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La technique de l'insecte stérile va être testée pour lutter contre le paludisme et le chikungunya

Trois mille moustiques mâles stériles de type Anopheles arabiensis vibrionnent dans les filets des laboratoires de l'Agence internationale pour l'énergie atomique (AIEA) situés à Seibersdorf, dans la banlieue de Vienne (Autriche). Ces spécimens sont utilisés pour tester la technique de l'insecte stérile (TIS), déjà pratiquée depuis une trentaine d'années sur la mouche à fruits.

Appliquée aux populations d'anophèles du Soudan et d'aèdes de La Réunion, elle a pour but d'éradiquer les vecteurs du paludisme et du chikungunya. Son principe est d'une extrême simplicité : lâchés en masse, les mâles stériles ont pour mission de circonvenir les femelles locales. Leur accouplement n'engendrant aucune descendance, à l'issue d'opérations répétées, la population disparaît par extinction naturelle. La technique est d'une plus grande complexité, puisqu'il faut d'abord isoler les mâles - pas question de lâcher des femelles, responsables de la propagation des virus -, puis les stériliser. Dans les deux cas, on procède par irradiation, en recourant à l'usage du cobalt 60 ou bien des rayons X.

Les insectes de laboratoire de Seibersdorf, descendants de spécimens capturés au Soudan en 2005, n'ont encore à leur actif que deux opérations de terrain. Encore ne s'agissait-il que de lâchages expérimentaux, destinés à appréhender leur comportement et à mesurer l'ampleur de la mobilisation nécessaire le jour J. La production massive de mâles stérilisés destinés à être lâchés aux alentours de Dongola, une région agricole de la vallée du Nil très peuplée et affectée par un paludisme endémique, aura lieu à Khartoum. Le site a été choisi en raison de sa proximité avec un gisement d'uranium permettant l'irradiation au cobalt 60. Les entomologistes de Seibersdorf espèrent parvenir, en 2010, à une production quotidienne d'un million d'individus. Ce qui, à raison d'un lâcher par jour durant plusieurs mois, devrait conduire à l'extinction des anophèles locaux.

L'île de La Réunion, victime d'une terrible épidémie de chikungunya en 2005 et 2006, présente, par son isolement géographique, des conditions d'expérimentation idéales pour l'application de la TIS. L'AIEA et l'Institut de recherche pour le développement (IRD) ont signé un accord de coopération le 30 septembre. Il prévoit d'associer l'expertise des entomologistes de l'institut français, qui étudient depuis, plusieurs années, les populations d'Aedes albopictus, vecteurs du chikungunya et de la dengue, et d'Anopheles arabiensis, propagateurs du paludisme, aux techniques de séparation des sexes et de stérilisation développées par l'AIEA.

Dans un premier temps, il s'agira de tester l'applicabilité de la TIS à La Réunion où la lutte a été menée jusqu'à présent à coups de bombardement d'insecticide. "La TIS permet de s'affranchir des insecticides, souligne Didier Fontenille, responsable à l'IRD du projet réunionnais. Le moustique oeuvre lui-même à son extinction, l'environnement n'est pas agressé."

La phase expérimentale, dont le coût est évalué à 3 millions d'euros, devrait être menée sur quatre ans et financée par le ministère français de la santé, en partenariat avec le conseil régional de La Réunion et les organismes de recherche. Si la TIS s'avère compétitive, La Réunion se lancera dans la production d'anophèles et d'aèdes stériles à l'horizon 2015.

LM

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