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Edito : Très haut débit : rapport de l'ARF : Réseau de fibres optiques : Oui/DSL augmenté : Non

Le rapport d'étude sur la couverture très haut débit des territoires qui vient d'être publiée par l'ARF (Association des Régions de France ) et l'AVICCA) et qui a été réalisée par Laurent Depommier-Cotton au nom de PMP est très intéressant car il met en évidence, avec clarté, toute l'importance du défi que va devoir relever la France pour entrer dans l'ère du très haut débit.

Et, il y a urgence ! En début d'année 2008, le rapport Attali nous avait déjà appris que 8 millions de foyers japonais et 6 millions de foyers aux Etats-Unis étaient déjà raccordés au très haut débit grâce à la fibre optique, alors que toute l'Europe réunie ne comptait, au même moment, qu'un million de foyer raccordés. Le Gouvernement Japonais qui, dans le cadre d'un plan stratégique, avait décidé, dès l'an 2000, que le Japon serait le Pays le plus avancé du Monde dans les TIC ubiquitaires, avait alors fixé l'objectif, particulièrement ambitieux, de connecter 90 % des ménages japonais au très haut débit, et ce, dès 2010. Le rapport de Laurent Depommier-Cotton nous apprend que cet objectif sera atteint, et même en avance sur son échéance.

Certes, le rapport de l'ARF nous montre qu'en raison de la répartition des populations et de la géographie, il est beaucoup plus difficile de trouver un équilibre économique pour déployer les réseaux très haut débit en fibre optique, en France, qu'au Japon où les densités de populations sont souvent beaucoup plus importantes. Mais, comme cela est fort bien dit dans le rapport, la France, depuis les 150 ans qu'elle construit de grands réseaux (chemin de fer, électricité, eau, téléphone, etc...) a toujours su trouver les réponses adaptées pour construire ces réseaux, même dans les régions les plus isolées.

Pourquoi ne serait-elle pas capable de le faire avec la fibre optique ?

Comme va le montrer aux Etats-Unis le Président Barack Obama, dans quelques semaines, ce qui est nécessaire pour lancer un programme d'une telle ampleur et qui va changer en profondeur la vie de centaines de millions de citoyens, c'est une volonté politique au plus haut niveau qui entrainera avec elle tout un peuple et les entreprises qui doivent prendre la décision d'investir dans ce secteur.

Mais, si nos gouvernants se décidaient, enfin, à prendre ce dossier essentiel à bras le corps, il ne faudrait surtout pas qu'ils fassent d'erreur, et prennent des décisions erronées.

Or, il y a, dans le rapport de l'ARF, un point important qui me fait souci.

Laurent Depommier-Cotton suggère, pour que nous allions plus vite, que nous passions par une phase intermédiaire de DSL augmenté s'appuyant toujours pour la partie terminale allant jusqu'au client sur le cuivre de la vieille paire de fils en cuivre du téléphone.

Le DSL augmenté permettrait, théoriquement, de dépasser les 20 Mégabits sur les 2/3 des lignes ADSL de France. Pour cela, il faudrait habiter à moins de 1,5 km d'un répartiteur ou d'un sous-répartiteur opticalisé. Le rapport évalue à 5 milliards d'euros cette phase transitoire du DSL augmenté.

Je dis bien « phase transitoire », car les 20 Mégabits du DSL seront très vite insuffisants. En effet, l'opticalisation de 4 millions de foyers dans les grandes villes qui est maintenant en cours de réalisation (il faut saluer l'accord intervenu cette semaine entre les 3 opérateurs leaders dans le déploiement des réseaux en fibre optique, France Telecom, SFR et Numéricable pour déployer en commun les réseaux internes aux immeubles) va accélérer la promotion des abonnements à 100 mégas, en attendant le giga dans un petit nombre d'années.

Certes, si l'argent public réservé au déploiement du DSL augmenté est uniquement et strictement réservé à la construction d'artères optiques qui desserviront les sous-répartiteurs, et si les règles régissant ces ouvrages respectent les principes d'ouverture et de neutralité des réseaux posés par l'Article L.1425-1 du CGCT, vis-à-vis de tous les opérateurs, ces investissements seront utiles car ces artères optiques s'intègreront ultérieurement et de façon naturelle au réseau national de très haut débit.

Mais, disons-le très clairement : Les Collectivités Locales doivent cesser tout investissement dans des équipements strictement dédiés aux technologies DSL (cuivre) même en DSL augmenté et se tourner résolument vers les réseaux en fibres optiques.

En effet, seule la fibre optique est pérenne et se montre capable de relever les défis que l'Homme va devoir affronter dans ce prochain siècle.

Dans son rapport, Laurent Depommier-Cotton affirme que 90 % des ménages français pourraient disposer du FTTH (fibre optique dans sa maison, dans son appartement), en 2020, si, sans retard, l'Etat et les Collectivités Locales arrivaient, pendant 10 ans, à mobiliser, chaque année, 1 milliard d'euros pour subventionner la construction de réseaux en fibres optiques. (Dans cette somme ne sont pas intégrés les efforts de péréquation que devraient fournir les habitants des villes pour équiper les régions rurales.)

L'objectif n'est pas hors d'atteinte, même dans les temps difficiles que nous traversons. Ce milliard d'euros annuel pendant dix ans changerait le destin de la France. Mais il faut bien comprendre que pour relever ce défi hors du commun il faut que la volonté politique au plus haut niveau de l'Etat s'exprime avec force et que les diverses administrations décident, enfin, d'enlever tous les obstacles devant des opérateurs qui hésitent à investir dans notre Pays tant tout y est compliqué.

René Trégouët

Sénateur honoraire

Fondateur du Groupe de Prospective du Sénat

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