RTFlash

Vivant

Dépression résistante : la piste thérapeutique des ultrasons

Une nouvelle étude associant des chercheurs et médecins du GHU Paris, de l’Inserm, du CNRS, de l’Université Paris Cité et l’ESPCI Paris-PSL, publiée dans le journal Brain Stimulation, montre des résultats prometteurs d’un traitement sur cinq jours consécutifs basé sur l’utilisation d’ultrasons focalisés de faible intensité. Cette technologie innovante permet de moduler l’activité des régions cérébrales profondes impliquées dans la dépression, mais cette fois-ci de façon non-invasive. Les ultrasons ont la propriété de se propager dans les tissus humains et de stimuler à distance la zone cérébrale sur laquelle ils sont concentrés, par action mécanique, en déclenchant l’ouverture de canaux mécano-sensibles. Cependant, l’irrégularité de l’épaisseur du crâne, déviant les ultrasons et limitant la capacité à les concentrer précisément sur la zone à cibler, a empêché le développement de cette technologie durant plusieurs décennies.

Au GHU Paris site Sainte-Anne, les psychiatres et chercheurs Marion Plaze et David Attali, dans le service du Docteur Thierry Gallarda, ont participé au développement et à la mise en œuvre d’un dispositif portable innovant reposant sur l’utilisation de lentilles acoustiques concentrant les ultrasons avec une précision inédite. Ces lentilles permettent de compenser les distorsions des ondes ultrasonores induites par la traversée de la boîte crânienne. En effet, les chercheurs sont parvenus à modéliser l’effet du crâne sur les ultrasons et à en déduire la forme optimale de ces lentilles acoustiques, fabriquées de façon unique et personnalisée pour chaque patient. La technologie des lentilles a été développée à l’Institut physique pour la médecine (Inserm, ESPCI Paris – PSL, CNRS) par les chercheurs et ingénieurs Jean-Francois Aubry (CNRS), Thomas Tiennot (ESPCI) et Mickael Tanter (Inserm), co-auteurs de l’étude, qui ont breveté la technologie et co-fondé la startup SonoMind avec Jeremy Bercoff, président, et Philippe Chapuis, directeur technique, dans le but de d’accélérer le transfert clinique de cette technologie.

La stimulation transcrânienne ultrasonore de précision ainsi obtenue représente une avancée technologique de premier plan dans le domaine de la médecine personnalisée et des neurosciences. Elle permet pour la première fois de stimuler de façon ciblée, précise et non-invasive, les structures cérébrales profondes, telles que la région cingulaire subcalleuse, avec un dispositif transportable. L’essai clinique consistait en 5 jours consécutifs de traitements par ultrasons de cette zone cérébrale. Ce protocole a été réalisé sur 5 patients souffrant de dépression sévère et résistante aux médicaments dans le but de tester la sécurité de cette nouvelle approche. Les résultats sont encourageants, avec l’absence d’événement indésirable grave et une excellente tolérance : les patients rapportaient ne ressentir aucune gêne ni douleurs durant les séances. Les scores de sévérité de la dépression ont de plus progressivement diminué au fil des jours de traitement, avec une réduction moyenne de plus de 60 % de la sévérité de la dépression au cinquième jour du protocole. « Bien que les résultats soient encourageants, il faut les interpréter avec prudence, car il s’agit d’une première étude de sécurité sur un nombre limité de patients et sans groupe placebo » précisent les chercheurs.

Des études complémentaires sont nécessaires, et déjà planifiées, sur des cohortes plus importantes de patients. Si les effets thérapeutiques rapides et marqués sont confirmés, ainsi que le profil d’innocuité de la technique et la persistance des effets dans le temps, la stimulation transcrânienne par ultrasons pourrait voir ses applications se multiplier ces prochaines années et s’étendre en psychiatrie, addictologie et neurologie, au bénéfice de nombreux patients. Ces travaux sont l’aboutissement de 25 années de recherche sur les méthodes de focalisation des ultrasons à travers le crâne, 15 années sur la modulation de l’activité cérébrale par ultrasons et 7 années de collaboration entre les psychiatres – chercheurs du GHU Paris et de l’Institut de Psychiatrie et Neurosciences de Paris (Inserm/Université Paris Cité), et les chercheurs de l’Institut physique pour la médecine (CNRS/ESPCI Paris-PSL/Inserm).

Brain Stimulation : https://www.brainstimjrnl.com/article/S1935-861X(25)00099-3/fulltext

Noter cet article :

 

Vous serez certainement intéressé par ces articles :

Recommander cet article :

back-to-top