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La gratuité, nouveau virus informatique

Pour vendre plus, ne vendons pas": ainsi pourrait se résumer la stratégie d'un nombre croissant d'entreprises sur l'Internet. Dernier exemple en date, Qualcomm, l'éditeur du logiciel de courrier électronique Eudora, a annoncé jeudi que la prochaine version du produit, prévue pour le premier trimestre 2000, serait gratuite. Qualcomm ne renonce pas pour autant à gagner de l'argent: il demande simplement aux internautes d'accepter la présence d'une petite fenêtre publicitaire qu'il promet discrète. Les utilisateurs publiphobes pourront opter pour une version payante ou une version allégée - la plus utilisée à ce jour - dudit logiciel. Dans tous les secteurs liés à l'Internet, on voit se multiplier les offres gratuites, soutenues par la publicité ou le commerce électronique: ce furent dans un premier temps l'accès aux pages web, puis les logiciels de navigation. Suivirent des offres d'accès gratuit au réseau, et même de micro-ordinateur... Qualcomm n'est pas le premier à reconvertir un logiciel payant en logiciel gratuit: fin août, le fabricant informatique Sun Microsystems a annoncé le rachat de l'éditeur de logiciels Star Office et la distribution gratuite, sur l'Internet, de ses logiciels de bureautique (traitement de texte, tableur...). Pour Microsoft, dont l'essentiel des recettes provient des licences d'utilisation des programmes, Star Office constitue une menace sérieuse. Pour Microsoft, la menace de la gratuité est double: sur un autre front, se développe à toute allure le phénomène des logiciels libres, en premier lieu le système d'exploitation Linux. Certains y voient les prémices d'une économie fondée sur le don, qui serait amenée à s'étendre à d'autres domaines. Dans Cybercommunism, un opuscule récent diffusé sur le Net , un professeur anglais, Richard Barbrook, observe que les créateurs de logiciels libres sont en train de "supplanter le capitalisme". Rien de moins. Les membres de cette communauté construiraient une nouvelle forme d'échanges qui défierait les lois du marché. "Dans l'Internet, travailler ensemble en faisant circuler des dons est devenu une expérience quotidienne pour des millions de gens. Comme ils le font dans leur travail, ils collaborent à des projets collectifs pendant leur temps libre. Libéré de la discipline immédiate du marché, le travail peut devenir un cadeau." La simple participation à un groupe de discussions serait l'expression d'un don d'information. Richard Barbrook observe que Karl Marx lui-même avait prédit que "tôt ou tard, le développement des forces productives démocratiseraient les rapports de production". C'est le succès du capitalisme qui aboutirait à l'émergence d'une infrastructure (l'Internet) qui le subvertirait. Sans aller jusqu'à imaginer un nouveau système économique, Gabriel Dabi-Schwebel, un consultant chez Alcatel, estime que, grâce à l'Internet, on peut "s'enrichir en donnant". C'est que "la valeur n'est plus dans la matière mais dans l'information et l'information n'est pas une ressource rare. Du coup, "si le prix représente la rareté, l'optimum entre l'offre et la demande, il était, dans l'économie traditionnelle, normal de payer pour acheter un bien dont on avait besoin, normal de rémunérer quelqu'un qui travaillait. Aujourd'hui, il faudrait plutôt être payé pour acheter et payer pour travailler".

libération : http://www.liberation.com/quotidien/semaine/991214marx.html

CYBER-COMMUNISM: how the Americans are superseding capitalism in cyberspace

http://www.nettime.org/nettime.w3archive/199909/msg00046.html

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