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Y-a-t-il une dépendance au "fast food"

De nouvelles découvertes, portant sur les effets biologiques de la restauration rapide, montrent que devenir obèse à cause d'une alimentation trop grasse et trop sucrée n'est pas simplement imputable à un défaut de maîtrise de soi. Certains scientifiques pensent qu' une consommation abondante d'aliments excessivement riches en graisses et en sucres peut provoquer dans le cerveau et dans l'organisme des modifications biochimiques durables qui se traduisent, dans certains cas, par une véritable dépendance, à ce type de nourriture. La différence entre un repas de fast-food et un repas de cuisine familiale réside dans la quantité de calories et de graisses délivrées en une seule fois. Les apports journaliers recommandés par le ministère de l'Agriculture américain pour un homme sont de 2 800 kilocalories, les graisses étant limitées à 93 grammes. Un seul repas dans un fast-food, avec hamburger, frites, boisson et dessert, peut fournir l'intégralité de cette ration. Or un excès d'absorption de calories et de graisses est capable de provoquer chez un individu des modifications physiologiques réduisant au silence les signaux hormonaux qui lui commandent habituellement de poser sa fourchette. Les chercheurs ont découvert que certaines hormones jouent un rôle dans la régulation de l'appétit. Dans des conditions normales, ces hormones contrôlent l'alimentation et aident à maintenir un poids stable. La leptine, par exemple, est sécrétée continuellement par les cellules adipeuses, et son niveau dans le sang indique l'état des réserves du corps en graisses. Le signal est déchiffré par l'hypothalamus, région du cerveau qui coordonne le comportement alimentaire et sert à maintenir les réserves stables. Mais les personnes prenant du poids développent une résistance à l'action de la leptine, explique Michael Schwartz, endocrinologue à l'université de l'Etat de Washington, à Seattle : "Le cerveau perd sa capacité à tenir compte du signal envoyé par ces hormones au fur et à mesure de l'augmentation du taux de graisses dans le corps." Plus ces individus grossissent et plus ils produisent de leptine, plus l'hypothalamus y devient insensible. Finalement, l'hypothalamus interprète ce taux élevé comme étant normal, et par la suite considère systématiquement les chutes de leptine causées par une perte de poids comme un avertissement de manque de nourriture. Chacun peut perturber son système de régulation des graisses par la leptine bien avant de devenir obèse. Les dernières recherches suggèrent que quelques repas gras suffisent. Durant une étude rendue publique en décembre dernier, le physiologiste Luciano Rossetti, de la faculté de médecine Albert Einstein de New York, a soumis des rats à une alimentation riche en graisses. Il a découvert que les animaux avaient perdu presque toute leur capacité de réponse à la leptine après seulement soixante-douze heures de ce régime. Sarah Leibowitz, neurobiologiste à l'université Rockefeller de New York, dispose d'autres preuves indiquant que manger dans les fast-foods entraîne un besoin d'y retourner. Ses expériences montrent que la consommation d'aliments gras peut rapidement remodeler le système hormonal de l'organisme, qui exige alors encore plus de graisses. Ainsi les niveaux de galanine, peptide cérébral qui stimule l'alimentation et ralentit la dépense d'énergie, augmentent chez les rats ayant une alimentation riche en graisses. Sarah Leibowitz a découvert qu'il suffit d'un seul repas riche en graisses pour stimuler l'expression de la galanine dans l'hypothalamus. "C'est le point de départ d'un cercle vicieux", souligne-t-elle. D'autres travaux suggèrent que se gaver de graisses et de sucres provoque des transformations cérébrales habituellement associées à des drogues comme l'héroïne. Il est déjà fermement établi qu'alimentation et accoutumance sont étroitement liées. Pour de nombreux chercheurs étudiant les dépendances, les drogues créant un état d'accoutumance, comme la cocaïne et la nicotine, exercent leur attraction irrésistible en détournant les circuits de "récompense" du cerveau. John Hoebel, chercheur à l'université Princeton, dans le New Jersey, a voulu vérifier si nous pouvions devenir dépendants aux opioïdes naturels que nous libérons lorsque nous mangeons une grosse quantité de sucres. Il a récemment montré que des rats soumis à un régime contenant 25 % de sucre deviennentanxieuxlorsque ce sucre leur est tout à coup retiré. Leurs symptômes ressemblent à ceux d'une personne souffrant d'un manque de nicotine ou de morphine (claquements de dents, tremblements). Et, quand John Hoebel a distribué de la naloxone aux rats, un médicament qui bloque les récepteurs d'opioïdes, il a observé une chute brutale des niveaux de dopamine dans leur noyau accumbens et une libération d'acétylcholine dans leur cerveau. Ce sont les mêmes mécanismes que l'on observe chez une personne en manque d'héroïne. Même si les mécanismes en jeu sont encore loins d'être élucidés, il apparaît de plus en plus clairement que la consommation régulière d'un certain type de nourriture, trop grasse et trop sucrée, peut entraîner chez certaines personnes un véritable comportement addictif, proche de celui provoqué par la consommation de drogues.

BBC : http://news.bbc.co.uk/2/hi/health/2707143.stm

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