriques et une batterie fournissant actuellement une autonomie de 8h.

Autre exemple, le robot Ted qui sera commercialisé d’ici la fin de l’année. A compter de la mi-octobre, le robot va entamer une campagne de démonstrations dans plusieurs vignobles. Ted est un robot enjambeur électrique capable de travailler des demi-rangs de vigne. Ses arceaux modulaires lui permettent de s’adapter à différentes configurations de vignoble (vigne étroites, vignes hautes...).

On peut également citer le robot de désherbage Dino de la société Naïo technologies, qui a été récompensé au salon Agritechnicat, qui s’est tenu récemment à Hanovre. Ce robot autonome et électrique a été spécialement conçu pour le désherbage mécanique des cultures maraîchères en planches (salades, carottes, oignons). Ce robot très performant permet de supprimer l’usage d’herbicides chimiques, et de réduire la main-d’œuvre affectée au binage. Jusqu’à présent, Dino ne savait que détruire les plantes indésirables. Désormais, il est également capable, grâce à un puissant algorithme d’IA, de reconnaître toutes les espèces de légumes et de nettoyer l’espace libre entre deux plantes.

Ces robots agricoles ont vocation à s’insérer dans un système modulable de production agricole informatisée dont le cœur sera constitué par la nouvelle génération de tracteurs polyvalents et autonomes, qui vient de faire son apparition sur le marché. Parmi ces machines, on peut citer le Monarch, un tracteur électrique de 40 CV, d’une autonomie de dix heures, qui peut travailler avec ou sans chauffeur. Cet engin polyvalent et modulaire peut intervenir en viticulture, arboriculture et en maraîchage. Doté de lidars et de caméras à 360 degrés, il peut travailler de jour comme de nuit en toute sécurité et n’oublie pas de collecter et d’analyser 240 GO de données sur les cultures chaque jour. Quant à l’exploitant, il reçoit régulièrement, sur son smartphone et son Pc, des rapports d’activités et des messages en cas d’anomalies.

Le potentiel de ce marché très prometteur des outils robotiques et numériques agricoles n’a pas échappé à la Chine, et le fabricant chinois de drone DJI a dévoilé en novembre dernier son nouvel appareil dédié au monde agricole. Le drone Agras T20, qui se plie et se déplie en quelques secondes, peut être programmé en avance afin de fonctionner de façon autonome sur une tâche donnée. Grâce à son radar numérique omnidirectionnel, il peut reproduire la scène à 360° et en 3D, ce qui lui permet de détecter les obstacles dans toutes les directions et les contourner automatiquement. Résistant à la poussière et à l'eau, le drone peut voler dans la plupart des environnements même de nuit.

En France, le drone Abelio, avec ses 2 kilos pour plus de deux mètres d’envergure, peut survoler des champs pendant trois à douze heures. Grâce à son capteur, un logiciel établit en quelques minutes un diagnostic des parcelles surveillées, en prenant en compte les conditions météorologiques, ainsi que les données satellitaires et agronomiques, afin de détecter des maladies, la présence de mauvaises herbes ou encore un manque d’eau. En plus de limiter l’utilisation de pesticides, le drone Abelio permet une économie substantielle d’utilisation de produits phytosanitaires.

En octobre dernier, le laboratoire X d'Alphabet (maison-mère de Google) pour les technologies émergentes, "moonshot factory", a dévoilé une autre initiative, le projet Mineral, qui vise à améliorer la productivité de l'agriculture face à une demande croissante. Equipée d'un buggy monté sur roues et équipé de caméras, de multiples capteurs et d'IA, l'équipe parcourt les champs pour fournir aux cultivateurs des informations de haute qualité et basées sur des données concernant leurs cultures. Les agriculteurs peuvent alors prendre des décisions basées sur une meilleure compréhension du comportement de leurs plantes et de leurs cycles de production. La généralisation de tels portails numériques d’observation et de diagnostic agricole pourrait également contribuer de manière puissante à accélérer la transition vers une agriculture de précision dans notre pays.

Même si les outils robotiques et numériques tiendront une place importante dans l’agriculture de demain, ils devront s’appuyer sur les avancées en matière d’agronomie qui, seules, permettront d’améliorer la productivité agricole, dans un contexte de raréfaction des surfaces agricoles disponibles, tout en respectant l’environnement et en limitant drastiquement l’utilisation de pesticides. Une étude réalisée par des chercheurs de l’Institut Adolphe Merkle et du département de biologie de l’Université de Fribourg a récemment montré que les nanoparticules de silice amorphe, naturellement présentes dans des cultures alimentaires, comme les céréales, pouvaient stimuler la réponse immunitaire des plantes aux attaques des agents pathogènes (Voir Nature Nanotechnology).

Ces scientifiques ont réussi à synthétiser des nanoparticules de silice ayant des propriétés similaires à celles des plantes, et ont montré l’efficacité anti-bactérienne de ces nanoparticules sur plusieurs espèces de salades. Ces chercheurs précisent que ces nanoparticules se dégradent sans laisser de trace en présence d’eau et pourraient constituer une alternative peu coûteuse, très efficace, sûre et durable pour la protection des plantes contre les maladies.

Aux Etats-Unis des chercheurs du MIT sont allés encore plus loin : ils ont réussi à intégrer des nanotubes de carbone dans des feuilles d’épinards. Ces nanoparticules de dimension inférieure à 10 nm émettent un signal fluorescent en présence de certains polluants, comme l'oxyde nitrique. Ce signal est détectable par des caméras infrarouges, et il déclenche l'envoi d'un e-mail d'alerte aux chercheurs. Le but, à terme, est d'utiliser ces plantes pour alerter sur la pollution des eaux souterraines, mais aussi pour prévenir d'une sécheresse et donc des changements climatiques (Voir Futurism). Ces recherches ouvrent la voie, à terme, vers de véritables interfaces de communication homme/plantes.

Mais pourquoi, me dira-t-on, vouloir favoriser une telle mutation scientifique et technologique de notre agriculture, alors que notre pays est réputé pour sa puissance agricole, qui s’appuie sur des productions très diverses et de grande qualité ? Tout simplement parce que notre agriculture est en réalité bien plus fragile et menacée que l’on ne l’imagine. Un rapport instructif du Sénat sur l’avenir de l’agriculture en France, publié en mai 2019, sous l’égide du Sénateur Laurent Duplomb (Voir Sénat) dresse un tableau sans concession de notre agriculture et de son avenir. Selon ce travail, l’excédent agricole français tend à disparaître et a été divisé par deux entre 2011 et 2017 en euros courants. Résultat : notre pays est passé en 15 ans de la 3ème à la 6ème place des états les plus exportateurs de produits agricoles.

À ce rythme de décroissance, la France pourrait même connaître son premier déficit agricole en 2023, selon ce rapport éclairant. Les raisons de cette dégradation sont multiples. D’abord, l’agriculture française doit faire face à la diminution continue de sa surface agricole utile, qui s’est réduite de 17 % au cours des 60 dernières années, soit une perte de près de 60 000 km². Résultat de cette évolution alarmante, la production agricole globale de notre pays stagne depuis une vingtaine d’années. Autre évolution sur le temps long, l’agriculture française a perdu les deux tiers de ses actifs depuis 50 ans et cette hémorragie humaine se poursuit, bien qu’au rythme plus lent de 1 % par an depuis 5 ans. Enfin, la France doit subir une concurrence de plus en plus féroce, à la fois des autres pays européens et des nouvelles puissances agricoles émergentes, qui ne respectent pas les mêmes contraintes sanitaires et environnementales.

Face à cette réalité implacable, à ce nouveau contexte économique mondial, aux impératifs climatiques, mais aussi aux nouvelles exigences des consommateurs, qui veulent avoir accès à des produits plus sains, notre agriculture, si elle veut survivre, n’a donc pas le choix : elle doit entamer sa révolution "éconumérique", qui lui permettra à la fois d’améliorer ses rendements, sa productivité et sa compétitivité internationale, et de mieux diversifier ses productions tout en respectant l’environnement, en s’élargissant vers la production délocalisée d’énergies propres (solaire, biométhane) et en offrant à nos agriculteurs de meilleures conditions de vie, des revenus décents et un métier tourné vers l’avenir, et profondément revalorisé.

René TRÉGOUËT

Sénateur honoraire

Fondateur du Groupe de Prospective du Sénat

e-mail : tregouet@gmail.com

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