RTFlash

Edito : Les Puces RFID vont faire partie de notre vie quotidienne mais doivent respecter notre vie privée

En quelques années, les puces-radio, plus communément appelées RFID, ont fait leur apparition dans tous les secteurs économiques, industriels et commerciaux et poursuivent leur irrésistible ascension. Parmi les derniers exemples en date d'application de ces puces, les clefs de la nouvelle Renault Clio ou la carte Navigo, qui va être généralisée, à partir du 20 mai, à tous les franciliens et permet aux voyageurs de franchir sans contact les portillons. Ces puces RFID (identification par radiofréquence) ont également fait leur entrée dans le domaine de la santé et en France, plusieurs hôpitaux, comme le CHU de Marseille, utilisent à présent ces puces pour l'identification et la traçabilité des analyses et des médicaments.

Demain ces puces seront intégrées dans notre dossier médical personnel, ce qui permettra à toute personne habilitée et dotée d'un lecteur spécifique, à l'hôpital ou sur le terrain (en cas d'accident par exemple) de prendre immédiatement connaissance de l'ensemble notre dossier médical. L'armée américaine utilise déjà les puces RFID pour suivre les patients de son Fleet Hospital Three en Irak grâce à un bracelet adapté. La solution permet de remplacer la saisie manuelle sur papier de données concernant l'identité du patient, son traitement, les diagnostics, etc.

Mais la montée en puissance de cette technologie ne fait que commencer et, selon le cabinet d'analyses IDTechEx, spécialisé dans les nouvelles technologies, le marché de la RFID, estimé aujourd'hui à 1,8 milliard d'euros, dépassera les 6 milliards en 2008. D'après une autre étude récente de l'institut IDTechEx, les dépenses mondiales pour des technologies liées au RFID devraient passer de 1,85 milliard de dollars l'an passé à 12,35 milliards en 2010. Deutsche Bank Research, encore plus optimiste, a même estimé le potentiel d'ici 2010 à 22 milliards d'euros (26 milliards de dollars).

Au début des années 90, Air liquide a été l'une des premières sociétés à utiliser cette technologie, pour assurer la traçabilité de ses bouteilles de gaz médicaux. Dans le domaine culturel, un nombre croissant de bibliothèques utilisent également ces étiquettes électroniques sur les livres afin de pouvoir gérer par informatique, en temps réel, l'ensemble des prêts. C'est notamment le cas de bibliothèques prestigieuses comme celles du Vatican, de San Francisco ou de Seattle. En Europe, les 25 antennes de la Bibliothèque Publique d'Amsterdam sont en train de mettre en oeuvre des puces RFID pour la gestion des prêts de leurs livres. La solution comprend plusieurs stations de lecture RFID pour réaliser l'emprunt et le retour des livres, et améliorer le contrôle des inventaires et le réapprovisionnement de manière fiable.

L'Allemagne est le pays européen qui jusqu'ici investit le plus dans des projets liés au RFID, devant la Grande-Bretagne et la France. Les applications semblent particulièrement prometteuses dans le domaine de la distribution, où la technologie devrait reléguer le code-barres aux oubliettes. Deutsche Bank Research table sur 2,5 millions d'étiquettes électroniques dans les 15 plus anciens Etats membres de l'Union européenne d'ici 2008, dont presque un quart en Allemagne où le groupe Metro commence déjà à les utiliser.

Les puces RFID envahissent aussi des domaines où on ne les attendait pas. C'est ainsi qu'au Portugal, une loi prévoit qu'en 2007, tous les chiens devront être munis d'une puce-radio permettant leur identification ! Au Japon, une école d'Osaka a décidé d'équiper les enfants de puces RFID. Glissés dans les cartables ou les vêtements, ces puces permettront de suivre les élèves grâce à des lecteurs RFID savamment répartis dans l'enceinte de l'établissement.

Depuis 1999, des poids lourds de la grande distribution, comme l'américain Wal-Mart, l'allemand Metro et le britannique Tesco, se sont regroupés au sein d'un consortium baptisé Auto-ID, basé au Massachusetts Institute of Technology (MIT), qui vise à mettre au point un standard commun à toute la chaîne d'approvisionnement. Ils ont été rejoints par des fabricants de produits grand public, tels que Procter &Gamble, Gillette ou Unilever, et des sociétés de technologie, comme Motorola et Sun Microsystems.

Compte tenu du coût encore élevé de ces puces (de 10 à 30 centimes selon les types de puces), les géants de la grande distribution procèdent par étape et mettent pour l'instant en oeuvre les puces RFID dans le secteur logistique : tri, transport, suivi... Dans ce domaine, les étiquettes électroniques RFID apparaissent comme un réel progrès par rapport au classique code-barres : la possibilité de lire simultanément plusieurs étiquettes permet ainsi de connaître en une seconde tout le contenu d'une palette ou d'un carton, sans même toucher à l'emballage. De quoi accélérer considérablement les inventaires et automatiser la gestion des stocks. Wal-Mart et Tesco ont d'ores et déjà exigé de leurs fournisseurs qu'ils placent des étiquettes électroniques sur tous leurs produits. D'autres entreprises, comme Benetton et Marks &Spencer, développent également cette technologie. Quant au groupe français Carrefour, il a rejoint l'an passé Tesco et Metro pour mener une expérimentation avec le fabricant de puces Intel.

Au-delà de la grande distribution, c'est tout l'univers de la logistique qui se convertit à la technologie RFID. En France, Airbus procède à l'étiquetage de toutes ses pièces d'avion avec des puces RFID. Royal Mail, la poste britannique, a débloqué une enveloppe de 2,9 millions d'euros pour équiper ses sites opérationnels : l'installation d'étiquettes électroniques sur les colis lui offrira une vision en temps réel de tout le processus de distribution postale. Le Sernam, filiale transport et logistique de la SNCF, procède à un test sur le site parisien de la porte de la Chapelle, dédié aux livraisons de nuit : quatre portiques installés sur les quais enregistrent, à la seconde près, l'heure de passage des colis.

Mais il reste que la généralisation de ces puces-radio à toutes les activités de notre vie quotidienne devra franchir des obstacles qui ne sont pas seulement d'ordre économique et technologique. Dans l'ensemble des pays développés, et notamment aux Etats-Unis, des mouvements de consommateurs et de citoyens se constituent pour appeler l'attention des pouvoirs publics sur les dangers que peuvent présenter pour la vie privée et les libertés individuelles une utilisation sans contrôle de ces puces électroniques. Il est vrai qu'aux Etats-Unis, les autorités envisagent, dans le cadre de la lutte anti-terroriste, un système qui permettrait de lire les nouveaux passeports électroniques à une distance de plusieurs mètres, ce qui rend possible des contrôles d'identité à l'insu des personnes concernées.

Dans le domaine commercial, Consumers Against Supermarket Privacy Invasion and Numbering (Caspian) aux Etats-Unis et FoeBuD en Allemagne se sont élevés contre des expériences menées par Wal-Mart et Tesco pour étudier le comportement des consommateurs ou lutter contre le vol au moyen de caméras déclenchées par les puces RFID. « Il y a des risques de captation de données à l'insu du porteur, car ces puces activables à distance peuvent fournir des informations en toute discrétion, sans accord ou geste conscient de la part du client », reconnaît Christophe Pallez, secrétaire général de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil).

Face à ces interrogations, la Commission européenne a récemment annoncé le lancement d'une consultation publique afin de déterminer s'il était nécessaire de réglementer l'usage de ces étiquettes électroniques. "Il faut discuter ces questions, et voir jusqu'où le consommateur est prêt à accepter cette nouvelle technologie", a souligné la Commissaire à la société de l'information Viviane Reding lors d'une conférence de presse.

Les géants de l'électronique et de l'informatique, bien conscients de ce problème lié au respect de la vie privée, cherchent de leur côté des solutions pour lever les réticences du grand public. IBM vient ainsi de présenter un système ingénieux. L'antenne de la puce n'est ainsi plus intégrée dans cette dernière, mais simplement placée à l'extérieur. Ainsi, le consommateur une fois chez lui n'aura qu'à arracher cette antenne pour être certain que la puce n'émettra plus de signal à plusieurs mètres. Avantage, le système RFID reste actif, mais n'émet plus qu'à deux ou trois centimètres, ce qui permet une lecture des informations du produit uniquement si l'on applique un lecteur pratiquement sur la puce.

Si l'on veut que cette technologie prometteuse puisse être généralisée et atteigne un degré d'acceptabilité sociale suffisant, il est capital de mettre en oeuvre un cadre législatif et juridique qui assure une véritable protection de la vie privée et des libertés individuelles, en encadrant et en limitant très strictement les possibilités de récupération de données personnelles à l'insu des intéressés.

Cette garantie est d'autant plus importante que, demain, nos passeports, cartes d'identité ou cartes de sécurité sociale contiendront des puces radio et nos concitoyens n'accepteront cette technologie que s'ils ont la conviction qu'elle facilite et améliore leur vie quotidienne, sans être utilisée à leur insu à des fins commerciales ou pour contrôler leurs déplacements de manière injustifiée. Il est donc indispensable qu'un grand débat démocratique s'ouvre, en toute transparence, sur l'utilisation de ces puces RFID afin d'associer nos concitoyens à une réflexion juridique et éthique sur les champs et les limites d'utilisation de cette technologie qui va profondément transformer notre vie.

René Trégouët

Sénateur du Rhône

Fondateur du Groupe de Prospective du Sénat

Noter cet article :

 

Recommander cet article :

  • Jean

    16/10/2012

    Utiliser une puce RFID comme moyen de payement et d'identification me fait penser au futur système économique mondial annoncé par l’apocalypse chapitre 13 verset 16 il y a plus de 2000 ans :
    Et elle fit que tous,petits et grands ,riches et pauvres,libres et esclaves,reçoivent une marque sur leur main droite et leur front et que personne ne puisse acheter et vendre sans avoir la marque le nombre de la bête ou le nombre de son nom
    qui est 666 (déjà caché dans tous les barres codes au niveau mondial, simple à vérifier sous google et sur les barres code des produits dans votre frigo)
    après le futur krach économique on va passer au mode d’argent électronique (plus de billets et de liquide) puis à la puce implanté sur la main droite ou le front …..
    on n’arrête pas le progrès,science sans conscience n’est que ruine de l’âme.

  • back-to-top