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Quand les neurosciences préparent les armes du futur

Les guerres du XXIe siècle pourraient bien utiliser des implants ou des prothèses directement insérés dans le corps pour commander des engins à distance, et aura recours à de nouveaux médicaments pour améliorer les comportements des soldats au combat. Ce qui ne va pas sans poser de sérieuses questions d’éthique.

Des armes commandées à distance directement depuis un cerveau humain, utilisant des faisceaux d’ondes pour causer des douleurs, des stimulations électriques du cerveau pour stimuler la combativité d’un soldat. Ce ne sont pas les ingrédients du prochain volet de Star Wars ni d’une quelconque production de science-fiction. Mais peut-être bien ce à quoi pourrait ressembler la guerre du futur.

C’est ce qu’expliquent des experts en neuroscience, sécurité internationale, psychologie et en éthique, qui se sont réunis pour rédiger un rapport publié par la Royal Society au Royaume-Uni, et qui fait le point sur ce que les derniers développements de neurologie pourraient apporter aux techniques de combat. Les experts divisent le champ de développement des neurosciences en deux : d’une part, la capacité pour un Etat ou de son armée d’améliorer ses performances militaires, d’autre part sa capacité à dégrader celle de ses ennemis.

Côté  "offensif", les avancées dans les technologies à interface neuronale permettraient ainsi à des drones d’être contrôlés directement par le cerveau humain, grâce à des implants spécifiques. Les recherches se concentrent également sur des armes à énergie dirigée, notamment l’Active Denial System (ADS – littéralement "système de dénégation actif "). Un implant magnétique au bout du doigt pourrait permettre d’envoyer un faisceau d’ondes d’un millimètre qui chaufferait la peau d’un adversaire et causerait une sensation de brûlure très douloureuse. Tout en étant invisible. Les chercheurs assurent également que la recherche investit le champ des drogues capables d’améliorer la vigilance et la mémoire des militaires sur le champ de bataille.

En interne, une armée pourrait également améliorer son fonctionnement. L’évolution de la neuro-imagerie autoriserait ainsi les recruteurs de l’armée à choisir des soldats présentant certaines facultés mentales, qui pourraient être détectées dès le premier entretien grâce à de nouveaux appareils. Alors que certains excellent dans la détection de cible dans un environnement hostile, d’autres sont particulièrement prédisposés à la prise de décision malgré des situations de stress intenses.

Pour opérer ces révolutions, les neurosciences parviennent à des avancées rapides dans la capacité à planifier l’activité du cerveau et  à manipuler ses réponses avec des stimulants. Les recherches se concentrent sur le développement de prothèses pour le cerveau ou d’implants. Elles ne sont ceci dit qu’à des stades expérimentaux, souligne le rapport de la Royal Society. Pour l’instant, ces nouvelles techniques sont testées pour les soins des soldats sévèrement blessés sur le champ de bataille irakien ou afghan. La neuro-pharmacologie se concentre par ailleurs également sur la recherche d’agents capables d’améliorer le savoir, la capacité à apprendre, à atténuer les effets du manque de sommeil ou encore à mieux traiter les stress post-traumatiques.

"La plupart de ce que nous évoquons relève du rêve, aujourd’hui encore. Mais la vitesse à laquelle ces technologies se développent avec une rapidité alarmante", estime Rod Flower, professeur de pharmacologie biochimique à la Queen Mary University de Londres. Ces avancées posent effectivement de sérieuses questions d’éthique. "Cela nous amène à l’idée d’une possible brouille entre l’esprit et la machine. Si nous arrivions à développer la capacité de contrôler une machine, et que la machine commettait quelque chose que s’apparenterait à un crime de guerre, qui sera responsable, l’homme ou l’engin ? ", s’interrogent les chercheurs.

"Nous savons que la recherche en neuroscience peut être très bénéfique socialement. Ainsi, on se rapproche chaque jour de traitements pour la dépression, les addictions, la schizophrénie ou la maladie de Parkinson", note Rod Flower, professeur de pharmacologie biochimique à la Queen Mary University de Londres. "Mais la compréhension du cerveau et des comportements humains,  associée avec les développements dans l’administration des drogues, souligne que l’on pourrait modifier les comportements humains avec des armes", analyse-t-il.

Les chercheurs insistent sur la question des agents chimiques en mesure de provoquer des invalidités ou des incapacités. L’enjeu à court terme, est selon le rapport, de clairement redéfinir, au sein de la Convention sur l’interdiction des armes chimiques, la notion d’agents chimiques provoquant des incapacités, et de prévoir les risques que font courir ces nouvelles techniques. La prochaine réunion des Etats membres de ce traité se tiendra en 2013. Et devra impérativement intégrer ces questions d’éthique.

Atlantico

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