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Edito : Pour que l'intelligence l'emporte sur la violence : vive le logiciel libre

Selon l'excellente définition d'Alvin Toffler, trois pouvoirs différents régissent notre Monde. Le Pouvoir par la violence, le Pouvoir par l'argent et le Pouvoir par le savoir. Après la chute du mur de Berlin nous avions cru que le Pouvoir par le Savoir l'avait définitivement emporté sur le Pouvoir par la violence. Malheureusement, depuis le 11 Septembre 2001, nous avons pris conscience qu'il n'en est rien. Le pouvoir par la violence s'appuie sur des structures pyramidales (hiérarchie et chef), et veut contraindre plus que convaincre. Ne parlons pas du Pouvoir par l'argent qui est fondamentalement amoral puisqu'il ira toujours là où c'est le plus lucratif. Le Pouvoir par le Savoir s'appuie sur les réseaux. Selon la nature du Pouvoir qui l'emportera, dans ces prochaines années, ce sont les logiciels propriétaires qui l'emporteront si la violence domine ou les logiciels libres si le savoir et les réseaux prédominent. La partie est loin d'être gagnée pour les logiciels libres car l'histoire de l'Open Source est trop souvent liée, de façon erronée, à l'histoire échevelée et anarchique de l'Internet des années 90. En confondant les valeurs des biens immatériels, et en voulant accéder gratuitement aux produits à valeur ajoutée que sont la connaissance et l'expertise, comme si c'étaient de simples informations, les internautes ont obligé la communauté mondiale de la propriété intellectuelle, surtout dans les domaines de la musique et du cinéma, à réagir. C'est ainsi que Microsoft, le leader mondial du logiciel propriétaire, a peu à peu élaboré une riposte qui pourrait fondamentalement changer la nature même du monde Internet, dans ces prochaines années. Ainsi, avec les systèmes Passport, Palladium (récemment devenu NGSCB) et DRM (Gestion des Droits Numériques), chacun devra montrer patte blanche sur le réseau et s'acquitter de tous les droits avant de pouvoir accéder à un bien numérique. Il est difficile d'imaginer voir les producteurs de biens immatériels refuser une telle aubaine, eux qui souvent ont été pillés par de nombreux hackers, depuis plusieurs années. Mais, si cela se passait ainsi, la communauté Internet serait en grand danger. En effet, une société privée, aussi puissante et respectable soit-elle, n'aurait pas le droit moral de « fliquer » l'ensemble de la toile mondiale. Devant de tels agissements, je pense qu'il devient urgent pour toutes les Démocraties, de favoriser le développement des communautés « Open Source » sur leurs territoires, et d'obliger leurs administrations à utiliser des logiciels libres. Ce n'est qu'ainsi que les Gouvernements et nos concitoyens pourront être assurés que les logiciels qu'ils utilisent ne cachent pas de programmes espions et ne recèlent pas de portes dérobées. Seuls les Gouvernements sous le contrôle du Parlement ont le droit dans nos Démocraties de mettre en oeuvre des règles qui régissent toutes les relations entre les citoyens, et ont en charge la protection de la vie privée. Les démarches initiées par Microsoft, mais aussi par Intel avec TCPA, vont beaucoup trop loin car elles entrent dans un domaine qui est de la seule compétence des Gouvernements. Si nos Démocraties n'ont pas la sagesse de tout mettre en oeuvre, très rapidement, pour éviter que de grandes compagnies se substituent à elles pour remplir certaines de leurs missions régaliennes, il est à craindre que, très rapidement, se lève une profonde révolte contre ces tentatives de retirer des libertés fondamentales à chacun de nous. Ce serait alors un vrai gâchis car, après la vague d'espoir apportée par la mise en réseaux de plus d'un milliard d'être humains, nous pourrions connaître une période de glaciation sans précédent s'appuyant sur la défiance et une forme nouvelle de technophobie.

René TRÉGOUËT

Sénateur du Rhône

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