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Edito : Vers la carte personnelle universelle

La plupart des pays développés ont décidé de rendre obligatoires pour leurs ressortissants des papiers d'identité électronique munis d'une puce contenant, d'une part, des données biométriques et, d'autre part, un numéro personnel d'identification faisant office de signature électronique.

Pour la France, les données biométriques retenues sont les empreintes digitales et le visage avec la possibilité, dans une phase ultérieure, d'intégrer d'autres données comme l'empreinte de l'iris ou, à plus long terme, l'ADN. L'avantage de ces données biométriques, quasiment impossibles à falsifier, est qu'elles permettent, surtout si on les recoupe, d'identifier de manière presque absolue le titulaire de la carte.

Cette carte d'identité nationale électronique actuellement en gestation répond à une double nécessité : il s'agit d'une part de mettre un terme au trafic très important de faux papiers qui facilitent les activités criminelles en tout genre. D'autre part, cette carte électronique va permettre une fiabilité d'identification qui ne pourra que favoriser le développement des transactions électroniques de toute nature et faciliter les formalités et démarches administratives et sociales.

Le programme INES (Identité Nationale Electronique Sécurisée) est un projet global consistant à fusionner et sécuriser les procédures de demande de passeport européen biométrique et de carte nationale d'identité électronique afin de lutter contre les fraudes à l'identité, sources de nombreuses infractions (immigration illégale, fraude aux allocations, aux droits sanitaires et sociaux, escroqueries...).

Le passeport intègre une puce sans contact contenant la photo et les empreintes de son titulaire. La carte d'identité nationale électronique s'inscrit dans le cadre du projet ADELE. Outre sa fonction d'identification, elle aura aussi vocation à simplifier l'obtention d'autres titres et permettre l'accès à l'administration électronique. Elle sera divisée en blocs distincts et sécurisés.

Le premier relatif à l'identité de la personne (état civil, adresse, empreinte des deux index, photo, signature manuscrite, préfecture ayant délivré la carte et son numéro). L'identité du porteur de la carte sera accessible par un procédé sans contact, au profit des seules autorités habilitées (délivrance des titres, gendarmerie et police dans le cadre de contrôles d'identité et des enquêtes judiciaires).

Le second permettra l'authentification de la carte (avec un code secret) sans que les données personnelles de son titulaire ne soient transférées.

Un bloc « signature électronique » est également prévu pour signer des documents authentiques de l'e-administration ou toute autre transaction électronique privée. Enfin, un bloc « portfolio personnel » permettra aux citoyens de stocker des informations complémentaires pour faciliter leurs transactions électroniques.

Cette carte électronique est donc appelée à devenir à terme une véritable carte universelle polyvalente qui se substituera aux nombreuses cartes que chacun utilise chaque jour : carte d'identité, carte bancaire, carte de sécurité sociale, carte d'accès...

Grâce à cette carte universelle biométrique et à l'inclusion d'une puce RFID, il sera possible dans quelques années de régler nos achats, démarrer notre voiture, prendre le bus, retirer de l'argent ou transmettre notre dossier médical personnel à notre médecin, de la manière la plus simple, la plus rapide et la plus naturelle qui soit, sans même sortir notre carte personnelle de notre poche.

Mais on peut aller plus loin et imaginer que le support matériel de nos données personnelles puisse lui-même se diversifier. Ces données biométriques personnelles pourraient alors être intégrées, selon les choix et les besoins de l'utilisateur, dans une carte type carte de crédit, ou dans un terminal numérique du type mobile, qui deviendrait alors un véritable terminal universel sécurisé. On peut aussi imaginer que, dans certains cas, et pour les personnes qui en feront expressément la demande, les données personnelles et biométriques puissent être inscrites dans une minuscule puce RFID implantée sous la peau, ce qui présenterait de grands avantages en matière de télémédecine et de télé-assistance, notamment pour les personnes âgées ou malades.

Quant aux menaces du type Big Brother d'atteintes aux libertés individuelles que certains brandissent en évoquant cette carte d'identité électronique, on ne peut les écarter d'un revers de main mais il convient d'éviter les procès d'intention injustifiés. Notre Etat de droit est tout à fait capable, comme dans le cas de la vidéosurveillance et des données informatiques, de mettre en place des garde-fous juridiques efficaces pour protéger la vie privée et les libertés individuelles.

L'Etat et la justice devront également veiller à ce que la puce RFID contenue dans cette future carte ne puisse pas être activée et lue à l'insu de l'utilisateur et ne soit accessible par les autorités que dans des conditions légales strictement définies.

Pour garantir la légitime protection de la vie privée, l'Etat a retenu la création de trois bases nationales distinctes, un fichier central d'état civil sous l'autorité du ministère de la justice, et deux autres pour les empreintes digitales et la photo d'identité. La consultation et la mise en relation de ces fichiers seront encadrées par un système d'habilitation nominatif très strict.

Mais contrairement à ce que les opposants de principe à la carte d'identité électronique voudraient nous faire croire, nos concitoyens sont globalement très majoritairement favorables au projet de carte nationale d'identité électronique (à 74 %), à la constitution d'un fichier informatique national des empreintes digitales pour lutter contre les fraudes à l'identité (à 75 %) et au caractère obligatoire de la carte (à 69 %), selon un sondage IPSOS récent.

En tout état de cause, je suis persuadé que les avantages d'une telle carte universelle et polyvalente seraient bien supérieurs à ses éventuels inconvénients car cette carte universelle faciliterait de manière considérable tous les actes de notre vie quotidienne (démarches administratives et sociales, soins et achats en ligne notamment), permettrait de lutter de manière plus efficace contre la criminalité organisée et le terrorisme et deviendrait un vecteur majeur de la société numérique. Je fais donc le pari que cette carte universelle nous paraîtra dans quelques années aussi indispensable et naturelle que notre mobile ou notre PC aujourd'hui.

René Trégouët

Sénateur honoraire

Fondateur du Groupe de Prospective du Sénat

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