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Le sous-sol décodé par les "codas" sismiques

Une méthode qui pourrait permettre aux géologues de connaître l'hétérogénéité des sous-sols de la Terre, même dans des zones à faible sismicité, a été découverte par des chercheurs du CNRS à Grenoble. Jusqu'à présent, n'étaient possibles que des analyses locales, à partir d'ondes directes enregistrées à proximité des séismes. La technique est détaillée dans la revue Science du 24 janvier: en étudiant ces ondes secondaires ou "codas", l'équipe de Michel Campillo a montré qu'il était possible d'obtenir un signal d'ondes directes. De même qu'en musique la "coda" (queue) indique la fin d'un morceau, les "codas sismiques", ultimes ondes visibles après un tremblement de terre, se propagent à travers la roche pendant plusieurs minutes. Résultant d'une combinaison des ondes directes, elles subissent les nombreuses hétérogénéités du sous-sol. Pendant leur trajet, elles traversent des milieux aux propriétés différentes qui provoquent leur diffraction. "Avec l'oeil, nous voyons loin car le faisceau optique est direct entre le lointain et nos yeux. Mais pensons au brouillard... On ne voit rien car les ondes lumineuses ne viennent pas directement d'un objet, elles sont propagées à travers un amas de gouttes d'eau, leur diffusion n'est plus simple mais multiple", déclaré à l'AFP Michel Campillo, pour expliquer sa démarche scientifique. Les codas perdent rapidement leur énergie en se divisant: certaines sont réfléchies, d'autres réfractées, une propagation aléatoire et complexe qui est le témoin de la structure de la Terre. "Avant, on pensait qu'on ne pouvait pas retrouver la trace d'ondes directes, c'est-à-dire d'information", souligne Michel Campillo, mais "depuis quelque temps, des expériences en laboratoire ont montré qu'il était peut-être théoriquement possible de le faire". L'équipe de Michel Campillo s'est employée à appliquer à la sismologie cette hypothèse toute théorique: les enregistrements de stations sismologiques basées au Mexique, zone très sismique, ont été exploitées. Résultat: après quelques minutes, ce sont bien des ondes diffuses qui parviennent aux observatoires. Ensuite les géophysiciens ont compilé ces "codas" mesurées sur deux stations d'enregistrement A et B, distantes de plusieurs dizaines de km. En les exploitant mathématiquement, ils se sont aperçus que la corrélation moyenne entre les signaux n'était autre que la réponse sismique que l'on aurait enregistrée en B si l'on avait généré une impulsion forte et brève en A. "On a découvert la trace d'ondes sismiques, de signaux directs, qu'on aurait eu à une station si on les avait produites à l'autre. C'est assez magique", souligne le chercheur. Ce résultat est d'importance pour la théorie, "mais il ouvre surtout des perspectives très intéressantes". Pour analyser le sous-sol, il faut soit des explosions (coûteuses), soit attendre un tremblement de terre (aléatoire). "S'il suffit d'installer deux stations pour trouver la réponse sismique entre deux points, il n'est plus besoin d'attendre un tremblement de terre", explique M. Campillo.

Science du 24-01-2003 :

http://www.sciencemag.org/cgi/content/abstract/299/5606/547?etoc

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