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Edito : La prochaine révolution informatique est déjà en marche

La première révolution informatique prit forme il y aura bientôt 30 ans quand, respectant la loi empirique de Moore, la puissance des micro-processeurs se mit à doubler tous les 18 mois. Ainsi, partant en 1971 d'un microprocesseur dont le coeur battait à une fréquence de 104.000 fois par seconde (le 4004 d'Intel), nous disposerons en l'an 2000, dans la machine de Monsieur Toulemonde, d'un processeur dont la puissance de calcul aura été multipliée par 10.000 puisqu'il dépassera le gigahertz (1 milliard de battements par seconde). La seconde révolution se déroule actuellement sous nos yeux sans que nous en ayons encore bien pris conscience : celle de la montée en puissance du monde Internet. Hier, le Web n'était qu'une application parmi les autres (bureautique, base de données, jeux, etc...) sur notre micro-ordinateur. Pour les internautes de plus en plus nombreux, qui passent dorénavant plus de temps sur Internet que sur les autres applications installées sur leurs micros, leur ordinateur n'est plus qu'un outil leur permettant essentiellement de naviguer sur la toile. Dorénavant, l'élément discriminant de nos systèmes personnels n'est plus seulement le micro-processeur mais aussi le modem et la capacité du réseau nous permettant d'être reliés au Web. C'est pourquoi, et les grandes manoeuvres qui actuellement se déroulent entre les groupes mondiaux d'informatique et de télécommunications le confirment, la priorité des priorités est la capacité des réseaux qui relieront, qu'ils soient en postes fixes ou mobiles, chacun d'entre nous au reste du monde. Tout laisse à penser que la Loi empirique de Moore qui, depuis trente ans, se vérifie année après année pour les processeurs, va dorénavant s'appliquer pour les capacités du réseau qui seront mises, à prix constant, à la disposition de chaque internaute alors qu'il aura fallu près de 20 ans pour multiplier par dix les débits téléphoniques de l'usager de base. Cette convergence entre la puissance de calcul des micro-processeurs et les débits des réseaux qui, demain, relieront toutes ces machines fixes ou mobiles de plus en plus miniaturisées, va profondément bouleverser notre environnement, que ce soit au travail, chez nous, dans notre voiture, dans nos loisirs. Mais ces deux premières révolutions ne seraient rien, oserais-je dire, s'il n'y avait pas une troisième révolution informatique qui était déjà en marche. Aujourd'hui encore, le plus gros des supercalculateurs est incapable de savoir qui s'approche de lui et de décrire l'environnement dans lequel il se trouve. Il est aveugle, sourd, muet et est incapable de réagir à un contact ou d'analyser un goût. Il ne dispose d'aucun des sens qui permettent au cerveau humain d'échanger avec son environnement. Cette nouvelle phase fondamentale qui va maintenant prendre corps à une vitesse sidérante va être la plus spectaculaire car elle sera plus facilement " assimilable " par chacun d'entre nous en donnant un caractère " naturel " à toutes les nombreuses machines qui seront très différentes de nos ordinateurs actuels et qui, demain, composeront notre environnement. Demain, c'est à dire avant cinq ans, nous parlerons naturellement, non seulement à notre micro-ordinateur et à nos multiples " wireless " (téléphones portables, organiseurs, etc...) mais aussi à notre téléviseur, à notre magnétoscope, à notre voiture, à notre réfrigérateur, etc... Et très naturellement ces machines nous répondront. Cette affirmation ne fait déjà plus partie du futur puisque dans quelques semaines il vous suffira de dire une phrase devant votre Mac pour que votre machine se configure selon vos propres paramètres et non selon ceux de votre collègue de travail ou de votre fils. Ces nouvelles relations entre l'être humain et la machine vont être majeures pour nous faire entrer culturellement dans un monde nouveau. Depuis des décennies, le clavier, malgré l'aide de la souris et de l'environnement graphique, a été un obstacle infranchissable qui a empêché des pans entiers de populations de nos pays modernes d'entrer dans le futur. Mais, demain, nos machines auront non seulement des oreilles et la parole, mais aussi la vue, le toucher et le goût. Les capteurs, que nous appellerons dorénavant senseurs, car ils vont donner des sens et donc une certaine forme d'intelligence cognitive à nos machines, que ce soit sous forme de caméras ultra-miniaturisées, de micros, de radars, de détecteurs de chaleur, de capteurs de pression, d'analyseurs de spectre électro-magnétiques, de nez, de palais, vont se multiplier dans tous nos lieux de vie. Selon Paul Soffo, Directeur de l'Institute for the Future, le moteur de la prochaine révolution sera le couplage des senseurs bon marché aux microprocesseurs bon marché et aux lasers bon marché. Nos machines, demain, seront sensibles à notre présence, sauront anticiper nos souhaits et auront même la capacité de lire nos émotions. Elles rempliront le rôle d'assistants, de majordomes, de vigiles, d'auxiliaires. Elles surveilleront nos logements, nous éviteront d'avoir des accidents avec nos voitures et même surveilleront notre santé en avertissant automatiquement des services d'urgence en cas de besoin. Ces machines du futur vont se glisser dans tous nos objets les plus usuels, nos vêtements, nos chaussures, notre montre et même dans nos lunettes pour faire partager en direct par exemple à notre famille qui est restée à Paris ce que nous sommes en train de vivre à Tokyo. Tant que les machines n'ont été capables que de multiplier de façon stupéfiante leur capacité de calcul et qu'elles se sont mises à converser entre elles dans un langage malgré tout ésotérique pour l'être humain, nombreux sont ceux qui n'ont pas compris que ces nouvelles technologies allaient changer le monde. Grâce à ces senseurs, nos machines s'adapteront dorénavant à l'environnement humain au lieu de nous contraindre comme trop souvent, encore actuellement, à entrer dans le leur. Cela va provoquer la rupture culturelle, certains diraient la révolution, que des vieux peuples comme le nôtre attendent pour enfin entrer dans le futur.

René Trégouët

Sénateur du Rhône

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